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Quel sort pour les bidonvillois de Madrid?

L’affaire des immigrés du bidonville de Canada Real Galiana de Madrid n’est pas près d’être close. La juge, chargée de l’instruction, a ordonné la suspension de la démolition pour trois jours suite aux débordements de jeudi dernier entre les forces de l’ordre et les habitants. Elle devrait normalement rendre son verdict définitif demain sur les 2.000 habitations illégales et décider du sort des 30.000 bidonvillois, majoritairement marocains.

Entre-temps, le groupe d’amitié de la Chambre des conseillers avec le Sénat espagnol a condamné l’intervention répressive de la police locale contre des immigrés marocains, à ce jour 604.000 dans toute l’Espagne. Le Parti populaire (PP), qui est aux commandes de la capitale espagnole, a aussi fait les frais de cette condamnation. Dans un communiqué diffusé lundi soir en Espagne, le groupe exprime sa solidarité avec les Marocains dans leur démarche militante et dénonce les positions racistes du PP «qui, encore une fois, s’en prend aux ressortissants marocains, et qui n’a épargné ni les personnes handicapées ni les femmes enceintes». Le parti municipal du PSOE (le Parti socialiste espagnol) a considéré, de son côté, que le maire de Madrid, Alberto Ruiz Gallardon et son parti avaient abusé de leur pouvoir. David Lucas, porte-parole de la gauche à la municipalité, affirme, pour sa part «que la bataille, qui a eu lieu à Canada Real Galiana entre les forces de l’ordre et les immigrés, aurait pu être évitée si la mairie avait proposé les mesures sociales nécessaires». Une enquête sur les agents de sécurité devrait s’ouvrir prochainement. Par ailleurs, une manifestation de solidarité est prévue le samedi 27 octobre devant la mairie de Vallacas pour négocier une solution urgente.

Rappelons que cela fait presque une semaine que de violents affrontements ont éclaté entre les autorités municipales et les résidents du bidonville de Canada Real Galiana de la localité de Madrid. La cause? L’application d’une décision de justice qui a ordonné l’expulsion d’une famille marocaine immigrée de son logement illégal. Cette mesure concerne aussi quelques milliers d’autres foyers marocains, mais aussi roumains, présents dans le secteur. Cette véritable «ville dans la ville» était bien connue des autorités. Située à 20 minutes de la Puerta del Sol, elle a été construite sur d’anciens chemins de transhumance, non constructibles. Depuis 40 ans, les maisons ont commencé à pousser comme des champignons, dès que la dictature franquiste s’est ouverte à l’économie de marché (après 1975). D’après certaines sources municipales, la destruction du bidonville était prévue depuis quelques années déjà.

Selon les journaux espagnols, la mairie a envoyé des entreprises de démolition afin de raser les logis de fortune. Les habitants ont alors commencé à manifester violemment contre les autorités (unité d’intervention policière et police municipale), également présentes sur le terrain pour éviter les débordements.

Accueillis par des jets de pierres et des bonbonnes de gaz, les policiers ont été, pour une vingtaine d’entre eux, blessés. De nombreux manifestants ont protesté devant la mairie durant des heures peu après la détention de plusieurs d’entre eux. Malgré ces résistances, la démolition paraît incontournable, mais d’aucuns s’interrogent sur le timing choisi.

Comment reloger des illégaux?
D'après Europa Press, la municipalité de Madrid aurait proposé aux familles d’acquérir un nouveau logement en échange de 300 euros par mois pendant 20 ans à verser à la mairie. Cette solution avait été refusée par les principaux intéressés considérant que ces conditions ne leur étaient pas avantageuses. Leur expulsion ainsi que celles d’autres milliers de personnes sont, néanmoins, prévues pour ces prochains jours. Par ailleurs, dans leur ensemble, les Madrilènes soutiennent les actes de la mairie, des actes qui risquent de s’étendre à l’échelle nationale. En effet, la conseillère de l’urbanisme, Carme Charcon, a déclaré lundi matin qu’il «fallait trouver une solution au problème des bidonvilles car cela ne concerne pas seulement Madrid, mais toute la nation» et «qu’il fallait voir ce problème pas seulement d’ un point de vue des infrastructures, mais aussi d’un point de vue social». Angel Pérez, porte-parole de la Gauche unie à la municipalité de Madrid, a déclaré, de son côté, qu’il «s’agissait d’une zone illégale et qu’à partir de là il fallait qu’on trouve une solution pour reloger ces personnes. Seulement ce droit n’est réservé jusqu’à présent qu’aux citoyens légaux».

Vanessa Pellegrin
Source: L'Economiste

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