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USA : " L'homme qui pourrait être le premier président noir "
S
18 janvier 2007 15:49
Le sénateur démocrate de l'Illinois, Barack Obama, lors d'une conférence de presse à Manchester (New Hampshire).

Barack Obama, l'homme sans bagages

Au printemps 2000, Lynn Sweet, la correspondante du Chicago Sun Times à Washington, a vu arriver dans son bureau un jeune homme élancé, bien mis, sûr de lui : Barack Obama, candidat à la nomination démocrate pour le siège de représentant dans la 1re circonscription de l'Illinois. Il avait un livre à la main, qu'il était venu lui apporter, son autobiographie. "Je me suis dit : "Mais qui est ce type pour avoir déjà écrit ses Mémoires !"", raconte Lynn Sweet. Elle a posé le livre sur une étagère et n'y a plus pensé. Six ans plus tard, Barack Obama est devenu une star. Les médias ont fait de lui "l'homme qui pourrait être le premier président noir des Etats-Unis".

Barack Obama avait alors 38 ans. Il avait écrit un livre à l'instigation d'un éditeur, impressionné d'apprendre qu'un Afro-Américain avait été élu pour la première fois à la présidence de la prestigieuse Harvard Law Review. Sorti en 1995, Dreams from My Fathers (Les Rêves de mes pères), avait été bien accueilli par la critique, mais les ventes avaient été pitoyables. Obama était content, quoi qu'il en soit, d'avoir mis sa vie à plat, pour ne pas dire en ordre. Hawaï, Djakarta, Los Angeles, il avait décrit les étapes de son parcours de globe-trotteur multiracial ; l'école publique en Indonésie, l'école des riches à Honolulu, un peu de cocaïne à New York, beaucoup d'introspection, le doctorat magna cum laude à Harvard... Obama estimait s'être sorti de l'épreuve avec "une dignité plus ou moins intacte".

Cette année-là, Barack Obama a perdu la course démocrate de l'Illinois. Son adversaire était un ancien membre des Black Panthers et la circonscription un condensé des problèmes sociaux de la ville. Obama était juriste dans un cabinet de défense des droits civils et professeur de droit constitutionnel à l'université. "Il n'était pas assez noir", assure-t-on à Chicago. "Il n'avait pas mis en scène son histoire", ajoute Lynn Sweet. Deux ans plus tard, Barack Obama a de nouveau tenté sa chance, mais cette fois pour un siège au Sénat. Six autres démocrates étaient en lice. "Personne n'aurait parié sur lui, dit Lynn Sweet. On ne lui trouvait rien de spécial." L'Irak a changé la donne. Obama s'est trouvé être le seul candidat à avoir pris nettement position contre la guerre. Son discours de l'automne 2002 - "Je ne suis pas contre toutes les guerres ; je suis seulement contre les guerres idiotes" - a fait le tour des sites Internet de l'Illinois.

Barack Obama avait aussi attaché son nom à quelques réformes significatives, comme l'obligation pour la police de filmer les interrogatoires dans les crimes passibles de la peine capitale. Il a balayé ses adversaires. Il a gagné aussi bien dans les banlieues blanches que dans les quartiers noirs. "Il est sorti tellement fort des primaires que la campagne de John Kerry lui a donné un créneau pour parler à la convention démocrate de 2004, explique Lynn Sweet. Le reste fait partie de l'Histoire."

Le soir du 27 juillet 2004, devant les délégués démocrates, Barack Obama a raconté l'extraordinaire parcours qui l'avait amené là. Son père, un Luo du Kenya, "noir comme le charbon" ; sa mère, Américaine du Kansas, "blanche comme le lait". Il s'est présenté comme l'incarnation du rêve américain, un rêve dans lequel "un gosse efflanqué avec un drôle de nom peut entretenir l'espoir que l'Amérique a une place pour lui". Dans un Parti démocrate en mal d'orateurs, il a bouleversé les militants. Sur eBay, le site de vente aux enchères, Dreams from My Father a atteint dix fois son prix normal. Le livre, réédité d'urgence, est devenu un best-seller. La presse a appris à prononcer son nom. Barack, un prénom qu'il décrit comme d'origine arabe, ou swahilie, voire hébraïque, selon les époques et les audiences, mais qu'il traduit invariablement par "béni". Obama, un nom passe-partout à Kisumu, au Kenya, mais qui lui a valu dans l'Amérique de l'après-11-Septembre "les quolibets de certains républicains zélés", a-t-il écrit. Après avoir fait rimer Obama avec Oussama, les mêmes zélés ont déniché cette année le deuxième prénom du sénateur : Hussein.

En novembre 2004, Obama a été élu sénateur de l'Illinois avec 70 % des voix - pour ratisser au centre, il avait pris soin de faire disparaître le discours antiguerre de 2002 de son site Internet. A 43 ans, il est devenu l'unique Noir du Sénat, le troisième depuis 1867. Dès le premier jour, les appariteurs réclamaient des autographes. Il n'avait pas encore siégé qu'on lui demandait "quelle était sa place dans l'Histoire". Ou ce qu'il pensait des badges "Obama 2008", qui apparaissaient déjà. "Je ne pense pas que j'aie une place dans l'Histoire. Je n'ai encore rien fait", a nuancé le héros.

Au Sénat, Obama a essayé de ne pas se faire remarquer, sinon par son assiduité - le président de la commission des affaires étrangères lui a rendu un jour hommage : il avait été le seul à assister à l'intégralité d'un débat sur l'Irak. Il a décliné les offres des compagnies aériennes d'aller à Chicago en première classe. Il a eu l'intelligence de choisir quelques thèmes : les prêts aux étudiants défavorisés, le Darfour, un sujet qui lui a valu la considération de la communauté juive, des étudiants et de l'acteur George Clooney. Mais sa discrétion n'a pas empêché le buzz. Son éditeur lui a commandé trois livres pour 1,9 million de dollars. Le comédien Matt Damon, l'animatrice Oprah Winfrey lui ont apporté leur soutien. "Il a quelque chose qui ne s'apprend pas. C'est un leader. Il arrive quelque part et vous avez envie de le suivre où qu'il aille", disait en décembre George Clooney. Lynn Sweet est probablement l'une des personnes qui le suivent depuis le plus longtemps. Elle surveille chacun de ses rendez-vous dans le bureau du 7e étage de l'annexe du Sénat, où il conserve des photos de Gandhi, Martin Luther King et Nelson Mandela. Elle épluche les comptes de campagne, surveille les sponsors. En août, elle l'a accompagné au Kenya, où il a fait une visite triomphale et appelé la population à se débarrasser de la politique tribale. Elle continue à se poser la même question. Pourquoi lui ? Pourquoi un tel engouement ?

Les théories abondent. Obama est un visage neuf. Un homme sans bagages, dans un pays qui aime les novices - voyez l'exemple de John Kennedy, qui avait tout de même huit ans d'expérience au Sénat. Lynn Sweet pense plutôt à Robert, son frère. "On retrouve la même détermination chez Obama, le même sens du but à atteindre." Obama est l'anti-Hillary Clinton, tout chez lui coule avec facilité - il est "aussi à l'aise dans sa peau qu'elle ne l'est pas dans la sienne", a commenté Maureen Dowd, du New York Times. Avec lui, une page se tournerait enfin, celle des baby-boomers, celle des années 1960, de la polarisation de la société, des divisions qui ont commencé avec le Vietnam et n'en finissent plus avec l'Irak.

Ce serait l'homme des réconciliations ; il est autant chez lui au Kansas, la terre de ses grands-parents maternels, que dans les quartiers noirs du South Side de Chicago, où il s'est marié : sa femme Michelle, diplômée d'Harvard elle aussi, est vice-présidente de l'hôpital universitaire de Chicago. Il transcende l'aspect racial : plus qu'afro-américain, il est africain et américain. Son père était un étudiant étranger, venu faire ses études à Hawaï avec une bourse. Il ne porte pas la mémoire de l'esclavage ; il a grandi avec ses grands-parents et sa mère, et n'a découvert le poids d'être noir qu'à l'âge de 10 ans. "Il est en permanence engagé dans une discussion interne entre les différentes pièces de son moi hybride, a écrit l'éditorialiste conservateur David Brooks, en l'encourageant à se présenter en 2008. Et il fait partager à l'extérieur cette conversation."
A l'inverse, les critiques crient à l'enthousiasme surfait. Obama n'était encore il y a deux ans qu'un sénateur local de la législature de l'Illinois. Comment pourrait-on confier à "Obambi" - selon le trait cruel de Maureen Dowd du New York Times - la gestion de l'armée, des affaires étrangères, de l'économie ? Ce à quoi l'intéressé répond en citant Donald Rumsfeld et Dick Cheney, deux hommes qui "ont un maximum d'expérience"...

Le sénateur n'est pas dupe de l'"obamania". Il plaisante souvent de son "quart d'heure de célébrité", qui va finir par faire pâlir d'envie Paris Hilton. Dans le New Hampshire, à la mi-décembre, il a fait salle comble, presque exclusivement devant des Blancs. Cent cinquante journalistes le précédaient à chaque pas. Il a décrété qu'il n'y était pas pour grand-chose : "Tout ceci n'est pas à cause de moi, c'est à propos de vous."

En fait, l'engouement pour Obama en dit long sur l'état de l'Amérique. Neil Young a intitulé son album contre la guerre Looking for a Leader (A la recherche d'un chef). "Pourquoi pas une femme, un Noir, pourquoi pas Obama ?", chante-t-il. Trois ans après le début de la guerre, l'Amérique est en mal de grands hommes. Elle s'est prise de passion pour le plus improbable des candidats, un homme qui a le sens de la formule - "Un bon compromis, c'est comme une belle phrase", a-t-il expliqué au New Yorker -, mais qui entoure ses phrases de préambules compliqués.

Après six années de présidence Bush et de rapports tendus avec le reste du monde, l'Amérique est éprise, ou en tout cas curieuse, d'un homme qui n'a jamais vécu aux Etats-Unis avant l'âge de 19 ans, qui a des demi-frères et soeurs à Londres, à Nairobi, qui a suivi l'école coranique puis catholique à Djakarta, où sa mère s'était remariée avec un autre étudiant étranger. Un homme sans bagages, mais pourvu d'une biographie aux antipodes du Texas.


Source : [www.lemonde.fr]
T
18 janvier 2007 15:49
Bonne chance à lui !
L
18 janvier 2007 15:58
Citation
Barack Obama a écrit:
"Tout ceci n'est pas à cause de moi, c'est à propos de vous."

joli, poétique élégant grinning smiley

pour moi ce n'est pas important qu'il soit noir ou pas, pour l'Amérique peut être que cela à un sens
e
19 janvier 2007 00:58
democrate ou republicain.
noir ou jaune.
tous les memes, des pantins.
comme disait le president eiseinhower, c'est le complexe militaro-industriel qui dirige le pays.
 
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