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France 3 : Un Maroc de carte postale

Un pays qui se bat pour arracher ses palais des griffes des promoteurs immobiliers. Un pays qui s'échine à restaurer ses casbahs et ses riads menacés de ruines. Un pays qui s'accroche aux gestes ancestraux d'artisans en voie de disparition. De Fès l'endormie à Marrakech la convoitée en passant par le village berbère de Nkob, ce numéro des «Racines et des ailes» spécial Maroc cultive la nostalgie. Sur les traces d'autochtones et de Français engagés dans le sauvetage du patrimoine marocain.

Il y a d'abord Mimoun qui, depuis vingt ans, promène sa silhouette dans les ruelles de Fès pour recenser, un à un, les artisans de la médina. Un travail de fourmi pour conjurer le temps. Il y a ensuite Amélie, une Française tombée sous le charme de la plus ancienne cité médiévale du monde arabo-musulman, «l'égale de Tolède et de Cordou». En compagnie de Fetha, une amie marocaine de souche, la jeune fille caresse le rêve d'organiser des Journées du patrimoine à la française, pour révéler à une population plutôt indifférente des joyaux architecturaux insoupçonnés.

Il y a aussi Abdou, gardien de la mémoire du palais Glaoui de Marrakech, avec ses 1 000 pièces, ses 4 000 portes et fenêtres, ses inestimables miroirs de Murano. Un homme fier de montrer aux visiteurs la carcasse toute rouillée de la première automobile britannique entrée à Fès, qui finit ses jours dans le petit jardin attenant au palais. Il y a enfin Salima Naji, cette jeune architecte, moderne et passionnée, qui sillonne, sans voile, le Sud marocain à la recherche des trésors des tribus berbères dont la présence dans le Maghreb remonterait à plus de 5 000 ans.

Plusieurs «séquences émotion» ponctuent cette plongée au coeur du Maroc traditionnel. Le coeur bat plus vite lorsque s'ouvrent les portes de la bibliothèque de Fès, riche de 3 000 manuscrits du IXe siècle au XIXe. Et quand la caméra se pose sur un Coran en peau de gazelle datant du Xe siècle, dont il existe seulement trois exemplaires au monde selon le gardien des lieux. L'imagination fonctionne à plein pendant la visite de ce grenier à grains, qui tient lieu de Banque de France, au beau milieu du désert, «dans ce territoire de la faim, de la soif et de la dissidence». C'est en effet à l'intérieur de petites cases creusées dans les murs que soixante-seize familles mettent à l'abri leurs biens les plus précieux : leur récolte, dont une part est systématiquement prélevée pour les pauvres, leurs bijoux, leurs souvenirs. Le grenier à grains «sert aussi de place du village où sont prises les grandes décisions de la tribu». Moment poétique aussi que ces quelques minutes passées à assister à la confection de selles brodées de fils d'or dans l'atelier de l'un des derniers fabricants de Sa Majesté le roi du Maroc.

Au-delà de moments de pure magie, d'où vient cette impression de carte postale trop parfaite, de ciel trop bleu, d'une Histoire sans histoires ? On aurait aimé en savoir davantage sur ce vieil homme, recroquevillé dans un espace grand comme un mouchoir de poche, qui passe ses journées à brûler des copeaux de bois pour chauffer le hammam. On aurait aussi souhaité entendre les paroles de ces femmes berbères de la tribu des Aït Hatta, qui jouissent d'une permission de sortie exceptionnelle pour la fête annuelle du Moussem. Un événement qui permet surtout aux hommes de se choisir une épouse dans cet univers hors du temps où «si tu sors du droit chemin, tu paies». On aurait voulu connaître le sentiment de ces tanneurs qui baignent toute la journée dans des bassins multicolores dans lesquels «on utilise de la fiente de pigeon pour fixer les couleurs. Comme il y a des siècles». Une coutume plus pittoresque pour les observateurs que pour les tanneurs qui la pratiquent jour après jour.


«DES RACINES ET DES AILES» spécial Maroc, France 3, 20 h 55

Source : Le Figaro

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