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Grand Angle

Mères célibataires au Maroc : Une lutte quotidienne [Magazine]

Cachés, des milliers d'enfants au Maroc grandissent sans père et sont élevés par leur mère. Majoritairement issues de milieux défavorisés, ces femmes luttent contre la stigmatisation et la précarité.

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Temps de lecture: 3'

Le mot «mère célibataire» peut correspondre à diverses situations. Certaines femmes veuves ou divorcées élèvent seules leurs enfants. Par contre, la quasi totalité des mamans célibataires, celles qui sont seules pour élever leur enfant dès sa naissance, sont des adolescentes ou des adultes ayant eu un enfant hors mariage. À l'échelle nationale, 61% des mères célibataires ont moins de 26 ans.

Exclues. Elles sont les grandes oubliées de la Moudawana. Les dispositions du code de la famille concernent la femme en tant qu'épouse. Les relations sexuelles hors mariage constituent un délit passible d'emprisonnement d'un mois à un an, comme stipulé dans l'article 490 du Code Pénal. Elles sont donc considérées comme hors la loi. Dans une société marocaine arabo-musulmane où la reproduction humaine est régie par les normes du mariage, les grossesses contractées en dehors de ce cadre s'accompagnent très souvent de rejet et de stigmatisation.

Lorsqu'elles apprennent leur grossesse, nombre de ces femmes sont rejetées et/ou chassées par leur famille. Hanane se souvient avec amertume de ses trois années de relation avec Mostapha. Celui-ci a nié la paternité de son enfant lorsqu'elle lui a appris sa grossesse et campe toujours sur sa position. «Personne n'est au courant de ce qui m'arrive, à l'exception de ma mère et de ma tante», confie-t-elle, honteuse. Pour Aziz Kich, enseignant chercheur en psycho-sociologie à la Faculté des Sciences de l'Education à Rabat, «le regard de la société marocaine est dépréciateur. Il est marqué par l'idée de péché, de honte et d'insécurité». «Les gens oublient souvent que pour faire un enfant, il faut être deux. L'homme n'est jamais inquiété, jamais responsabilisé», déplore Houda El Bourahi.

Précarité

Cette exclusion, conjuguée à l'analphabétisme et à la pauvreté, poussent certaines jeunes femmes à envisager le suicide, l'abandon de l'enfant et parfois même l'infanticide. D'autres, pour survivre avec leur enfant, sont amenées à mendier ou à se prostituer. Lorsqu'elles trouvent du travail, elles sont souvent reléguées dans des emplois mal payés, informels, sans aucune garantie de stabilité ni de sécurité sociale.

L'Institution Nationale de Solidarité Avec les Femmes (INSAF) en détresse appuie ces mères célibataires dans leur recherche d'un emploi stable, à Casablanca «Nous apprenons aux femmes que nous accueillons des métiers tels que la couture, le nursing, la coiffure ou encore la cuisine. Nous mettons à leur disposition, au sein même de nos locaux, une crèche ainsi que des «nounous» qui prennent soin de leurs bébés pendant qu'elles assistent aux formations», renseigne Houda El Bourahi, directrice opérationnelle.

Sofia fait partie de ces femmes qui ont été accueillies et ont reçu un soutien psychologique à l'INSAF. «J'ai obtenu des renseignements selon lesquels il existait des associations à Casablanca qui venaient en aide aux femmes en détresse. J'ai atterri à l'INSAF où le personnel m'a soutenue et assistée.

J'ai bénéficié d'une prise en charge complète et à présent je me sens en sécurité mais je suis un peu désorientée, ici, à Casablanca. Je souhaiterais retourner à Khouribga avec ma fille mais c'est impossible pour l'instant. Je veux garder mon enfant avec moi coûte que coûte. Avec l'appui de l'INSAF, je compte élever convenablement ma fille.»

Des centres de formation et de bienfaisance, des associations et des personnes de bonne volonté réussissent à prendre en charge un certain nombre de ces «mères». Au regard de l'ampleur du phénomène, les associations sont toutefois dans l'incapacité de répondre à la majorité des besoins. «Les mères célibataires doivent pouvoir dépasser le traumatisme psychologique qu'elles vivent et qui risque de les maintenir bloquées à jamais dans un sentiment de culpabilité», estime le professeur Kich. Selon lui, la compassion et la compréhension de tous - institutions, décideurs, famille - est nécessaire, de même qu'une campagne active d'éducation et de sensibilisation.

Cet article a été précedemment publié dans le n°13 de Zmag

Housna ou la dignité dans l'adversité

C'est dans le quartier Hay Fath, à Rabat, que cette native de Settat a décidé de s'installer avec son jeune garçon. A 25 ans, Housna se définit comme une célibattante. Maman d'un petit Amine âgé de 3 ans, la jeune femme se consacre à deux choses dans sa vie : l'éducation de son fils et la vente quotidienne de mellouis, rghiffa et autres galettes.

« Lorsque j'ai appris ma grossesse, je ne voulais qu'une chose : mourir. La honte, le désespoir et la déception m'ont, tour à tour, submergée. Puis avec le temps, je me suis fait une raison. Il me fallait rebondir et continuer à vivre. Je me suis forgée un caractère ferme. J'ai décidé de m'en sortir. J'ai pu compter sur le soutien de mes cousines résidant à Rabat. Elles m'ont prêté une somme d'argent avec laquelle j'ai pu lancer mon commerce. A présent, je remercie le Tout-Puissant car je parviens à m'en sortir ; bien entendu, avec l'appui de mes cousines. Je compte tout mettre en œuvre pour que mon fils aille à l'école et devienne un éminent médecin. Inch'allah. »

mères célibataires au maroc
Auteur : touria222
Date : le 27 décembre 2011 à 14h50
tout à fait d'accord avec tibiskuit
à la fin du compte en se pleint de nombre d'enfants de la rue , chemkaras , les voleurs au bled qui n'arrête pas d'augumenter au maroc.
pour qu'elles puissent se retenir il faut appliquer cette loi qui dit : zani wa zania , fajlidouhom)
Réponse à Delpha
Auteur : tibiskui
Date : le 27 décembre 2011 à 13h36
Je ne concoctes rien du tout, je ne suis qu'une simple "musulmane" qui constate simplement cette hypocrisie à deux faces. Y a t-il dans l'Islam une rubrique qui concerne le statut de "ces femmes" ? Je dis tout haut ce que la majorité pense tout bas... Comment voulez-vous aider ces personnes qui se sont mis dans cette situation, alors que d'autres n'ont rien fait et subissent leurs méfaits, notamment leurs enfants en premier lieu et leurs familles. N'essayez pas de transposer le niveau de vie des Occidentaux avec un pays musulman en voie de développement (pays qui rame pour arriver à s'en sortir sur tous les plans)...
La seule hypocrisie ici...
Auteur : MOHAMMED
Date : le 27 décembre 2011 à 13h21
C'est la monarchie qui est assise sur 2 chaises différentes.
Ni sharia ni anti-sharia donc résultat un chmilblik sociétal
Réponse à khadijea45 et salamtoyou
Auteur : tibiskui
Date : le 27 décembre 2011 à 12h42
Oui, je suis très dure avec ces femmes. En ce qui concerne l'éducation sexuelle, où que l'on soit dans n'importe quel pays musulman, on nous inculque à nous les femmes dès notre plus jeune âge, la base sans rentrer dans les détails c'est à dire "nous préserver" jusqu'au mariage. Il faut arrêter l'hypocrisie, en disant que ce n'est pas de leur faute qu'elles ne savaient pas. Elles connaissent par coeur les films d'amour, égyptiens, mexicains, turques, mais elles ne savent pas se retenir en ce qui concerne leur dignité et leur honneur ? N'oubliez pas que ces femmes n'écoutent personne lorsque leur entourage est au courant de leur relation et leur déconseille d'aller plus loin. J'ai eu dans mon entourage une personne qui a fait ça elle a détruit sa vie plus celle de la famille. Je suis désolée pour le terme de "bâtard" pour ces enfants là, mais comment les désigner ? Jésus, et leur mère Marie ? Faut arrêter ces délires, sinon il n'y aurait pas autant d'orphelinats au Maroc...
Ce que produit l'intolérance
Auteur : Delpha
Date : le 27 décembre 2011 à 12h32
Ah quel beau projet tu concoctes pour la société marocaine !

C'est parce que la société marocaine est si conservatrice et si intransigeante moralement qu'elle est une machine à produire des marginaux. Parce qu'en gros, ces femmes qui ont (au yeux de la loi et de majorité) "fauté", n'ont, en particulier dans les campagnes, aucune autre alternative que le suicide, la prostitution ou que de se résoudre à abandonner dans le plus grand secret leur progéniture à un tiers, ces femmes seront condamnées à une vie de marginalité et de souffrance. Leurs progénitures elles seront étiquettées "ould 9***a" ou "bent 9***a" et seront moquées dans les cours d'écoles et jusque sur les bancs de la fac si par miracle ils parviennent un jour à y accéder. Mais malheureusement, l'immense majorité d'entre eux, vaincue par la stigmatisation et étouffée par l'étau social qui pèse sur eux iront grossir les cohortes de jeunes en désherrance et, pour les jeunes filles et même désormais les jeunes garçons, iront à leut tour vendre leur corps. Et c'est précisément comme ça qu'à la marge d'une société conservatrice où l'intransigence morale est la règle, le chiffre d'affaire de la prostitution est paradoxalement plus important qu'il ne l'est dans des sociétés où la fornication est si banalisée qu'elle est presque devenue la règle !
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