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Bush, l’Europe et l’Otan
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26 février 2005 19:32
Dans le grand théâtre d’ombres de la diplomatie internationale, la moindre dissonance fait scandale. Il convient donc de saluer l’audace de Gerhard Schröder, qui, une semaine avant la visite de George W. Bush en Europe, avait bousculé les usages en ouverture d’une conférence sur la sécurité qui se tenait à Munich. Le chancelier allemand avait provoqué l’ire conjointe du secrétaire d’État américain, Donald Rumsfeld, et du secrétaire général de l’Otan, Jaap de Hoop Scheffer, en appelant de ses voeux « une réforme en profondeur de l’Otan ». Pour mesurer la charge subversive du propos, il faut redire ici ce qu’est l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord : une alliance militaire ratifiée en 1949, en pleine guerre froide, par des États occidentaux désireux d’unir leurs forces contre toute éventuelle agression de l’Union soviétique. « Guerre froide », « Union soviétique »... les contempteurs de M. Schröder semblent penser que rien de tout cela n’a vieilli. En 1949, à Paris, le radical Henri Queuille était président du Conseil. À Pékin, Mao prenait le pouvoir. En URSS, le régime stalinien expérimentait sa première bombe atomique. Et Marcel Cerdan périssait dans un accident d’avion. C’était hier ! Donald Rumsfeld a raison : le monde n’a pas changé.

Malheureusement, il faut convenir que, d’un certain point de vue, il n’a pas tout à fait tort. Car, en vérité, cette Otan à laquelle il ne faut pas toucher a été conçue dès son origine comme un instrument de vassalisation de la vieille Europe par la jeune et puissante Amérique. Cinquante-cinq ans plus tard, l’URSS n’existe plus, la guerre froide n’est plus qu’un concept poussiéreux au fond des livres d’histoire, mais la vassalisation, elle, est toujours d’actualité. D’où l’indignation de M. Rumsfeld.

Si la raison gouvernait un tant soit peu le monde, Gerhard Schröder n’aurait pas seulement suggéré que l’on réforme l’Otan, mais qu’on la dissolve. Et sa proposition aurait été appuyée par tous les pays européens. Au lieu de cela, il existe dans le projet de traité constitutionnel (en son article I-41) une allégeance explicite aux « obligations découlant du traité de l’Atlantique Nord ». La politique de défense européenne, nous dit-on, « est compatible avec la politique commune de sécurité et de défense arrêtée dans ce cadre ». Voilà qui relativise les refrains sur la « redéfinition des relations transatlantiques » entendus ces jours-ci tandis que George W. Bush entamait sa campagne européenne. Et voilà qui explique que l’on en est plus souvent réduit à scruter les intentions du visiteur (avec cette obsédante question : « Bush 2 sera-t-il plus conciliant que Bush 1 ? ») qu’à affirmer une volonté européenne indépendante. Pour être elle-même, l’Europe n’a pas besoin d’être anti-américaine. Mais elle ne doit pas non plus céder à un mimétisme qui la réduirait à l’état de concurrent vassalisé de l’Amérique, empruntant dans la bataille économique ses méthodes et ses valeurs. L’Europe et les États-Unis ne doivent pas être opposés à la manière de deux boissons gazeuses à base de cola qui ne se différencient que par le nom de leurs actionnaires.

Une fois de plus, le Proche-Orient va constituer un test pour les Européens. Lundi, à Bruxelles, le Président américain a révélé que sa priorité était désormais le règlement du conflit israélo-palestinien. Ses hôtes, qui subissent le contrecoup de ce conflit jusqu’au sein de leurs sociétés, sont depuis longtemps convaincus qu’il faut trouver une solution au Proche-Orient. Mais ils ont été jusqu’ici incapables d’adopter une position commune sur le sujet qui fasse ployer l’hyperpuissance. Aujourd’hui encore, ils semblent condamnés à espérer que le Président américain soit sincère quand il parle d’« État palestinien viable » avec une « vraie continuité territoriale ». Ou, à tout le moins, qu’il y trouve son intérêt, ne serait-ce que pour se sortir du mauvais pas où il est engagé en Irak. Les Européens n’ont plus qu’à espérer que les mots aient le même sens de part et d’autre de l’Atlantique. Et que le « règlement » du conflit ne signifie pas pour les États-Unis le retrait des colonies israéliennes de Gaza, pour solde de tout compte. On peut se montrer sceptiques si l’on se souvient que George W. Bush a déjà dit sur ce dossier tout et son contraire.

D’autant plus que le projet israélien reste dépourvu de la moindre visibilité politique, même à moyen terme. Imaginez que M. Sharon ayant dû « affronter » ses colons à Gaza considère, comme il
l’a déjà annoncé, qu’il faut les reloger en Cisjordanie. L’arnaque serait totale. Et le sentiment de frustration, côté palestinien, immense. Les États-Unis de George Bush iraient-ils alors jusqu’à contraindre leur allié historique ? Et, à défaut, l’Europe pourrait-elle faire entendre une voix forte et indépendante ? C’est ici que le doute s’insinue. Et c’est ici que l’on aurait bien besoin d’une totale redéfinition des rapports transatlantiques. Pour une relation fondée sur l’indépendance et le respect mutuel et non sur une vassalisation héritée de Yalta. Mais de cela, George Bush l’« Européen » n’a pas voulu parler.

Denis Sieffert
La liberté des autres étend la mienne à l'infini.
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26 février 2005 22:01
avec l'équipe bush actuelle: Rumsfeld à la défence, Rice aux affaires étrangères, je doute fort d'1 changement de la politique americaine envers le monde (y compris envers l'europe).je prévois même une radicalisation de cette politique envers les pays arabes (Syrie, Soudan, palestine...)et l'iran.
 
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