Menu

Nouvelle brouille entre Bouteflika et Mohamed VI


Faut-il un sixième État au Maghreb, celui du peuple sahraoui ? La relance de la polémique sur le statut du Sahara occidental, cet ancien territoire espagnol revendiqué à la fois par le Maroc et le Front Polisario enterre le projet d'un grand espace maghrébin aux portes de l'Europe. Organisé pour la première fois depuis onze ans, la réunion au sommet de l'Union maghrébine arabe (UMA) qui devait se tenir aujourd'hui à Tripoli sous l'égide de Muammar Kadhafi a tourné au fiasco, avant même d'avoir commencé. A la veille de la réunion, Mohamed VI a annoncé qu'il déclinait l'invitation pour protester contre des déclarations jugées «inacceptables» d'Abdelaziz Bouteflika.


Le nouveau coup de torchon a débuté par une sortie calculée du président algérien. Dans une lettre adressée à Mohamed Abdelaziz, le chef du Polisario, Abdelaziz Bouteflika réaffirmait la nécessaire «souveraineté et indépendance» du peuple sahraoui «résistant» qui doit «recouvrer sa liberté». «Nous irons en Libye fidèles à nos promesses», indiquait Abdelaziz Bouteflika. En clair, il n'était pas question de se réconcilier avec les Marocains sur le dos du Polisario. Histoire d'ajouter un peu d'huile sur le feu, Mohamed Abdelaziz précisait qu'il n'excluait pas une reprise de la guerre avec le Maroc. De quoi attiser la colère royale. «Je ne renoncerais jamais à la souveraineté marocaine sur les provinces du Sud», avait répété voici quelques mois le souverain chérifien. Il persiste et signe.


Si elle ne change rien sur le fond, l'initiative algérienne arrive au plus mauvais moment. Plus de cinq ans après en avoir pris l'engagement, Bouteflika et Mohamed VI s'étaient enfin rencontrés en mars à Alger en marge du sommet de la Ligue arabe. Les deux hommes avaient mis une certaine solennité dans l'événement. Mais les Marocains ont avec le recul le sentiment d'avoir été floués. Car lors de leurs entretiens, Mohamed VI et Abdelaziz Bouteflika paraissaient d'accord pour traiter du différend sur le Sahara occidental uniquement dans le cadre onusien. Dans son communiqué diffusé lundi soir par le ministre des Affaires étrangères, Rabat dénonce la remise en cause de la stratégie globale de réconciliation entre les deux pays. «On ne peut pas faire confiance au président algérien», commente un officiel.


Parvenus au pouvoir à quelques mois de distance il y a six ans, les deux chefs d'Etat s'étaient promis lors des obsèques de Hassan II de faire du bon voisinage un dossier prioritaire. Depuis, il ne s'est rien passé. La frontière commune est fermée depuis les attentats commis au Maroc par des islamistes issus des banlieues françaises en 1994. Le projet de référendum, initié par les Nations unies, se heurte au refus de Rabat d'entériner le plan Baker qui prévoit pour régler le litige d'accorder au territoire une autonomie administrative durant cinq avant l'organisation d'un vote.


Fidèle à une ligne fixée en accord avec l'armée algérienne, Bouteflika ne bouge pas d'un iota sur le dossier du Polisario. Il n'est pas question d'entrer, comme le souhaite Rabat, dans une phase plus flexible où pourrait être envisagé une troisième voie, avec un statut d'autonomie accordé à la province. Les dirigeants algériens campent d'autant plus facilement sur leurs positions qu'ils ont l'appui de l'ONU et qu'ils sont convaincus qu'une réouverture des frontières profiterait principalement grâce au commerce et au tourisme aux Marocains.


Il reste maintenant aux responsables maghrébins à accepter de tirer un trait sur l'Uma, cette coquille vide qui ne survivait que par ses initiales. En 2003 déjà, un sommet prévu à Alger avait été annulé à la dernière minute. «L'Uma est à mettre au frigo», avait à l'époque commenté Muammar Kadhafi. Tout un programme alors que la Libye venait d'accéder à la présidence tournante de cette fantomatique structure internationale qui semble aujourd'hui définitivement congelée.


En plein marasme, l'intégration maghrébine n'est pas pour demain. Les États d'Afrique du Nord ont pourtant plus que jamais besoin de solidarité régionale. Confrontée à l'accélération de la mondialisation, le Maghreb est incapable de parler d'une seule voix face tandis que son économie est frappée par la concurrence asiatique en particulier dans le secteur des textiles. Quant à sa jeune population, elle rêve dans sa grande majorité de partir en Europe. Loin des disputes stériles du Sahara.

Source: Le Figaro

Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com