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Le Maroc veut économiser 400 millions de m3 d'eau via l'irrigation

L'agriculture consomme 80 % des ressources en eau du Maroc. Actuellement, plus de 1,5 million de ha sont irrigués soit 15 % de la surface agricole. Mais la rareté des ressources hydriques pousse vers de nouvelles techniques d'irrigation.

Un million d'hectares de terres irriguées. Pendant longtemps, ce chiffre a été cité par les professionnels et les politiques comme objectif des politiques agricoles nationales. Ce chiffre a été atteint au cours de l'année 2000, date butoir à cet effet, et même largement dépassé depuis. Actuellement, la superficie irriguée est de l'ordre de 1,5 million d'hectares, dont 1,02 million aménagés par l'Etat et le reste par le secteur privé. A la base de tout ce système d'irrigation se trouvent les différentes infrastructures hydrauliques, notamment les barrages et les canaux. Selon les données du département de l'Agriculture et des pêches maritimes et du secrétariat d'Etat chargé de l'Eau, le Maroc dispose de 120 barrages d'une capacité de retenue de l'ordre de 16 milliards de m3 qui ont été édifiés entre 1967 et 2005. A ceci s'ajoutent près de 32 milliards de DH, investis par les pouvoirs publics pour l'aménagement de 682.600 ha dans les périmètres de grande hydraulique et 334.100 ha dans les périmètres de petite et moyenne hydraulique.

Et huit années après cette date, le Maroc n'a toujours pas abandonné sa politique de développement de l'irrigation agricole. Au contraire, l'Etat investit de plus en plus dans la construction de barrages, comme c'était le cas dans les années 70 et 80. Mais ceci n'empêche pas le Maroc d'être conscient de la rareté de ses ressources en eau, qu'elle soit superficielle ou de nappe. Cela a poussé le gouvernement à procéder à de nouvelles techniques d'irrigation, plus économes en eau. Ces techniques sont d'ailleurs l'avenir du Maroc, et pas seulement de l'agriculture nationale. Le taux de 80 % des ressources en eau qui sont englouties par l'agriculture est un indice de l'urgence de la situation. En effet, le pays traverse des périodes de sécheresse de plus en plus longues et rapprochées dans le temps, ce qui a poussé de nombreux chercheurs et professionnels de l'irrigation et de l'agriculture à approfondir la recherche sur les nouvelles techniques d'irrigation, notamment celle localisée. A ce propos, et depuis 2002, le gouvernement marocain a pris les choses en main en élaborant un nouveau système incitatif visant la promotion de ces techniques d'irrigation économes en eau. Pour ce programme, une enveloppe budgétaire de l'ordre de 780 millions DH a été mobilisée. Le département de tutelle a fixé pour objectif d'équiper à terme 550.000 ha, ce qui devrait permettre une économie d'eau de l'ordre de 400 millions de m3 par an. Deux années plus tard, les résultats sont visibles sur le terrain. Quelque 157.600 ha ont été équipés en ces techniques. Sur les 982,5 millions DH que l'Etat a accordé aux agriculteurs au titre des subventions et des primes à l'investissement via le Fonds de développement agricole durant la période 2002-2004, quelque 39%ont bénéficié aux aménagements hydro-agricoles. Actuellement, l'exécution de ce programme s'accélère, avec la reconversion de plus de 170.000 ha de l'irrigation gravitaire en irrigation localisée, beaucoup moins consommatrice en eau. La communauté des agriculteurs a donc compris que l'utilisation de ces méthodes modernes s'imposait, non seulement pour faire face à la concurrence sur l'eau qu'exercent de plus en plus les secteurs de l'eau potable et industrielle, mais aussi pour garantir la durabilité des aménagements hydro-agricoles. Il en va même de la productivité et de la concurrence des exploitations agricoles. La maîtrise de l'irrigation au niveau de l'exploitation conduit à une réduction des coûts de production et à l'amélioration des marges brutes à l'hectare. Plus concrètement, les méthodes modernes permettent de gagner 9 DH par m3 d'eau pour les agrumes, 3DH pour l'olivier, 4,5 DH pour la betterave et 6 DH par m3 pour la pomme de terre. Il est à rappeler que le Maroc a aménagé neuf grands périmètres irrigués. Ils sont gérés par les Offices régionaux de mise en valeur agricole (ORMVA), en coordination avec les agences des bassins hydrauliques et les usagers de l'eau. Ce sont ces agences qui décident du prix du mètre cube d'eau d'irrigation dans un périmètre donné. Ce prix diffère en fonction de la disponibilité des ressources hydriques et de la lourdeur des investissements prévus pour acheminer l'eau jusqu'aux exploitations agricoles.

L'irrigation en chiffres

L agriculture irriguée ne représente que 15% des superficies cultivées. Elle contribue par ailleurs pour environ 45% en moyenne à la valeur ajoutée et pour 75% aux exportations agricoles. Elle assure en moyenne la production de quelque 2,9 millions de tonnes de betterave à sucre, soit 99% de la production nationale, 1,2 million de tonnes de canne à sucre (100%), 1,3 million de tonnes d'agrumes (100%), comme elle contribue pour 82% à la production nationale de maraîchage et pour 75% du fourrage et du lait. Ce secteur crée environ 1,65 million d'emplois par an, dont 250.000 permanents, soit plus de 50% des emplois agricoles. Ses répercussions sur la situation socio-économique des agriculteurs sont évidentes. Ainsi, ces derniers ont vu leurs revenus multipliés par cinq à treize selon les périmètres avec l'avènement de l'irrigation. Celle-ci a également permis le désenclavement et l'accès aux autres services publics communaux, comme l'eau potable et l'électrification.

La mise en place d'une politique économique basée sur le développement de l'agriculture, notamment irriguée, a eu des retombées socio-économiques indéniables. En effet, l'irrigation a également permis le développement d'un tissu agro-industriel important, composé notamment de 13 sucreries d'une capacité globale de 4,7 millions de tonnes par an, 13 laiteries d'une capacité de l'ordre de 500 millions de litres, ainsi qu'une série de stations de conditionnement, d'entrepôts frigorifiques et de conserveries de fruits et légumes.

Fadoua Ghannam
Source: Le Soir Echos

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