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La déclaration du gouvernement devant les députés marocains

«Voter pour ce gouvernement est une grande responsabilité, dire oui (à la déclaration du gouvernement) serait une catastrophe». L’affirmation est de Lahcen Daoudi, numéro 2 du Parti de la justice et du développement (PJD). La formation politique de Saâdeddine El Othmani a ainsi annoncé la couleur: le gouvernement El Fassi doit s’attendre à une opposition farouche de la part du parti islamiste.

Auparavant, Mustapha Ramid, président du groupe parlementaire de cette formation politique, a fustigé dans une intervention de 70 minutes le gouvernement de Abbas El Fassi. Il dira en substance à l’adresse du Premier ministre que la déclaration de politique générale de son gouvernement ne comporte même pas le dixième des promesses électorales de son parti (l’Istiqlal). Véhément, le député du PJD ira jusqu’à dire que la déclaration de politique générale du gouvernement «ne comporte aucune allusion aux deux villes spoliées Sebta et Melilia». Elargissant le champ de ses critiques à l’égard du gouvernement, Ramid a affirmé, sous les applaudissements des élus de son parti, que le Premier ministre, qui encourage l’ouverture du pays sur l’environnement international, n’a même pas rappelé la position, bonne ou mauvaise, de son gouvernement à l’égard de l’accord de libre-échange avec les Etats-Unis. Et encore moins ce que sera la politique du gouvernement en ce qui concerne les rapports avec l’Union européenne, les pays du Maghreb et aussi le monde arabe.

D’ailleurs, le parti islamiste juge «faible la déclaration du gouvernement» dans son ensemble, estimant qu’elle «manque de fil conducteur et qu’elle n’est, en fait, qu’un assemblage anarchique de prévisions, encore plus anarchiques, à réaliser dans des secteurs déjà en marche». Les observateurs s’attendaient certes à une telle sortie de la part du PJD. Mais la formation politique a été encore plus loin. En fait, ses cadres ont décortiqué la déclaration du gouvernement. Ramid a été même jusqu’à rappeler qu’elle ne comporte aucune proposition des autres partis de la majorité. Il a ainsi cité le partenaire de toujours de l’Istiqlal, l’Union socialiste des forces populaires (USFP). «Aucune proposition de vos alliés ne figure, monsieur le Premier ministre, dans votre déclaration», dira-t-il dans son intervention. En fin de compte, le PJD ne votera pas en faveur de la déclaration du gouvernement. On évoque même au sein de ce parti l’éventualité de l’introduction, avec d’autres partis de l’opposition, d’une motion de censure.

Du côté de la Mouvance populaire, il faut dire que les choses ne sont pas encore claires. L’on s’attendait à être fixé au début de l’intervention de Saïd Ameskane, président du groupe de la Mouvance et aussi son porte-parole. Il n’en fut rien. «Soutien critique ou opposition ouverte»? Le député est resté tellement vague sur la question que les esprits des observateurs sont, encore, maintenus dans le flou. On ne saura pas non plus si le Mouvement populaire votera demain en faveur de la déclaration gouvernementale. Le discours d’Ameskane, véritable cours d’histoire sur le MP, est resté assez diffus, voire confus. «La ligne politique du parti est la même, à savoir la défense des idéaux de liberté. Nous sommes donc libres de nos positions et n’avons aucun complexe à être dans l’opposition politique au gouvernement», dira Ameskane. «Comprend qui veut», dit l’adage. Toutefois, une petite phrase du même Ameskane fera dire à certains que le MP fait miroiter l’éventualité de quelques alliances non encore claires. «Nous allons coordonner notre action avec celles des autres membres de l’opposition», a déclaré Ameskane. De quelles alliances s’agit-il? Et dans quels buts? On n’en saura rien actuellement en l’état de flou où se trouve encore la position du MP. Toutefois, du côté du PJD, on n’exclut pas une telle éventualité.

Maintenant, que va-t-il se passer aujourd’hui? Qui votera demain après-midi en faveur de la déclaration du gouvernement? Qui votera contre? Si l’on sait déjà que le PJD va dire non, l’on ne connaît pas encore quelle sera l’attitude du MP. Pas plus que celle de l’Union constitutionnelle (UC) qui s’estime avoir été écartée par Abbas El Fassi. Ce dernier aura besoin, faut-il le rappeler, de 163 voix au moins, pour faire passer la déclaration gouvernementale. Or, la majorité au gouvernement (PI, USFP, PPS et RNI) ne dispose pas de plus de 142 voix. Le reste est donc à chercher auprès du groupe de Fouad Ali El Himma, sinon du côté du MP.

Le oui de l’USFP
L’USFP votera en faveur de la déclaration du gouvernement. C’est du moins ce qu’a affirmé Mohamed El Yazghi, premier secrétaire de la formation politique à L’Economiste. Cependant, un membre du bureau politique de ce parti a déclaré que de nombreux députés de l’USFP pourraient voter contre. «Je ne vois pas comment on peut voter pour une déclaration qui ne comporte pas une seule de nos propositions électorales», a-t-il dit.

Jamal Eddine Herradi
Source: L'Economiste

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