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Le Monde " La decharge de Casablanca toxique et hors de contrôle"
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14 novembre 2018 11:34
Maroc : Médiouna, la décharge sauvage qui empoisonne Casablanca

La plus grande décharge publique du royaume est un gigantesque dépotoir à ciel ouvert, où gisent plus de 40 millions de tonnes de déchets industriels et ménagers.

Par Ghalia Kadiri Publié hier à 18h02, mis à jour à 06h36

Hamid ne les sent même plus. Les odeurs nauséabondes de putréfaction. Le parfum des déchets qui se décomposent lentement dans le sol. Chaque jour, il plonge dans une montagne d’immondices, sans masque ni gants. Près de quarante-cinq mètres de détritus entassés sur une surface de soixante-dix hectares, aux portes de Casablanca, servant de nourriture au bétail et de gagne-pain aux chiffonniers.

Ces récupérateurs informels se ruent sur les camions-bennes pour ramasser tout ce qui peut être vendu aux entreprises de recyclage locales ou à l’export. « Ici, on fait du business. Vous voyez cette montagne de poubelles ? Ça vaut de l’or », confie Hamid. Autour, des « rivières » de ce lixiviat, jus extrêmement polluant produit par l’eau de pluie traversant les ordures, débordent sur la route et donnent la nausée aux automobilistes. Le soir, une fumée noire et âcre mêlant des résidus toxiques empoisonne l’air des riverains.

Bienvenue à Médiouna, « la poubelle de Casablanca », résume Salaheddine Aboulghali, président de la commune du même nom, député et homme d’affaires. La plus grande décharge publique du Maroc, un gigantesque dépotoir sauvage à ciel ouvert, où gisent plus de 40 millions de tonnes d’ordures ménagères provenant de la capitale économique et ses 4 millions d’habitants. Officiellement. Car on y trouve aussi des produits pharmaceutiques et industriels, des déchets de construction et des solvants enfouis depuis trente-deux ans dans un terrain schisteux qui ne dispose d’aucun système d’étanchéité et pollue par conséquent les nappes d’eau souterraines et les puits avoisinants.

« On se terre chez nous, car l’air est irrespirable. Les enfants sont malades. Les crises d’asthme se multiplient », Hanane Bouzil, de l’association Mamans de Bouskoura

« Et nous ! Ça nous empoisonne ! », s’emporte Hanane Bouzil, présidente de l’association Mamans de Bouskoura. Cela fait quatre ans que la Marocaine de 42 ans milite pour la fermeture de la décharge. « Tous les responsables nous ont reçus, mais rien n’a été fait. » Depuis 2013, des milliers de familles ont quitté le tumulte de la vie casablancaise pour s’installer du côté de la forêt de Bouskoura, où est née « la ville verte », une banlieue chic entourée de verdure et d’un immense golf.

Mais très vite, les effluves de la décharge, située juste derrière les rangées d’arbres à l’orée de la forêt, ont gâché la vie des habitants. « On se terre chez nous, car l’air est irrespirable. L’odeur nous retourne l’estomac. Les enfants sont malades. Les crises d’asthme se multiplient, énumère Mme Bouzil, qui y vit depuis plus de quatre ans. On a pris un crédit pendant vingt-cinq ans pour acheter nos maisons, on s’est fait avoir. »

Ouverte en 1986, la décharge de Médiouna n’a jamais été réhabilitée. Entre-temps, Casablanca n’a cessé de s’agrandir, devenant l’une des villes les plus densément peuplées du monde. Et la construction de quartiers résidentiels de luxe dans la zone a relancé le débat sur la gestion chaotique des déchets de la ville. « Nous avons créé le Collectif pour l’environnement [CPE] afin de rassembler tous les habitants qui subissent ces problèmes, y compris les communes avoisinant la décharge, plus défavorisées. La maladie ne touche pas que les riches ! », explique Hassan El-Mansouri, du CPE.

Le silence des autorités

Exaspérés par le silence des autorités, des membres du collectif ont investi, le 18 octobre, une réunion du conseil de la ville, masques sur le visage en signe de protestation, pour faire réagir le maire de Casablanca, Abdelaziz El-Omari. En vain. « Personne ne nous répond. On ne sait pas qui est le vrai responsable », soupire Hanane Bouzil, cofondatrice du CPE.



Modifié 1 fois. Dernière modification le 14/11/18 11:38 par axis7.
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14 novembre 2018 11:35
Suite article du Monde :

Le silence des autorités

Exaspérés par le silence des autorités, des membres du collectif ont investi, le 18 octobre, une réunion du conseil de la ville, masques sur le visage en signe de protestation, pour faire réagir le maire de Casablanca, Abdelaziz El-Omari. En vain. « Personne ne nous répond. On ne sait pas qui est le vrai responsable », soupire Hanane Bouzil, cofondatrice du CPE.

Depuis 2008, la ville de Casablanca a délégué la gestion de la décharge à l’entreprise américaine Ecomed. Dix ans plus tard, le 23 juillet, les équipes d’Ecomed ont été délogées manu militari par les services de la ville, qui accuse la société d’avoir manqué à ses obligations. « Il était question d’exploiter la décharge de Médiouna pour une période transitoire de deux années seulement, après quoi on devait la fermer et ouvrir un nouveau site », s’est défendu Ahmed Hamidi, le PDG d’Ecomed. « De toute façon, depuis le début, c’est l’anarchie totale », balaie Lhoucine Nasrollah, président de la commission de l’urbanisme, de l’aménagement du territoire et de l’environnement au conseil de la ville. « La nature refuse le vide, alors forcément une activité parallèle s’y est créée. »

Plus de 3 400 tonnes d’ordures en tout genre sont déposées chaque jour

A l’entrée de la décharge, où caméras et personnel de sécurité surveillent de près les va-et-vient, les camions font la queue pour déverser leur cargaison. Plus de 3 400 tonnes d’ordures en tout genre sont déposées chaque jour sur ces soixante-dix hectares. « Même si, théoriquement, la décharge est publique, sa gestion se fait de manière totalement informelle mais très organisée. Une véritable mafia a créé un écosystème lucratif sans que l’Etat ne touche un centime, renchérit un ancien patron d’une entreprise de recyclage à Tit Mellil, au sud-est de Casablanca, qui fut un temps impliqué dans ce trafic. Si le système fonctionne, c’est grâce à des lobbys puissants qui protègent leurs intérêts. Des hommes d’affaires ont tiré profit du tri et de la valorisation des déchets. »

Au plus bas de l’échelle, les chiffonniers, appelés « bouara », gagnent 200 à 300 dirhams (18,5 à 28 euros) la journée. Près de quatre mille jeunes gens venus des douars – les petits villages – alentours pour sillonner la décharge à la recherche de bouteilles en plastique, de conserves ou de cartons, transportés à l’aide d’une charrette. « On vient pour trier les ordures déversées par les camions et on les donne au boss, raconte Hamid, un récupérateur de 33 ans. Les camions provenant des quartiers riches sont plus difficiles à avoir, il faut payer le chauffeur pour y avoir accès. »

Les « boss », ce sont des grossistes qui chargent les poids lourds de déchets triés et empaquetés en ballots, jusqu’à six tonnes par jour, soit un bénéfice de 4 000 dirhams (370 euros) par jour. Direction les entreprises locales de recyclage, qui s’approvisionnent majoritairement par le circuit informel, dans un pays où il n’existe pas de système de recyclage encadré par l’Etat. « En réalité, la majorité va directement à l’export », précise M. Nasrollah.
Plusieurs familles vivent à l’intérieur

A l’intérieur de la décharge, où vivent plusieurs familles dans des abris de fortune, des tentes en plastique servent de restaurants ou de buvettes. Les moutons et les vaches se promènent sur les collines et se nourrissent dans les tas d’ordures. « Chaque fois que la montagne monte trop haut, on brûle les déchets. Ou alors on les recouvre de terre pour que ça ne déborde pas », raconte Hamid. Un cache-misère, loin de réduire les risques d’éboulement ou d’explosion qui planent sur la décharge de Médiouna et ses riverains. Hamid hausse les épaules. Ce père de trois enfants a grandi dans un des trente-six douars limitrophes où l’odeur et la fumée ont envahi le quotidien des occupants. « C’est notre vie, on s’est habitués ! »
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14 novembre 2018 11:36
suite et fin de l'article du Monde :

Rachida, la quarantaine, est l’une des rares de son quartier, dans le douar de Lahlaybya, à se soucier des dangers : « On a des allergies, les yeux rouges et des migraines interminables. » Les déchets, balancés à la porte de leurs maisons en tôle, attirent mouettes, moustiques et autres insectes. Les enfants trempent dans les marées de lixiviat, pieds nus. « Ma fille de 16 ans a fugué. Elle n’avait aucune chance de trouver un mari. Mêmes les autres bidonvilles ne veulent pas de nous. »

Plusieurs projets de logements sociaux ont déjà vu le jour tout autour de la décharge

Après quinze ans de vie au milieu des ordures, Rachida va bientôt déménager dans un appartement en dur, dans le cadre du programme de « recasement » des bidonvilles, initié il y a plus de dix ans par le Maroc. Elle sourit. C’est juste à côté. Plusieurs projets de logements sociaux ont déjà vu le jour tout autour de la décharge, d’autres sont à venir. « Au moins on sera en hauteur ! Et peut-être que ça découragera nos enfants d’aller y travailler, ils auront honte face aux nouveaux voisins qui viendront du centre-ville. »

Le risque que représente cette décharge est encore peu documenté. Dans son rapport annuel de 2013, la Cour des comptes s’inquiétait cependant des dangers liés à « des déchets ménagers mélangés avec des déchets hospitaliers et pharmaceutiques, sans procéder au contrôle préalable de leur innocuité ». Un rapport réalisé la même année par la cour régionale des comptes signalait « que les eaux prélevées dans les cinq puits avoisinants la décharge sont de mauvaise à très mauvaise qualité. (…) La consommation des produits [viandes, lait et abats] issus du bétail en pâturage dans la décharge présente des risques imminents sur la santé publique du fait de leur contamination par les bactéries », poursuit le document.
Les chiffonniers sont les seuls à faire du recyclage

Un programme national sur les décharges arrêté en 2008 prévoit pourtant de fermer et de réhabiliter toutes les décharges sauvages ou non contrôlées. A qui la faute ? A Casablanca, les élus se renvoient la balle. « Le conseil de la ville a failli à ses obligations, tranche Salaheddine Aboulghali. En 2008, la ville s’était engagée à mettre à niveau la décharge d’ici 2011. Ce sont des promesses en l’air. » Contactés par Le Monde, les élus du Conseil de la ville n’ont pas donné suite à nos sollicitations. « J’essaye moi-même de les sensibiliser à ce sujet, assure Lhoucine Nasrollah. Mes propositions sont rejetées, les réunions que j’initie sont refusées. »

L’incinération, « c’est le pire scénario ! », Mamoun Ghallab, de l’association Zero Zbel

Loin d’être fermée, la décharge de Médiouna s’apprête à accueillir une petite sœur. Un terrain de trente-cinq hectares, non loin du dépotoir, qui servira d’extension. La ville a lancé un appel d’offres pour « les travaux d’aménagement de la nouvelle décharge », dont l’ouverture des plis devait avoir lieu fin septembre, avant d’être reportée. Une des solutions envisagées est la technique de l’incinération. « C’est le pire scénario ! », s’offusque Mamoun Ghallab, président de l’association Zero Zbel (zéro déchet).

Les incinérateurs brûlent des ordures diverses, notamment des matières plastiques et des métaux qui dégagent de nombreuses substances toxiques pouvant être inhalées, ingérées ou contaminer le sol. « Au lieu d’investir des milliards dans une machine prétendument magique, il faudrait commencer par mettre en place des centres de tri et prendre en compte les chiffonniers qui, rappelons-le, sont les seuls au Maroc à faire du recyclage ! », poursuit le militant écologiste.

Du haut de leurs montagnes d’ordures, les bouara jurent qu’ils n’arrêteront jamais. Malgré l’odeur, les maladies, ou la peur de mourir. Presque chaque jour, le feu se déclare au milieu des immondices, à cause des produits hautement toxiques et inflammables. Hamid sait que tout peut exploser. Qu’importe. « Au moins, ça nous permet de gagner de l’argent », dit-il. Tous les gamins des douars alentours travaillent ici. « On n’a rien d’autre. Si ça ferme, on est morts. »

Ghalia Kadiri (Casablanca, envoyée spéciale)



Modifié 1 fois. Dernière modification le 14/11/18 12:53 par axis7.
A
14 novembre 2018 11:50
salam aleykoum

c'est simple tous fonctionne et fonctionnait auparavant même si on mettait des nuls aux postes clès car fils de et que papa et copain de...

Contre un billet on ferme les yeux .

Sauf que depuis les déchets issus de l'industrialisation massives sont apparus

et

surtout explosion de la démographie

Donc les fils de copains de qui n'ont pas de vision à long terme si ce n'est quelle beuverie ils vont faire le soir même avec leurs potes.Et remplir les coffres en suisses et acheter des villas bah leur manque de gestion se voyaient pas auparavant .

Sauf que là ça va se voir de plus en plus et comment sa terminera:

_épidémie de maladie
_guerres
_famines

les gens qui pouvaient faire quelques choses les cerveaux sont partis ou partent en Occident.Car ils savent que trop bien qu'au bled on ne favorise pas les gens en fonction de leurs compétences mais d'après leurs connaissances.

Et là on parle des ordures mais il y a pleins d'autres domaines ou c'est dans le rouge et ou il y a pleins de défis sérieux à relever.Et ça c'est pas seulement pour le Maroc mais globalement tous les pays en voie de développement.

Allah Oualem
 
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