Eric Laurent et Catherine Graciet se sont décidés à donner leurs versions des faits mais séparément. Laurent a choisi Le Monde. Sa consoeur a opté pour Le Parisien. Dans un long entretien paru sur le site du quotidien Le Monde, l'auteur des «Mémoires d’un roi» est revenu un peu en détail sur l'affaire. Il a commencé par justifier son appel téléphonique au secrétaire particulier du roi en juillet dernier. «Jai appelé Mounir El Majidi pour une raison très simple : dans ce livre que nous avions en préparation, il y avait des éléments concernant la famille royale que nous voulions croiser avec le Palais». Et d’ajouter sur le même ton qu’ «il n’y a pas de formulation de demande d’argent», explique-t-il.
Il dit craindre pour la stabilité du royaume
Seulement quelques lignes plus tard, il avoue accepter l’offre du représentant du palais pour des raisons personnelles : «Ma femme est extrêmement malade. C’est une situation personnelle très dure. Elle a un cancer généralisé. Son état s’aggrave de jour en jour malgré les opérations, des chimiothérapies très lourdes».
Le journaliste qui a longtemps fréquenté les palais de Hassan II parait très soucieux de la stabilité du royaume. «C’est un sujet très complexe concernant la famille royale et certains comportements. Donc je me dis : après tout, on n’a pas envie, quelles que soient les réserves que l’on peut avoir sur la monarchie, que s’instaure une république islamique. S’il propose une transaction, pourquoi pas». Mais aujourd’hui cette question ne semble plus l’intéresser autant car il se dit prêt à publier le livre.
Graciet : «Un moment de faiblesse»
«Je n’ai jamais voulu faire chanter qui que ce soit», se défend Graciet dans un entretien publié au Parisien. Néanmoins, elle reconnait avoir cédé à la tentation et accepté finalement les 40 000 euros d’avance pour la non-publication de leur livre. «Oui, je me suis laissée tenter. J'ai eu un accès de faiblesse... C'est humain», a reconnu dans une interview parue sur le site du Parisien. «Chacun se demande ce qu'il ferait de sa vie avec 2 M€. Essayez d'imaginer la situation. Et c'était pour renoncer à un livre, pas pour tuer quelqu'un...», se justifie-t-elle.
Elle explique ensuite que «comme c'est le Palais qui propose l'argent, j'y vois un deal privé entre deux parties. Je sais que, déontologiquement, moralement, ce n'est pas génial, mais je n'y vois rien de mal pénalement. Ensuite, c'est lui qui a insisté pour que nous prenions une avance. Quand il est parti et que je me suis retrouvée avec tout cet argent liquide dans les mains, j'étais hébétée, hagarde».
Depuis l'éclatement de l'affaire, le «couple» Graciet-Laurent connait ses premières «scènes de ménage». L’avocat de la journaliste jette toute la responsabilité de l’affaire sur Eric Laurent. Celui-ci a bien entendu répliqué assurant que «c’est faux. Je veux bien avoir organisé des choses. Si j’avais tout organisé, il faudrait de sa part un total aveuglement – pour ne pas dire plus – pour rédiger le texte de l’accord et le signer. Et moi, j’aurais été le meilleur des amis de lui proposer la moitié après avoir tout organisé seul».
L’avocat du Mohammed VI réagit ce lundi matin
«Ils ont oublié qu’ils ont été enregistrés». C’est par ce petit rappel que Me Moretti a commencé par réagir ce matin sur le plateau de la Matinale d’I-Télé après les versions des deux mis en examen. L’avocat rejette toute la défense des deux journalistes, affirmant que c’est Eric Laurent qui a le premier proposé une compensation financière contre l’annulation du projet du livre sur la monarchie. «Il dit qu’il a besoin de l’argent pour sa retraite et Mme Graciet pour son élevage de chevaux».
Me. Moretti assure également, en réponse à une question d’un journaliste, que «c’est l’avocat du royaume qui a enregistré les discussions mais sous contrôle de la police française». Au passage, il a nié toute participation des services secrets marocains dans l’affaire. Le pénaliste affirme sans la moindre concession que Laurent «a voulu vendre son pouvoir de nuisance avec deux millions d’euros».