«L’article 475 du code pénal ne risque pas d'être abrogé, du jour au lendemain, sous la pression de l’opinion publique internationale. Parfois le mariage de la violée à son violeur ne lui porte pas un réel préjudice», lance d’emblée la ministre Bassima Hakkaoui, contactée par nos soins avant de préciser : «aujourd’hui, l’article incriminé nécessite un dialogue sérieux entre le tissu associatif, parlement et ministères concernés. Il se peut que l’article soit amendé entièrement ou partiellement».
La ministre marocaine de la Femme, de la Famille, de la Solidarité et du Développement social entrevoit que le suicide d’Amina Filali permettra au Maroc de compenser les lacunes de son code pénal. A cette fin, la coordination avec le ministère de la justice s’impose. «Pour que le suicide d’Amina ne soit pas vain, il faut que le dialogue entretenu, actuellement, entre les différentes composantes sociales marocaines arrive à une proposition qui puisse satisfaire toutes les parties», affirme la ministre.
Toujours selon ses mots, le dialogue se fait vivace et vise essentiellement à resserrer la peine contre le crime de viol. De même, elle admet que l’article en question a été, depuis plusieurs années, mis à l’index par la société civile marocaine. En effet, le 25 novembre 2010, plusieurs associations féministes marocaines ont organisé une marche pour crier haro sur le viol, les violences à l’égard des femmes et sur le mariage des mineures.
Interrogée sur la question intrinsèque aux traditions marocaines, à savoir celle de «l’honneur de la famille» de la victime d’un viol, la ministre ne semble pas y être hostile : «il est vrai qu’un mariage dans des circonstances similaires à celles d’Amina serait voué l’échec. Cependant, il ne faut pas oublier la nature de notre société. Autrement dit, prendre en compte les familles et l’entourage immédiat de la violée, qu’elle soit mineure ou majeure» ajoute Bassima Hakkaoui.
La société civile accuse…
Quelques figures marocaines du tissu associatif féministe ne lâchent pas prise. Pour Fouzia Assouli, présidente de la Fédération marocaine de la Ligue démocratique pour le droit de la femme (FLDDF), les marches organisées par les féministes pour lutter contre le mariage des mineures sont souvent «boycottées par quelques médias de grande envergure au Maroc qui semblent avoir d’autres priorités ou qui trouvent que le mariage d’une mineure est une affaire tout à fait normale». Cette dernière ajoute que «si les médias se sont réveillés maintenant, suite au suicide d’Amina, ils doivent continuer sur cette lancée pour que le ministère abroge l’article 475 du code pénal marocain qui est loin d’aider la violée. Qu’elle soit mineure ou majeure».