Pour le discours du trône de cette année, le roi Mohammed VI l’a voulu comme un moment pour une évaluation objective de ses quinze ans de règne. Contrairement à l'autosatisfaction des politiques marocains, le roi a plutôt porté un regard critique sur les réalisations. Le recours très fréquent au style interrogatif, notamment lors de la première partie de son allocution, en est bien la preuve.
«Nous sommes donc tous en droit de nous demander : est-ce que les réalisations et les manifestations de progrès que nous observons ont eu l’impact direct escompté sur les conditions de vie des Marocains ? Est-ce que le citoyen marocain, quelle que soit sa situation matérielle ou sociale, et où qu’il se trouve, dans le village et dans la ville, sent une amélioration concrète dans son vécu quotidien, grâce à ces chantiers et à ces réformes ?», s'est-il interrogé lors de son discours.
«La richesse ne profite pas à tous les citoyens»
Ces multiples interrogations, a tenu à préciser le souverain, ne sont pas l’expression d’un «doute, d’hésitation ou de flou dans la vision». Loin de là. «Notre voie est limpide, nos choix précis et mûrement réfléchis. Car nous savons qui nous sommes, ce que nous voulons et vers où nous allons», a-t-il affirmé.
Tout en énumérant les grands projets structurants réalisés durant les quinze dernières années, Mohammed VI, refusant de ne voir que la moitié du verre rempli d’eau, a assuré que certes «le Maroc a connu des avancées tangibles», toutefois «la réalité confirme que cette richesse ne profite pas à tous les citoyens». Et d’expliquer que lors de ses tournées d’information, il relève «certaines manifestations de pauvreté et de précarité, comme [il] note l’ampleur des disparités sociales entre les Marocains». Le roi s’est contenté d’annoncer le constat, sans identifier les responsabilités.
Le roi parie sur le capital immatériel
Il est très fréquent de voir le Maroc occuper les derniers rangs dans des rapports d’institutions internationales consacrés au niveau du développement. Celui du PNUD est, en soit, le meilleur exemple.
En vue d’une sortie honorable du pays de la queue du peloton du développement, le roi Mohammed VI propose d’inclure d’autres indicateurs pour le calcul de la richesse globale du royaume, tels la sécurité et la stabilité. A cet effet, il a annoncé que le Conseil économique, social et environnemental en collaboration avec Bank Al Maghrib et quelques instances concernées, vont «entreprendre une étude permettant de mesurer la valeur globale du Maroc entre 1999 et fin 2013».
Son objectif nodal serait non seulement de «ressortir la valeur du capital immatériel de notre pays, mais également et surtout de souligner la nécessité de retenir ce capital comme critère fondamental dans l’élaboration des politiques publiques, et ce, afin que tous les Marocains puissent bénéficier des richesses de leur pays», a-t-il conclut.
On peut cependant se demander comment le changement de thermomètre apportera une meilleure redistribution des richesses et une élévation du bien-être chez les Marocains.