Le suspense perdure au sujet des ossements découverts récemment à Jnane Sbil. Autorités et ONGs attendent les conclusions des enquêtes de la police scientifique.
Tout a commencé par de banals travaux de réaménagement du parc Jnane Sbil à Fès. Dès les premiers coups de pioche, les ouvriers découvrent ce qui ressemble à une fosse commune, avec des restes de dépouilles humaines. A qui appartiennent-ils ? Très vite, des sources locales ont évoqué des dépouilles des victimes de la répression des émeutes du 14 décembre 1990. Selon des sources sur place, la police scientifique travaille encore pour percer le secret de ces restes avant de soumettre les conclusions de ses enquêtes au parquet. «H est question de procéder à un travail de datation, mais aussi de vérifier si ces ossements appartenaient à des humains», commente une source informée et qui suit de près le dossier de ces restes découverts, les 3 et 9 mars à Fès. Mohamed Sebbar, président du Forum marocain vérité et justice (FMVJ), pour sa part, estime qu'il y a «une grande probabilité que ces restes soient ceux de quelques victimes de la répression des émeutes du 14 décembre 1990». A l'en croire, il s'agirait des restes d'au moins trois personnes. Toutefois, il tempère en affirmant qu'il faut attendre les conclusions des enquêtes encours entreprises après la saisie, par cette ONG, du parquet de la capitale spirituelle. «Nous demandons toutefois à ce que les normes techniques internationales en lu matière soient respectées et que l'opinion publique soit tenue au courant des conclusions des investigations en cour », conclut Me Sebbar. Que fait le Conseil consultatif des droits de l'homme (CCDH) qui a repris le flambeau, dans ce genre de dossiers, après la disparition de l'IER ? «Evidemment qu'on s'y intéresse !», nous répond Ahmed Herzenni, président du CCDH. «On se renseigne sur ce qui s'estpassé et on décidera de la suite à donner», explique M. Herzenni qui affirme qu'aucune délégation du CCDH n'a encore été dépêchée sur place. Hamid Chabat, maire de Fès, est quant à lui, resté injoignable tout au long de la journée. Cependant, une source proche de ce dernier affirme qu'il écarte l'éventualité que les restes découverts à Jnane Sbil appartiennent à des victimes du 14 décembre 1990.
Répression
En décembre 2005, une équipe de l'IER avait fait la lumière sur le sort de 106 victimes des événements des 14,15 et 16 décembre. Selon les conclusions des enquêtes dévoilées à l'époque par une équipe dirigée par Abdelaziz Bennani, les tombes de l'écrasante majorité des victimes (99) étaient localisées au cimetière de Bab El Guissa. Les sept autres dépouilles, non identifiées, avaient été inhumées au cimetière de Boubker Ben Larbi près de l'hôpital Khattabi. Les victimes du 14 décembre 1990 ont eu droit à des épitaphes. Ce n'est que récemment encore que ce dossier faisait surface de nouveau avec la découverte, en deux temps, de ce qui pourrait être des restes des dépouilles des victimes de la répression aveugle qui s'était abattue sur la capitale spirituelle à cette époque-là. Tout avait commence, il y a quelques jours, avec le début des travaux à Jnane Sbil, un jardin public très célèbre à Fès et que la mairie de cette ville voulait réaménager en partenariat avec la Fondation Mohammed VI pour la protection de l'environnement. Après la découverte de ces restes, les travaux avaient été suspendus et un black-out a été imposé autour de cette «affaire». Pour ne pas «jeter d'ombre» sur la visite et le séjour, avec plusieurs projets à la clé, de Mohammed VI ? Finalement, les ONGs, le FMVJ à leur tête, ont ébruité l'affaire. La justice a fini par se saisir du dossier.