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Grand Angle

Mission de Nora Iffa : Sillonner l’Afrique à bicyclette... malgré la Covid-19

Se familiariser avec les cultures des peuples est un vieux rêve qui hante la vie de la jeune aventurière marocaine Nora Iffa. Depuis un an, elle a décidé de le vivre, en se rendant dans d'autres pays d’Afrique, plutôt que d’aller en Europe ou en Asie. Elle n’en garde aucun regret, mais que des émotions fortes.

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Nora Iffa, voyageuse marocaine / DR.
Temps de lecture: 3'

Après plusieurs excursions au Maroc pendant quatre ans, Nora, 32 ans, a décidé de partir à la découverte des autres pays d’Afrique dont elle connaît très peu la culture. Elle a voulu donner un caractère spécial à cette aventure, qu’elle a préféré mener à vélo, un «moyen idéal pour contrôler sa vitesse et profiter du voyage».

Elle réussit à convaincre ses parents dans cette entreprise, malgré leur grande inquiétude pour elle et pour sa situation salariale, ayant pris deux ans de congé sans solde. Il lui a fallu six mois d’entraînement pour acquérir la condition physique qui lui permettrait de parcourir des milliers de kilomètres, dans des pays qu’elle connaissait très peu.

«Mes larmes n’ont cessé de couler, sur le chemin vers l’aéroport Mohammed V le 6 janvier 2020. J’étais envahie par le doute. Je commençais même à chercher des prétextes pour annuler mon départ. En apprenant que mon vol avait un retard, je me suis dit que c’était peut-être un signe pour que je reste. Ce jour-là, j’ai eu des sentiments très mitigés. Mais dès mon arrivée en Egypte, j’ai réalisé que j’avais franchi un premier pas.»

Nora Iffa

Un accueil chaleureux au Soudan

Cette native d’Essaouira a, en effet, décidé de commencer son voyage depuis l’Egypte, où elle a passé un mois entier, avant de tracer son chemin vers le Soudan en février dernier. A ce moment-là, les pays de la région ont commencé à enregistrer les premiers cas d’infection au nouveau coronavirus. «Je n’avais sur moi que l’équivalent de 600 dirhams et j’ai découvert que je ne pouvais pas retirer de l’argent avec ma carte bancaire internationale, selon la loi du pays. Je n’avais pas non plus le droit de recevoir de l’argent de l’extérieur du Soudan», a-t-elle confié à Yabiladi.

L’aventurière marocaine, fonctionnaire au ministère de l’Aménagement territorial, de l’habitat, du logement et de la politique de la ville, s’est retrouvée contrainte de vivre au Soudan pendant 25 jours avec 600 dirhams. Mais elle a pu compter sur la générosité : «Je n’ai rien eu à dépenser, le peuple soudanais est très hospitalier. Tout le monde partageait avec moi ses repas. Les gens m’ont accueillie chez eux, même l’hôtel où j’ai passé une nuit, je n'ai rien payé», se souvient-elle.

Le 2 mars dernier, Nora est arrivée en Ethiopie. Cette étape du voyage a coïncidé avec la propagation croissante de la Covid-19, la confrontant à des épreuves difficiles. «A mon arrivée à Addis-Abeba, j’ai rencontré un couple étranger à vélo. Je les ai rejoints et certains Ethiopiens ont commencé à nous taxer de patients infectés, pensant que nous étions venus de zones endémiques».

«Des enfants et des adolescents nous ont jeté des pierres. La personne qui m’accompagnait et son épouse ont été blessés au visage, mon vélo a été endommagé… Ils ont continué leur chemin et j’ai dû rester sur place pour réparer mon vélo. Malheureusement, ce n’était pas la dernière fois qu’on me jettera des pierres.»

Nora Iffa

 

Une situation instable en Ethiopie, entre pandémie et tensions politiques

Bien que l’Ethiopie soit un pays qui «mérite d’être découvert», Nora Iffa estime y être arrivée «au mauvais moment» et qu’elle y a été exposée «à beaucoup de harcèlement».

«Mon objectif en voyage n’est pas seulement de parcourir des distances, mais d’interagir avec des personnes d’autres cultures et pays, et d’apprendre à les connaître de près.»

Nora Iffa

Ce qui a ajouté aux problèmes de l’aventurière marocaine aura été la fermeture des frontières de nombreux pays voisins, y compris le Kenya, où elle comptait se rendre. Elle est finalement restée en Ethiopie environ 6 mois.

Après que le Maroc a décidé d’ouvrir ses liaisons aériennes pour le rapatriement des Marocains bloqués à l’étranger, Nora a préféré rester, dans l’espoir que le Kenya ouvrirait ses frontières. Mais la situation tendue en Ethiopie après l’assassinat du chanteur et militant Hachalu Hundessa l’a forcée à revenir au pays.

«Cet assassinat a plongé l’Ethiopie dans un déferlement de violence», a regretté Nora, décrivant «des moments difficiles». «Les autorités du pays ont décidé de couper Internet pendant 15 jours. Nous étions complètement coupés du monde extérieur. J’appelais ma famille uniquement depuis le téléphone de l’hôtel», nous confie la voyageuse.

Sur le chemin du retour au Maroc, Nora est arrivée en Turquie où, là encore, un imprévu l’a contraint de rester plus longtemps que prévu. En effet, elle a découvert que des affaires manquaient aux bagages. Son vélo et son équipement de voyage ont disparus. Il n’était donc pas possible pour elle de rentrer avant de les retrouver, ce qui l’a forcée à passer 20 jours de plus en Turquie, le temps de tout récupérer.

Début septembre, Nora Iffa a retrouvé sa famille. Pour l’heure, elle est encore au Maroc, en raison des restrictions sur les voyages. «J’attends impatiemment que les choses rentrent dans l’ordre pour continuer mon voyage», nous confie-t-elle, ajoutant que si les possibilités ne lui permettent pas de reprendre l’aventure de sitôt, elle consacrera l’année qui lui reste en congé à une tournée au Maroc.

Article modifié le 15/12/2020 à 22h32

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