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France : Chahrazad, une jeune marocaine brulée vive

Cela fait trois ans que Chahrazad Belayni attendait ce procès. Trois longues années qu'elle attendait que justice soit enfin faite. C'est hier tard dans la nuit que le verdict est tombé : 20 ans de prison pour Mushtaq Amer Butt, 28 ans. Le jeune homme d'origine pakistanaise a été reconnu coupable de « tentative d'assassinat » sur son ex-petite amie Chahrazad et ce trois jours après l'ouverture du procès.

Agée aujourd'hui de 21 ans, la jeune femme d'origine marocaine s'est dite "soulagée" même si elle considère qu'elle n'a pas eu toutes les réponses à ces questions. Elle en a d'ailleurs posé une hier à l'accusé lors du procès : "Je voudrais savoir pourquoi ? parce que j'ai pas de haine, je suis pas méchante", sans obtenir de réponse.

La rencontre en juin 2004 d'Amer et Chahrazad est presque banale. Lui travaillait dans une boutique de mode et elle faisait son stage de bac pro secrétariat dans cette même boutique. Ils tombent amoureux et font des projets de mariage. Mais subitement le comportement d'Amer change. C'est ce qu'a expliqué la jeune femme mardi dernier à la Cour d'Assisse. Elle décrit son ex-petit ami comme méchant et agressif et ajoute qu'entre eux ça n'allait plus. C'est à ce moment que les coups commencent à tomber. C'est à ce moment qu'Amer profère les premières menaces de mort.

Les mois passent et Amer n'accepte toujours pas sa rupture avec Chahrazad et surtout son refus de l'épouser. C'est le 13 novembre 2005 que le jeune homme décide de passer à l'acte et de mettre en action ses menaces. Alors que Chahrazad gagnait à pied son travail à Neuilly Sur Marne, il l'asperge d'essence et met le feu à son corps. Elle raconte même à la cour en sanglot : « "Il était très en colère (..) a dit qu'il allait me tuer (...) Il a sorti le bidon d'essence et m'a couru derrière. Tout mon corps a pris feu".

La jeune marocaine a failli y perdre la vie. C'est grâce au secours d'un riverain qu'elle est vivante aujourd'hui. Son corps a été brûlé à 60% et elle a été maintenue plusieurs semaines dans un coma artificiel. Greffée plusieurs fois, elle souffre d'importantes séquelles physiques et psychologiques. Fin 2006, elle a même tenté de mettre fin à ses jours.

De son côté, Amer Butt s'enfuit et s'envole paisiblement vers le soleil du Pakistan. Rongé par les remords, il décide de revenir en France un an après avoir brûlé Chahrazad et se livre par lui-même à la justice. Il est ensuite mis en examen.

L'agression de Chahrazad émeut la France toute entière. Une émotion tellement vive que Nicolas Sarkozy, à l'époque Ministre de l'Intérieur remet à Chahrazad, en novembre 2006, son décret de naturalisation en lui lançant "Bienvenue dans la communauté française".

Mais au-delà de l'émotion générale suscitée, un espèce de déjà-vu réapparait et de sombres souvenirs refont surface : ceux de la mort en 2002 de la jeune Sohane âgée de 17 ans, morte brûlée vive dans un local à poubelle à Vitry-sur-Seine. L'auteur du meurtre, un jeune garçon de 19 ans, avait agit également par dépit amoureux.

Ces deux tragédies en moins de deux ans ont amené l'opinion publique à s'intéresser de plus près aux problèmes des banlieues françaises et surtout à révéler au grand jour les réalités des quartiers qui sont les discriminations, l'exclusion, les violences sexistes, le poids des traditions, la religion et l'intégrisme.

C'est d'ailleurs un an après la mort de Sohane que l'Association Ni Pute Ni Soumise a été créée, une association qui milite pour faire respecter les droits des jeunes filles dans les quartiers. Chahrazad est aujourd'hui vice-présidente d'honneur de l'association.

Farida Lamrani
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