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la poésie arabe
r
8 décembre 2004 08:38
JE LIS TON CORPS ET… ME CULTIVE

Le jour où s'est arrêté
Le dialogue entre tes seins
Dans l'eau prenant leur bain
Et les tribus s'affrontant pour l'eau
L'ère de la décadence a commencé,
Alors la guerre de la pluie fut déclarée
Par les nuages
Pour une très longue durée,
La grève des vols fut déclenchée
Par la gente ailée,
Les épis ont refusé
De porter leurs semences
Et la terre a pris la ressemblance
D'une lampe à gaz.

II

Le jour où ils m'ont de la tribu chassé
Parce qu'à l'entrée de la tente j'ai déposé
Un poème
L'heure de la déchéance a sonné.
L'ère de la décadence
N'est pas celle de l'ignorance
Des règles grammaticales et de conjugaison,
Mais celle de l'ignorance
Des principes qui régissent le genre féminin,
Celle de la rature des noms de toutes les femmes
De la mémoire de la patrie.

III

O ma bien aimée,
Qu'est-ce donc que cette patrie
Qui se comporte avec l'Amour
En agent de la circulation ?
Cette patrie qui considère que la Rose
Est un complot dirigé contre le régime,
Que le Poème est un tract clandestin
Rédigé contre le régime ?
Qu'est-ce donc que ce pays
Façonné sous forme de criquet pèlerin
Sur son ventre rampant
De l'Atlantique au Golfe
Et du Golfe à l'Atlantique,
Parlant le jour comme un saint
Et qui, la nuit tombant,
Est pris de tourbillon
Autour d'un nombril féminin ?

IV

Qu'est-ce donc cette patrie
Qui exerce son infamie
Contre tout nuage de pluie chargé,
Qui ouvre une fiche secrète
Pour chaque sein de femme,
Qui établit un PV de police
Contre chaque rose ?

V

O bien aimée
Que faisons-nous encore dans cette patrie
Qui craint de regarder
Son corps dans un miroir
Pour ne pas le désirer ?
Qui craint d'entendre au téléphone
Une vois féminine
De peur de rompre ses ablutions ?
Que faisons-nous dans cette patrie égarée
Entre les œuvres de Chafi'i et de Lénine,
Entre le matérialisme dialectique
Et les photos pornos,
Entre les exégèses coraniques
Et les revues Play Boy,
Entre le groupe mu'tazélite
Et le groupe des Beattles,
Entre Rabi'a-l-'Adaouya
Et Emmanuelle ?

VI

O toi être étonnant
Comme un jouet d'enfant
Je me considère comme homme civilisé
Parce que je suis ton Amant,
Et je considère mes vers comme historiques
Parce qu'ils sont tes contemporains.
Toute époque avant tes yeux
Ne peut être qu'hypothétique,
Toute époque après tes yeux
N'est que déchirement ;
Ne demande donc pas pourquoi
Je suis avec toi :
Je veux sortir de mon sous-développement
Pour vivre l'ère de l'Eau,
Je veux fuir la République de la Soif
Pour pénétrer dans celle du Magnolia,
Je veux quitter mon état de Bédouin
Pour m'asseoir à l'ombre des arbres,
Je veux me laver dans l'eau des Sources
Et apprendre les noms des Fleurs.
Je veux que tu m'enseignes
La lecture et l'écriture
Car l'écriture sur ton corps
Est le début de la connaissance :
S'y engager de la connaissance :
S'y engager est s'engager
Sur la voie de la civilisation.
Ton corps n'est pas ennemi de la Culture,
Mais la culture même.
Celui qui ne sait pas faire la lecture
De l'Alphabet de ton corps
Restera analphabète sa vie durant


NIZAR KABBANI

smiling smiley

h
8 décembre 2004 19:31
Un peu de poésie marocaine


GOUTTES DE BOUGIES NOIRES

I

C'est ainsi que j'ai éteint la bougie
pour éclairer le pénombre

Alors j'ai vu le soleil
à l'écart de la lumière

J'ai vu des portes
et pas de maisons

Des papillons
sortant des vers
grouillant sur les cadavres

J'eus peur que mon visage
ne fût un autre visage
collé au mien

Je fus saisi de frayeur
quand j'ai vu ma jambe
sur des scorpions

Et lorsque j'eus atteint l'eau
j'ai cherché une bouche dans la terre

Je n'ai trouvé qu'une terre
ressemblant à une carapace de tortue

J'ai crié
L'enfer
c'est tout ce qui reste
du Paradis

Le paradis s'anéantit
et le feu reste

Quand je me suis absenté
ma main seule
est restée présente

Quand je suis revenu
mes doigts étaient devenus
des langues de flammes

J'ai dit
Ah si tu savais
comme la nuit m'est plus secourable
que le jour

je m'épuise moi
mais le verre ne s'épuise pas

J'ai chanté
pied mon pied
O talent de la volupté

Et quand la femme se présenta
j'ai éteint la bougie

J'ai crié
Oublie ton langage
et laisse ta langue
mâcher seule
un autre langage

J'ai pensé au soleil
qui n'a rien vu de ma nudité

Dans la forêt
j'ai vu le vent pas la flûte

J'ai écrit dans l'air
Ne chante pas avec le vent

(Et dans la nuit
j'ai vu des oiseaux
picorer des seins
les seuls mamelons)

J'ai crié à la fourmi
Ne retourne pas à ta maison
Là-bas il y a un geôlier
qui t'attend
en jouant avec ses clés

Dans l'eau
j'ai vu un serpent sortant de ma bouche

Et dans le sommeil
j'ai vu un silence
noir
noir!
h
8 décembre 2004 19:46
II

Donne-moi un verre
pour que j'avale ce vide

Un bras
pour que je mesure cette séparation

Prépare-moi un lit
de verre
pour que mes cauchemars glissent dessus

Je ne veux pas lire de lettres
qui ne se dressent pas devant mes yeux
comme des clous

Je vais donner ma main à ce chien
qui vient pour en couper quelques doigts

Je laisserai beaucoup de blancs dans mes écrits
pour que cette prostituée puisse y démabuler
à sa guise

(Ceci n'est pas un stylo
mais une pioche pour démolir le poète
qui me tyrannise)

Les fourmis seront mes funérailles
et je laisserai ma tombe à quelqu'un
qui n'a pas trouvé où dormir
Je laisserai beaucoup de blancs dans mes écrits
afin déclairer la pénombre qui descend
avec la nuit des mots

Je laisserai du blanc
pour le jour de vois noces



III

J'ai vu le blanc fuir le blanc
Le blanc fuir le mur
Et je n'ai pas vu

J'ai vu le mur fuir le blanc
La terre fuir la mer
Et je n'ai pas vu

J'ai vu la mer fuir le poisson
Le poisson fuir sa peau
Et je n'ai pas vu

J'ai vu la peur parvenir aux oreilles avant le froid
Les oreilles parvenir à la chose avant l'oeil

La chose devance le nom
Le nom devance la langue

La langue sortir de la bouche
pour entrer dans une autre bouche
Et je n'ai pas vu

J'ai vu une chambre sans porte
un mur dévorer la jambe d'une femme

Une fenêtre parvenir à un oeil
avant l'autre oeil

Une femme morte sous un lit
et un lit au-dessus d'une femme en vie

Une femme, une femme nue sur une terre
tout en miroir
Et je n'ai pas vu

J'ai vu la lettre en forme d'homme
La ligne, route droite vers l'enfer
Les points, oubli entre les mots
Et la feuille, billet d'entrée
pour le feu

Tout ce que j'ai vu
Je ne l'ai pas vu jusqu'à maintenant
h
8 décembre 2004 20:02
IV


Je veux une chambre
qui puisse se reposer en moi

Des choses
sans nom

Une mer
Où la vague s'enflamme
pour qu'une autre vienne
l'éteindre

Des nuages
flambant dans le ciel

Ma main
caressant mon autre main

Une poitrine
où je n'entends pas
le bruit des souris

Alors sors de cette feuille
qui deviendra une tombe pour toi
sous peu

Sors
de ton corps

Sors
de tout

J'ai vu des arbres
se ramifier en flammes

Un feu
sortir d'une langue

Je suis sorti de mon corps
pour voir que mon corps
ne me ressemblait pas

Sors donc
et n'entre pas dans une autre maison
Ton corps
c'est ta maison

N'ouvre pas de fenêtre
dans l'air

Non

Les asticots viendront
et ôteront de ton visage
le masque

J'ai vu les chiens
aimer les roues

L'eau
aimer l'écriture

Moi j'aime l'écriture
et je n'aime pas la feuille

Cette feuille-ci



V


De l'eau
cette feuille

Alors croissez dans les marges
de la feuille

Quant à moi
je m'habillerai
pour couvrir un signe
que j'ai sur le corps

Ne laissez pas les habits
m'enfermer dans l'armoire

Je me suis vêtu
et j'ai oublié ma main

Je me suis vêtu
et ton oeil m'a dévêtu

J'aime
la nudité de l'eau

La vulve de l'arbre

La rose qui
va entre les cuisses
et s'endort

Toi
Ne laisse pas la boucle
épouser l'oreille

La bague
devenir la vulve
du doigt

Et toi
laisse la main jouer
avec le poisson

Eloigne ton mamelon
du grain de grenade

Je ne veux pas entendre d'histoire
commençant par ma tête

Donne-moi ton corps
pour que j'y souffre

Donne-moi un arbre
pour que mes flammes s'y ramifient

Je m'embrase de nuit
et m'éteins de jour

Ne viens pas
Je te rencontrerai
par hasard

Laisse ta main
lécher la vitre

La mer sucera
l'eau de tes yeux

Laisse tes yeux
couler sur la terre
Va
et laisse-moi

Laisse-moi
comme cette feuille
h
8 décembre 2004 20:22
VI

O temps
éloigne-toi de mon poignet

Le verre blanc et vide
Je veux qu'il s'approche
de ses seins

Si vous me voyez debout
ne me tendez pas
un siège vide

Je piquerai les mots avec une fourchette
et les mettrai dans la gueule d'un chat

O chat
n'aie pas peur du pantalon
qui joue tout seul sur la terrasse
cette nuit

Je poserai ma tête
près d'une allumette
et je m'en dormirai

(Je ne comprendrai pas l'obscurité
plus que ne la comprend
cette bougie)

Je ne comprendrai pas les poètes
plus que ne les comprend
ce séisme



VII


J'ai vu l'un de mes yeux manger l'autre avec voracité
Ma main arracher les lignes de sa paume
Un couteau sortir de mon oreille
(J'ai fui)
Les traits du cahier se refermer sur mes paroles

Mon doigt se tendre vers le trou de la serrure
et l'aveugler

Une souris sortir d'un sexe
Des couleuvres glisser de mes doigts
vers mon cou

Ma couche s'allonger jusqu'au
rebord de la fenêtre

Des bouteilles au goulot cassé
sortir du ventre des poètes

De très longs poils
sortir de la terre
au lieu des plantes

la tête d'un âne accrochée
dans la chambre d'un enfant

Des portes plus que des fenêtres
Des yeux plus que des têtes
Une langue plus que des bouches
Un sang plus que des eaux
Des routes plus que des maisons

(je n'ai pas vu un seul poète
mais j'ai vu un geôlier)

J'ai vu un âne courir derrière
un fou terrorisé

La tête d'un chat
se loger au milieu de la tête d'un enfant

Un oiseau
piquer le ventre d'une femme enceinte

Un voile d'obscurité
se coller aux pupilles

Et quand j'ai voulu écrire
mes doigts se sont noués autour de mes doigts

Alors je n'ai rien écrit
jusqu'à maintenant!



VIII


J'ai entendu la main demander
pourquoi ces ongles

J'ai entendu la bouchedemander
pourquoi ces incisives

J'ai entendu la tête demander
pourquoi ces cheveux?



IX


Ne me regarde pas de tes yeux
sinon tu tueras tout

Lis-moi avec ta cécité

Conduis-moi avec ta cécité
jusqu'à la volupté des choses


h
8 décembre 2004 20:42
X



A qui ont-ils laissé ce silence
où seuls les chiens aboient

Cette rue extêment déserte
sauf d'un demi-orange

Nous n'avons pas mangé cette nuit
Nous n'avons pas parlé
Nous n'avons rien fait cette nuit
Mais un grand couteau
nous est apparu en rêve

Cette bougie se consume
mais ne se consume pas la douleur
qui se repaît des traits du visage

Hé les enfants
Quel est le plus lours
la tête
ou le cartable?

Vous qui partez à trois heures du matin
Prenez-moi avec vous
comme vous prend le froid glacial

Le temps se repaît
de la main
des ongles
La bougie se repaît
du visage de la nuit

Le froid
un très petit poisson
dans les veines

Quoi de plus dur
que le silence des pierres?

Si le visage du ciel
rempli des vapeurs de nos souffrances
pouvait se rider
lui aussi!

Même si nous partons sans retour
Même si nous partons tous
Nous les victimes des pierres
Des enfants
qui ne sont pas encore nés
repasseront par ici

Bientôt
le soleil aspirera l'eau de la nuit noire

Le bleu de l'aube
croquera quelques pierres

Le froid aura englouti
la pomme de nos mains

Le gôut de nos chanson
toujours restera ainsi

Toi aussi bougie
sors bien ta langue
et parle
pour tuer le temps



ABDALLAH ZRIKA

Il est né en 1953 à Casablanca. Arrêté en 1978, accusé d'avoir porté atteinte dans ses poèmes aux valeurs sacrées du pays, il est condamné à deux ans de prison. Depuis sa libération, en 1980, il a développé une oeuvre poétique et littéraire considérable qui le place parmi les auteurs de la langue arabe les plus écoutés au Maroc.
s
8 décembre 2004 21:11
Désolé! Adonis n'est pas un grand poète; il est tout juste un poète. Si vous cherchez de beaux poèmes, vous les trouvrez à coup sûr chez les mystiques, chez Majjati (poète, crtitique littéraire et homme de lettres marocain, auteur d'une belle thèse sur la crise de la modernité la poésie arabe contemporaine, où l'oeuvre d'Adonis est appréciée à sa juste valeur), chez le poète palestinien Mahmoud Darwish (Les Editions de Minuit ont publié un certain nombre de ses poèmes, traduits par un poète marocain de langue française, Abdellatif Laabi), chez Matar, chez Bayyati (Le Marché du village), chez Saadi Youssef, Amal Dankel (qui composé de beaux poèmes dans la langue de tous les jours), etc.
r
8 décembre 2004 23:25
h
9 décembre 2004 12:03
FLEUR DE L'ALCHIMIE

Il faut que je voyage
au paradis des cendres
Parmi ses arbres secrets
Dans les cendres
sont bagues, diamants
Et la Toison d'Or

Il faut que je voyage dans la faim
Dans les roses,
m'en allant vers la moisson
Il faut que je voyage,
que je repose
Sous l'arc des lèvres
orphelines

Dans les lèvres orphelines
Dans leur ombre blessée
Se trouve
la fleur ancienne de l'alchimie
h
9 décembre 2004 12:56
j'ai oublié l'auteur!!! c'est le meilleur poète de l'univers et de tous les temps j'ai nommé...ADONIS!!!
h
11 décembre 2004 12:13
SUR LE SABLE, L'EMPREINTE DE NOS CORPS



Arrêtons-nous et pleurons au souvenir de l'aimée.
Maison près du banc de sable entre Dakhoul et Harmal,

Toudiha et Miqrat, les vents du Nord et du Midi,
leur étoffe ont tissé mais non point effacé sa trace.

Mes compagnons près de moi ont arrêté leurs montures,
disant << Maîtrise-toi et fuis cette affliction mortelle. >>

Ma guérison, amis, c'est de laisser mes larmes
mais doit-on s'affliger d'une trace effacée?

N'as-tu pas courtisé Oumm-al-Houwayrith avant elle,
et puis encore la belle Oumm-al-Rabab à Ma'sal?

Quand elles se levaient, des efflves de musc partout
se répandaient, parfum d'oeillet porté par le zéphyr.

En les quittant, d'abondantes larmes avaient coulé
jusqu'à ma gorge et mon ceinturon en était mouillé.

Oui, plus d'un jour parfait d'elles, tu as pu obtenir,
et surtout, parmi ces jours, celui de Darah-Djouldjoul.

Et cet autre où j'ai j'ai tué mon cheval pour les pucelles,
quelle surprise de les voir toutes décamper sous leur charge!

L'une à l'autre, les morceaux elles s'étaient arraché:
la viande, puis la graisse aux bords frangés comme la soie.

Je suis entré un jour dans la palanquin d'Ounayza...
<< Malheur! Tu vas me forcer d'aller à pied, me dit-elle >>

et entre-temps le palanquin ployait avec nous deux...
et puis: << Descends, Imrou'l-Qays, tu fatigues ma bête. >>

Et moi de lui répondre: << Va, laisse filer sa longe,
ne m'éloigne pas, de grâce, de ton fruit qui distrait...

J'ai visité des femmes comme toi, et même enceintes,
qui ont laissé leur nourrisson entouré d'amulettes...

S'il pleurait de moitié se tournaient vers lui, et mon soc
les pourfendait tranquillement, sans être détourné. >>

L'une un jour se refusa sur la colline de sable,
s'obligea de rompre, par un serment indissoluble.

Doucement! ô Fatima, après ta coquetterie,
modère-toi, même si la rupture est décidée.

Cela t-a-t-il séduite de voir mon amour me tuer,
de constater que mon coeur t'obéit sans murmurer?

Si quelque créature t'a poussée à me haïr
sépare nos habits: tu verras qu'unique en est la trame.

Tes beaux yeux m'ont pleuré qu'afin de mieux lancer les traits
qui ont blessé à mort un coeur déchiré de douleur.

Au coeur même d'une alcôve imperméable au désir,
avec ma belle à loisir j'ai savouré mon bonheur.

J'avais passé à travers une troupe de gardiens
qui guettaient, me préparant une mort infamante;

lorsque dans le ciel la Pléiade s'est déployée,
comme un assortiment de perles sur une ceinture,

je suis entré, alors qu'elle avait pour dormir ôté
près du rideau ses habits, sauf la tunique légère.

<< Non! Par Dieu! Ta ruse n'a pas de cours ici, dit-elle,
je vois que tes séductions sont loin de disparaître. >>

Je l'emmène aussitôt, lui ouvrant le chemin, mais elle,
traîant un manteau d'homme à terre, effacait nos deux traces.

Lorsque nous eûmes traversé la place du village
et atteint le fond d'un vallon encerclé par les dunes,

de mes mains sur ses tempes je l'incline. Elle se ploie
sur moi, taille mince et jambe prospère, ornée d'anneaux.

Svelte et blanche, elle n'offrait aucune ample solitude;
sa poitrine était lisse et polie ainsi qu'un miroir.

Reflets de refus ou désirs sur visage lisse,
oeil complaisant d'un fauve de Wadjrah sur son petit,

un cou aussi beau que celui de la gazelle blanche,
délicat, lorsqu'il se dresse, et sans aucun ornement;

la chevelure abondante et très noire, ornant le dos,
riche ainsi qu'un rameau de palmier chargé de fruits;

et ses boucles rebelles se relèvent indomptées,
noyant les rubans dans un flot d'ondes enchevêtrées;

des flancs délicats, souples comme une corde tressée;
la jambe, un cep soutenu dans une terre irriguée;

et des miettes de musc dessus sa couche éparpillées,
elle dort, le soleil haut, en tenue négligée.

Elle prend, elle reçoit avec de tendres mains souples,
vrilles de vignes de Zabyi ou cure-dents d'Ishil;

à l'entrée de la nuit elle dissipe les ténèbres,
tel le feu, la nuit, d'un moine voué au célibat.

L'homme doux s'éprend avec ardeur de femmes comme elle;
ayant ainsi grandi entre cuirasse et bouclier.

Pucelle dont l'or jaune fait ressortir la blancheur,
qu'a fait fructifier une eau abondante et salutaire...

les insensés parmi les hommes se sont consolés
de leur amour, mais le mien, mon coeur ne peut l'oublier



IMROU'L-QAYS (mort vers 540, ère chrétienne)

Chassé par son père Houdjr, roi de Kinda, qui désapprouvait sa passion pour une fille des Banou-Odhra, la tribu où l'amour courtois était à l'honneur, le prince-poète erra de campement en campement à travers l'Asie minieure. Il connut de nombreux succès d'amour, même à Constantilope où Justinien le reçut avec pompe et libéralité. lorsque son père mourut en combattant la révolte des Banou-Asad, dans l'Arabie Centrale, Imrou'l-Qays se mit en messur de le venger. Il n'en continua pas moins de composer des poèmes-avant de mourir empoisonné. On lui attribue les règles fixes auxquelles fut soumise après lui la poésie arabe. Il donna le modèle du poème appelé qasîda, dans lequel l'éloge de la tribu et le récit des exploits guerriers s'allient à un sentiment aigu de la rapidité de l'existence et de la vanité des liens dont s'embarrasse le coeur de l'homme. La plus célèbre de ses qasîdas est classée parmi les " pendentifs " (les Mou'allaqât). Regard perspicace sur la réalité quotidienne, souffle épique, densité de l'expression, tout concourt à faire du << prince errant >>
un initiateur et un modèle.
r
11 décembre 2004 12:14
magnifik smiling smiley
r
13 décembre 2004 09:08
PSALMODIE SUR LES MAUSOLEES DES SANTONS



I

Je vous rejette tous
Et je mets fin au dialogue
Je n'ai plus rien à dire
J'ai fait un autodafé
De mes dictionnaires et de mes effets,
J'ai fui la poésie antique
Et la rime en "r" du long poème de Farazdak,
J'ai émigré de ma voix
J'ai émigré des cités du sel amer
Et des poèmes de poterie peinte.

J'ai apporté mes arbres à votre désert
De désespoir les arbres se sont suicidés ;
J'ai apporté ma pluie à votre sécheresse
La pluie s'est retenue de tomber ;
J'ai planté mes poèmes dans vos matrices
Ils se sont étouffés.
O matrice, porteuse de poussière et d'épines !

II

J'ai essayé de vous arracher
De la colle de l'histoire,
Du calendrier des fatalités,
De la poésie pleurarde des clichés,
Du culte des pierres ;
J'ai tenté de libérer Troie assiégée,
Alors le siège m'a assiégé.
Je vous rejette, oui, je vous rejette
Vous qui avez créé votre Dieu
A partir de la bave,
Vous qui avez élevé une coupole
A chaque santon,
Un lieu de pèlerinage
A chaque faux prophète.
J'ai tenté de vous sauver
De la clepsydre qui vous engloutit
A chaque instant du jour et de la nuit,
Des amulettes que vous portez sur vous,
Des psalmodies récitées sur vos tombes,
Des derwiches tourneurs,
De la diseuse de bonne aventure,
Et de la danse du Zaar.
J'ai tenté de planter un clou dans votre chair,
Mais, j'ai désespéré
De votre chair et de mes serres,
J'ai désespéré de l'épaisseur du mur,
J'ai désespéré de mon désespoir.

Hier, je me suis pendu
Aux tresses de ma maîtresse
Mais je n'ai pu lui faire l'amour
Comme je l'ai habituée,
Les traits de son corps étaient étranges,
Le lit était froid
Le froid était froid,
Le sein de celle que j'aime était une vieille orange pressée,
Et un drapeau percé.

Je regarde, hagard, sur la carte de l'arabisme :
A chaque empan de terre un Califa est né
Un pouvoir absolu s'est établi,
Une tente a été dressée…
Le drapeau et les sceaux me font rire,
Les empires me font rire,
Les Sultanats de pacotille,
Les lois originales,
Les cheikhs du pétrole,
Les mariages de courte jouissance
Et les instincts déréglés.

Je marche, visage étranger dans Grenade
J'embrasse les enfants, les arbres et les minarets renversés,
Là, les Almoravides ont campé,
Ici, les Almohades se sont établis,
Là, ont eu lieu les orgies,
Ici, s'est effectuée la transe,
Là, un manteau ensanglanté,
Ici, un échafaud dressé.

Tribus arabes !
Dispersez-vous comme des feuilles mortes !
Entretuez-vous ! Disputez-vous ! Suicidez-vous !
O coup de poignard
Pour une seconde fois
Du genre d'une certaine Andalousie vaincue !


NIZAR KABBANI

smiling smiley
r
13 décembre 2004 09:43

melhun

Al-°Arsa, (The Garden of Delights) by Thâmi Lamdaghri (died 1856) sung by Abdelkrim Guennoun from Fes.
First verse:
"Open your eyes
Taste the delights and generous nature
Of this heavenly garden.
The branches of wonderful trees intertwine
Like two lovers meeting again
And totter about, heady with happiness.
The smile of flowers, mingled with the tears of the dew
Recall the melancholic exchange
Of a sad lover and his joyous beloved.
Birds sing in the branches
Like as many lutes and rebabs."

r
13 décembre 2004 09:52
smiling smiley nous sommes pas tous très fort en english

tu peux essayé de trouver la traduction afin de pouvoir faire profiter tous nos ami(e)s winking smiley

mrsi romh smiling smiley
r
13 décembre 2004 10:08
"Open your eyes
Taste the delights and generous nature
Of this heavenly garden.
The branches of wonderful trees intertwine
Like two lovers meeting again
And totter about, heady with happiness.
The smile of flowers, mingled with the tears of the dew
Recall the melancholic exchange
Of a sad lover and his joyous beloved.
Birds sing in the branches
Like as many lutes and rebabs."

*****************************************************
Ouvrez vos yeux
Ayez les plaisirs et la nature généreuse
De ce jardin céleste.
Les branches de merveilleux arbres s'entrelacent
Comme deux amateurs(amants) se rencontrant(se réunissant) de nouveau
Et chancelez de, impétueux avec le bonheur.
Le sourire de fleurs, mélangées avec les larmes de la rosée
Rappelez-vous l'échange mélancolique
D'un amateur(amant) triste et son bien-aimé joyeux.
Les oiseaux chantent dans les branches
Comme lute tant et rebabs. "

c'est dur a traduire,car le mots arabe a bcp de ma3ani(sens )

r
13 décembre 2004 10:11
ma sha allah
et nous te remercions pour ton courage smiling smiley

mrsi romh

allahé jazik bikhaire smiling smiley
h
13 décembre 2004 19:16
PARLE, Ö DEMEURE D'ABLA
DANS LE VALLON
DE DJIWA...

Les poètes ont-ils laissé quelque habit rapiécé?
As-tu reconnu la maison couverte de guenilles?

En vain tu as interrogé ses traits tant maquillés,
et lorsqu'ils t'ont répondu, ce fut à la façon d'un étranger sourd.

Pour longtemps j'y ai tenu ma chamelle emprisonnée
et me suis plaint à eux de ma boisson de coloquinte.

Parle, ô demeure d'Abla, dans le vallon de Djiwa!
Bon matin, ô demeure d'Abla, et la prospérité!

Demeure où était une jeune fille fraîche et tendre,
à l'oeil docile aux embrassements, au sourire excquis.

C'est là que j'ai arrêté ma chamelle aussi altière
qu'un rempart, par besoin de m'attarder sur mon passé.

Abla descendait alors à l'étape de Djiwa;
mes parents étaient à Hazm, Sammane et Moutathallam.

La rosée, ô gîte, en ce temps, t'avait donné la vie;
le départ d'Oumm-al-Haytham t'a laissé en tel désert!

Puis le lieu où les deux amants venaient en pèlerins
m'est devenu lointain, fillette, et ta recherche ardue.

Par hasard, à elle enchaîné, je combats sa tribu.
(Par le Seigneur de la Maison, mon intention est pure!)

Car en mon coeur, tu as pris une place, n'en doute point:
celle que réserve l'amant à la femme qu'il honore.

Mais comment visiter une amante dont les parents
s'établissaient aux Onayrah et les miens à Chaylam?

Si toi-même avais décidé de notre séparation,
on aurait bridé vos montures par une sombre nuit.

Rien ne m'a effrayé comme de voir les bêtes des siens
se repaître de fourrage au beau milieu des maisons.

Parmi elles, quarante-deux femelles nourricières,
noires ainsi que du corbeau noir les plumes cachées.

Quand elle te retenait captif, brandissant un sabre
dégainé, son front de lumière au baiser savoureux,

tu la regardais avec les yeux d'un petit enfant
au pas nouveau, qui voit un faon d'une beauté unique.

Un parfum rare dans le vase précieux du marchand,
ses effluves montent vers toi comme une haleine fraîche...

C'est un jardin que vient de prendre en charge la nuée,
un jardin à la terre fertile, inconnu, secret.

Une jeune fille que des bras d'hommes n'ont point serrée;
pour sa beauté, les rois barbares l'auraient affranchie!

Prairie arrosée à foison par toute source vive
qui lui laisse en parure des piécettes d'argent neuf.

Et la rosée et les ruisseaux lui offrent chaque soir
un breuvage d'eau qui jamais ne s'interrompt.

Tu y vois la mouche seule bourdonner à plaisir,
comme un buveur insouciant qui fredonne sa chanson;

elle chante en frottant ses pattes l'une contre l'autre,
comme un infirme aux poignets mutilés roulant sa viande.

Soir et matin, je la voyais adossée au coussin:
de duvet, et je dormais sur mon noir cheval bridé,

assis sur la largeur de ma selle, mon seul coussin:
oui, mon beau cheval dont les flancs robustes sont sanglés!

Maudite pour n'avoir point de lait, ma fière chamelle
me conduira-t-elle à la maison de celle que j'aime?...



'ANTARA (fin du VI siécle-début du VII siècle de l'ère chrétienne)

Fils d'une esclave noire, classé pour cette raison parmi les << corbeaux arabes >>, il parvint, par sa bravoure, à prendre rang d'homme libre dans sa tribu. Le plus beau de ses poèmes fait partie des Mou'allaqât. Il pratique l'enjambement et sait peindre avec rigueur une scène d'amour. Il est devenu le héros d'un roman populaire: Les aventures d'Antar.
s
13 décembre 2004 19:42
Pourrais-je avoir le texte arabe? Merci.
h
13 décembre 2004 20:27
c'est pas moi qui l'ai traduit!! il est extrait de " la poésie arabe " traduction par René Khawam chez Phébus.
Ceci dit, tu trouveras ce poème qui est une mu'allaqât en allant à ce lien

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