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L'expulsion de l'imam de Vénissieux suspendue par la justice
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24 avril 2004 05:49
Lu dans le Figaro 24 avril 2004
Marie-Estelle Pech
L'imam Abdelkader Bouziane peut revenir en France en toute légalité. Hier matin, le tribunal administratif de Lyon a suspendu l'exécution de l'arrêté ministériel d'expulsion de cet imam de Vénissieux dans l'attente du jugement du dossier sur le fond d'ici à quelques semaines.

Abdelkader Bouziane soupçonné d'entretenir des relations avec des réseaux terroristes s'est fait remarquer pour avoir affirmé que le Coran autorisait la polygamie et permettait à un musulman de battre sa femme. En avril, il avait ainsi déclaré au magazine Lyon Mag que «l'homme ne doit pas frapper au visage mais viser le bas, les jambes ou le ventre».

L'arrêté d'expulsion d'Abdelkader Bouziane datant de février, donc bien avant ses déclarations dans la presse, est suspendu pour le moment. L'homme a été jugé sur un motif d'«urgence», mais c'est un collège de magistrats qui statuera sur la légalité ou non de l'acte administratif, en principe d'ici quatre à six semaines.

Le tribunal a donné raison à l'imam au motif qu'en l'état actuel de l'instruction, «il existe un doute sérieux sur la légalité de cette décision (...) les faits qui motivent celle-ci ne sont pas établis». Selon les textes de loi, «sauf en cas de comportements de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de l'Etat, ou liés à des activités à caractère terroriste (...), ne peut faire l'objet d'une mesure d'expulsion (...) l'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de vingt ans».

L'arrêté de février 2004 a été notamment pris au motif qu'Abdelkader Bouziane «apparaît comme l'un des principaux vecteurs de l'idéologie salafiste de la région lyonnaise». Une mouvance à laquelle Abdelkader Bouziane ne nie pas appartenir. L'argument paraît insuffisant à la cour d'autant plus que l'imam conteste les autres infractions qui lui sont reprochées, à savoir l'appel à la haine et les contacts qu'il entretiendrait «avec des éléments de la mouvance intégriste islamiste lyonnaise en relation avec des organisations prônant des actes terroristes», selon le ministère de l'Intérieur.

Ces infractions, observe le tribunal, «n'ont fait l'objet d'aucune procédure pénale». Et, malgré les pièces versées par le ministère et le préfet du Rhône pour préciser ces accusations, «un doute sérieux» existe quant à la légalité de cet arrêté.

Même si la présence de M. Bouziane, compte tenu notamment de ses déclarations relatives au statut de la femme, porte atteinte à l'ordre public, le tribunal considère «urgent» de suspendre l'arrêté, «eu égard notamment à la situation personnelle de l'intéressé, qui a plusieurs enfants mineurs de nationalité française et vivant en France».

Hier, Dominique de Villepin n'a pas manqué de réagir lors de son déplacement en Corse. «L'administration va fournir au tribunal de Lyon des éléments supplémentaires d'information qui justifient cette expulsion. La France ne peut accepter sur son territoire des propos attentatoires à la dignité humaine, des appels à la violence ou l'apologie du terrorisme», a-t-il dit.

«Cette démarche d'expulsion est préventive contre toute démarche ou tout comportement pouvant porter atteinte à la sécurité publique, explique une source policière. Si nous sommes trop précis, cela peut mettre en péril nos sources et d'autres enquêtes. Pour le juge, il est donc difficile de prendre une décision car il peut considérer que les éléments donnés ne sont pas avérés. Depuis vingt ans, le Conseil d'Etat considère cependant dans sa jurisprudence que le risque porté à l'ordre public peut venir ne serait-ce que d'une attitude d'apologie. Des notes de police peuvent suffire.»

Fin 2003, dans un prêche, l'imam avait lancé une fatwa contre les intérêts américains en France. Cet élément devrait faire partie des informations complémentaires transmises au tribunal administratif de Lyon.

Jeudi à l'audience, Me Mahmoud Hébia, l'avocat de l'imam, avait contesté que les propos d'Abdelkader Bouziane pouvaient justifier une expulsion. Il avait également fait valoir que l'arrêté d'expulsion signé le 26 février et exécuté le 21 avril «portait atteinte à plusieurs libertés fondamentales», son client n'étant expulsable que s'il était complice d'actes de terrorisme. «Il vit en France depuis vingt-cinq ans, il a seize enfants dont quatorze sont français, toute sa famille vit en France et il n'a jamais fait l'objet d'une condamnation. C'est une famille de 17 personnes qui se retrouverait décapitée», avait avancé Me Hébia.

 
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