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L'immigration en Europe : durcissement quasi général

L'arrivée sur les côtes sud de l'Europe - Italie, Espagne, Malte - de milliers de boat people a redonné un coup de projecteur sur l'impossibilité, pour les pays européens, d'éviter l'afflux de nouveaux migrants. Cette vague n'est pas la première. Après celle de l'immigration de main-d'oeuvre des années 1960, recrutée le plus souvent en Turquie et en Afrique du Nord, la chute, en 1989, du rideau de fer qui coupait l'Europe en deux, puis la guerre des Balkans ont suscité de nouveaux mouvements massifs de populations venues de l'Est et des pays de l'ex-Yougoslavie, principalement vers l'Allemagne et l'Autriche. Elles ont aussi ouvert de nouvelles routes d'accès à une immigration plus lointaine, du Proche-Orient et d'Asie. Les tensions provoquées par cette immigration, dans tous les pays, ont incité les Etats membres de l'Union européenne (UE) à chercher des réponses communes. Ce fut un très long processus, commencé lors de la mise en oeuvre des accords Schengen, en 1985.

Ces dernières années ont toutefois vu le débat se modifier. La baisse préoccupante de la démographie européenne a fait prendre conscience que personne n'avait intérêt à fermer totalement ses frontières, en dépit des taux de chômage élevés de certains pays. Dans le même temps, les retombées des attentats du 11 septembre 2001, aux Etats-Unis, ont mis en relief les conséquences graves des problèmes d'intégration, notamment pour l'immigration musulmane. Cette prise de conscience paradoxale a conduit tous les pays à formuler de nouvelles exigences sur l'"immigration choisie" et les politiques d'intégration. Ce sont celles que l'on retrouve dans le projet de loi du ministre français de l'intérieur, Nicolas Sarkozy, examiné, par le Sénat, dès mardi 6 juin.


L'Italie et l'Espagne ont longtemps été des pays d'émigration. S'ils appellent à l'aide l'UE fac de à l'afflux, sur leurs côtes, des boat people africains, les deux pays ont montré, ces dernières années, une étonnante capacité d'absorption d'immigrants venus pour beaucoup de l'est de l'Europe.

En Italie, le nombre officiel d'immigrés a doublé en cinq ans, dépassant le seuil des 3 millions fin 2005. L'une des premières promesses du nouveau gouvernement de centre-gauche a été de réviser la loi sur la citoyenneté : un million d'étrangers vivant, ou nés, dans la Péninsule - près de 50 000 naissances en 2005 -, pourraient ainsi acquérir la nationalité italienne. En même temps, Rome souhaite une révision de la politique des quotas d'entrée, instaurée par la loi dite Bossi-Fini, en 2002. Répressive, cette loi n'a pas empêché l'arrivée de nouveaux travailleurs illégaux.


L'Europe du sud : des frontières ouvertes

En 2005, 100 000 permis de séjour ont été accordés à des extra-communautaires, alors que les demandes, assorties de contrats de travail en bonne et due forme, étaient de 250 000. Selon le vice-président du Conseil Francesco Rutelli, il s'agit "de procéder, au fur et à mesure, dans le respect des normes en vigueur, à une redéfinition des quotas d'entrée afin d'accueillir les demandeurs réguliers en possession de toutes les qualités requises". Pour le moment, de nouvelles mesures de régularisation massive ne sont pas envisagées, comme celle qui a concerné 680 000 travailleurs illégaux sous le gouvernement Berlusconi.

En Espagne, où les étrangers sont passés de moins d'un million, en 2000, à 3,7 millions en 2005, l'immigration est souvent présentée comme la meilleure illustration des performances économiques de l'Espagne. Depuis septembre 2005, les entrées de migrants subsahariens ont conduit le gouvernement socialiste à présenter trois plans de lutte contre l'immigration clandestine. Mais le nombre d'Africains entrés illégalement depuis sept ans - environ 100 000 - est loin de représenter le gros de l'immigration, dominée par les Marocains (500 000), les Equatoriens (500 000) et les Roumains (317 000). Les gouvernements de José Maria Aznar et de José Luis Rodriguez Zapatero n'ont pas reculé devant les régularisations. La plus importante, en 2005, a concerné 700 000 étrangers.

Pays-Bas : le malaise face à l'islam

Un consensus entre les principaux partis politiques a existé pendant longtemps aux Pays-Bas autour de la notion d'intégration "avec maintien de l'identité". Cette politique, qui s'est traduite par la création d'écoles islamiques, la construction de mosquées ou par des enseignements en arabe ou en turc, n'a pas abouti à une réelle intégration. Elle a suscité une indifférence mutuelle et a maintenu une ségrégation dans l'enseignement, les quartiers et sur le marché de l'emploi. Aujourd'hui, les rapports sont de plus en plus tendus entre Néerlandais d'origine et "nouveaux Néerlandais", singulièrement ceux des communautés musulmanes – un million des 16 millions d'habitants du pays.


Depuis quelques années, le racisme, alimenté par un fort sentiment d'insécurité, s'affiche ouvertement. Le radicalisme a progressé chez les jeunes Néerlandais et, en écho, l'islamisme tente de plus en plus de jeunes notamment d'origine marocaine. En usant de sa célèbre formule – "Les Pays-Bas sont pleins" –, le populiste Pim Fortuyn a allumé, en 2001, une mèche qui n'est pas éteinte. L'apparition d'un terrorisme islamiste a achevé de convaincre les dirigeants de développer une politique d'immigration et d'asile intransigeante et d'obliger les étrangers à s'intégrer en apprenant la langue et la culture du pays.

Source: Le Monde ( Pour lire le dossier complet www.lemonde.fr)

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