Menu

Dalil Boubakeur, acte II ?

Le Conseil français du culte musulman élit son président, dimanche.
Boubakeur bien parti pour garder les rênes du CFCM




Dalil Boubakeur, acte II ? A priori, l'actuel président du Conseil français du culte musulman (CFCM) devrait retrouver son siège dimanche, à l'issue du vote du conseil d'administration. Le recteur de la Grande Mosquée de Paris (elle-même proche de l'Algérie) devrait pouvoir compter sur les voix de la Fédération nationale des musulmans de France (FNMF, proche du Maroc). Celle-ci hériterait de deux vice-présidences, la Mosquée de Paris s'en arrogeant une troisième.

La grande inconnue, ce vendredi, était l'attitude de la troisième grande fédération musulmane : l'Union des organisations islamiques de France (UOIF, proche des Frères musulmans). Celle-ci pourrait, soit accepter de siéger à la tête de l'instance musulmane aux côtés des deux autres fédérations, auquel cas le nombre des vice-présidences serait porté à quatre, l'UOIF en obtenant une. Soit décider de faire cavalier seul, présentant ses propres candidats à la présidence et au bureau exécutif. Jeudi, Fouad Alaoui, secrétaire général de l'UOIF, penchait pour la seconde solution dans un laconique communiqué : «Le CA de l'UOIF a décidé la non-participation de l'UOIF au bureau proposé» et «se réunira samedi pour décider de la présentation d'une liste». Ce samedi, le conseil d'administration de cette organisation se réunira pour arrêter sa décision. Le ministre de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy, qui avait porté le CFCM sur les fonts baptismaux en 2003, devrait y faire une apparition pour tenter de convaincre les dirigeants de cette fédération de siéger aux côtés de la Mosquée de Paris et de la FNMF.

Conquête. Reste que ce suspens est inédit. En 2003, lors de la première élection du CFCM pour un mandat de deux ans, Dalil Boubakeur et les deux vice-présidents ­ Fouad Alaoui, secrétaire général de l'UOIF, et Mohammed Béchari, président de la FNMF ­ n'avaient pas été élus mais s'étaient partagé les sièges de président et vice-présidents. A l'époque, la Mosquée de Paris était beaucoup moins bien implantée que ses rivales. Et pour éviter que cette dernière ne saborde l'élection en quittant le navire, Nicolas Sarkozy avait convaincu la FNMF et l'UOIF de laisser la présidence de l'instance représentative musulmane à Dalil Boubakeur. Cette fois-ci, il devrait en aller autrement.

En deux ans, la Mosquée de Paris a mené un réel travail de terrain, son recteur multipliant les déplacements dans les régions. Résultat : lors du premier tour de l'élection, dimanche dernier, destinée à répartir les sièges du conseil d'administration, elle a obtenu 10 des 43 sièges (six de plus qu'en 2003), faisant jeu égal avec l'UOIF (trois sièges de moins par rapport à 2003). La grande gagnante étant la FNMF qui a raflé 19 sièges (3 de plus qu'en 2003) (1). En théorie, cette dernière pourrait donc revendiquer la présidence, mais elle souffre d'un problème de leadership. Début juin, elle a blackboulé son charismatique président, Mohammed Béchari, accusé de pratiquer un pouvoir très personnel. Ce samedi, elle devrait nommer en remplacement Abdellah Boussouf, ancien recteur de la grande mosquée de Strasbourg. Mais cet homme n'a pas encore acquis une envergure nationale suffisante. Par ailleurs, les partisans de Mohammed Béchari n'ont pas désarmé. Dimanche dernier, alors qu'il commentait le score de sa fédération, Abderrahim Berkaoui, nouveau porte-parole de la FNMF, a été bruyamment interrompu par un autre membre de cette organisation lui contestant sa légitimité.

Silence. Du côté de l'UOIF, c'est le silence radio. Depuis la déclaration de Fouad Alaoui, ses dirigeants sont aux abonnés absents. Présentée depuis 2003 comme l'organisation la plus dynamique, la mieux implantée, la plus efficace et la plus dangereuse, car soi-disant partisane d'un islam fondamentaliste, l'UOIF est la grande perdante de l'élection de dimanche dernier. Le soir même, Fouad Alaoui en avait d'ailleurs contesté les résultats, soulignant que la FNMF n'avait présenté des listes à son nom que dans 11 des 25 régions, alors que les résultats lui ont donné 19 sièges. «Apparemment, des listes ont été rattachées (à la FNMF, ndlr) pour la simple raison qu'elles sont d'origine marocaine», a-t-il protesté.

Pour les actuels dirigeants de l'UOIF, l'heure est grave. Désavoués par les électeurs, ils sont contestés en interne. Yamin Makri, porte-parole du Collectif des musulmans de France, groupement de jeunesse proche de Tariq Ramadan, les a publiquement qualifiés de «nouveaux notables musulmans de la République», et de «relais dociles des pouvoirs institutionnels».

(1) Un siège va au représentant de l'islam officiel turc, deux autres pour les mosquées de La Réunion et le dernier à la mosquée indépendante Al-Islah de Marseille.

Source: Libération

Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com