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Festival de Marrakech : Paillettes, politique et petits potins
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16 décembre 2006 12:17
Hassan Hamdani, Tel Quel n°251



Le Festival de Marrakech est un film intimiste qui veut jouer dans la cour des blockbusters. La sixième édition n'a pas dérogé au scénario habituel. Peu de grandes stars, beaucoup de rumeurs, des invités absents et des non-invités omniprésents. Coulisses.


Cette année, un parfum d'engagement politique a flotté dans l'atmosphère du Festival de Marrakech. Côté strass, Susan Sarandon, l'invitée d'honneur à qui cette édition rendait hommage. L'actrice ne s'est pas gênée pour fustiger Bush lors de sa conférence de presse.
Côté populaire (populiste, soufflaient certains), Bziz et des membres de l'AMDH. L'humoriste a organisé un sit-in le soir de la cérémonie d'ouverture, pour se plaindre de la censure dont il se dit l'objet.

Susan Sarandon, par on ne sait quel mystère génétique, ne fait qu'embellir en vieillissant. En comparaison Bziz, un peu moins. Mais même si l'humoriste est moins agréable à regarder, il aura eu au moins un mérite : celui de donner un sujet de conversation aux festivaliers, lors des traditionnelles séances de “posage” dans les quelques cafés entourant le Palais des Congrès.

On ne parlait plus que de ça entre artistes et journalistes. Mais quelle mouche avait donc piqué Bziz ? Il n'y avait aucune agence Lydec ou Redal dans les parages, alors pourquoi tant de bruit et de fureur ? Très vite, une pétition lancée par d'autres comédiens a circulé pour… protester contre sa protestation. On se serait presque cru dans une université marocaine des années 70 où les grévistes, défenseurs des idées de gauche, faisaient face à ceux qui ne défendaient qu'eux-mêmes et le droit de travailler en paix.

Ferkouss superstar
La Fondation du Festival la jouera royale, en se plaçant au-dessus de la mêlée, ne critiquant ni les uns ni les autres, se contentant de passer l'info et la photo du sit-in dans le journal du Festival. “Cause toujours tu m'intéresses”, en somme. L'autre grande question sous-jacente, posée par le sit-in de Bziz, était de savoir si le festival était populaire ou VIPesque. Les deux à la fois, répondait avec aplomb un officiel qui, pas dupe, sait pertinemment que l'image paillettes de Marrakech est surestimée. En vérité, les grands noms du cinéma ne se bousculaient pas au portillon cette année. Les deux seules autres stars populaires invités du festival, Kajol et son mari Ajay Devgan, avaient annulé à la dernière minute pour cause de maladie de leur fille. Ce qui eut pour effet de briser le cœur de la jeune fille, fan de cinéma indien, chargée de les accueillir devant le tapis moutarde du Palais des Congrès. Elle n'a finalement eu droit qu'au réalisateur du film, au scénariste et au producteur. Des personnes fort sympathiques, mais qui n'évoquaient pas grand-chose dans l'imaginaire des fans du cinéma hindou, agglutinés pour la soirée spécial Bollywood. Même Ferkouss, le chauffeur de taxi de la sitcom du ramadan, provoquait plus de mouvements de foule que Roman Polanski, président du jury cette année. Dans le hall de l'hôtel Mansour Eddahabi, le réalisateur s'est fait quasiment bousculer par des fans voulant se faire photographier avec l'acteur marocain. Pauvre Roman, pris d'une envie de faire pipi, mais ne trouvant personne pour lui indiquer les toilettes les plus proches. Et même quand les vraies étoiles, accrochées dans le ciel de l'imaginaire marocain, étaient là, leur présence était furtive. Yousra, habituée du festival, est arrivé en catimini. La plupart des journalistes présents, pourtant excellents “bergagas”, n'ont découvert sa présence que trois jours plus tard. En boîte de nuit. Elle était assise dans un coin de l'Actors, le rendez-vous nocturne des festivaliers. Situé à quelques mètres du Palais des Congrès et de l'hôtel des festivaliers, le night-club servait de café du derb, où l'on se donne rendez-vous le soir, bien qu'à notre connaissance, personne n'y ait consommé d'expresso. C'était plutôt coupe de champagne pour les plus classieux et alcool fort pour ceux cherchant avant tout le K.O technique.

Resquilleurs haut de gamme
La faune du festival se retrouvait chaque soir autour du point d'eau, largement au-delà du crépuscule, certains ouvrant même les yeux sur l'aube naissante. À l'intérieur de la boîte, le cinéma français se tenait à l'écart. À la table de Jamel Debbouze, Edouard Baer profitait de ses désormais traditionnels congés payés à Marrakech dans une indifférence générale, qu'il pourrait bien qualifier de vexante. Largement représenté, le cinéma marocain s'imbibait à profusion, abordant pour certains acteurs de parfaites inconnues, accrochant pour d'autres des journalistes par le collet, dans l'espoir de leur expliquer tout le mal qu'ils pensaient de leurs confrères du landerneau artistique. Plus la nuit avançait, moins le statut des night-clubbers avait de l'importance. Journalistes, employés d'agences de communication, artistes… plus rien ne comptait. Le seul critère de hiérarchisation était le taux d'alcoolémie. Et la capacité à rester digne. On avait entendu parler de soirées plus “sélect”, tenues à droite et à gauche. L'organisation du Festival était d'ailleurs débordée par les demandes d'invitation, émanant de journalistes et de professionnels du cinéma. Les heureux invités à ces soirées racontaient aux autres leur déroulement, la nature des présents, leurs petites frasques supposées ou avérées. Difficile de distinguer l'info de la rumeur. Et au concours du parasitage, l'oscar est revenu à deux pseudo-journalistes, des “nejjara” selon la terminologie de la profession. Se faufilant dans la délégation officielle, ces derniers ont réussi l'exploit de s'incruster au dîner privé organisé par le prince Moulay Rachid. Démasqués par des membres de la Fondation du Festival, le Palais des Congrès recevait le lendemain la visite d'hôtes inattendus. Des éléments de la DGSN, venus enquêter sur ce couac de la sécurité royale. L'autre fausse note du Festival a concerné Fayçal Laraïchi. Vice-président de la Fondation du Festival, l'homme de médias a été empêché d'entrer au Palais des Congrès par un agent de sécurité zélé et aussi physionomiste que pourrait l'être Stevie Wonder. “Par contre, Mélita Toscan du Plantier, elle, tout le monde la reconnaît”, faisait remarquer un ancien du journalisme culturel, très respecté par la profession. Populaire ou paillettes, le FIFM ? Au fond, la vraie question est ailleurs. Jusqu'à quand le final cut échappera-t-il aux Marocains ?
 
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