Cet après-midi, Jerada a enterré les deux frères décédés vendredi dans une mine. L’opération ne s’est pas révélé une mince affaire. «Les manifestants ont refusé que des représentants des autorités locales et les forces de sécurité organisent les funérailles, bloquant le passage aux ambulances portant les deux corps depuis la morgue vers le cimetière», nous confie Said Al Manjami, un acteur associatif local.
L’affrontement était imminent, avant que les forces de l’ordre ne se retirent et laissent aux habitants le soin d’inhumer les deux frères. Une fois l’opération accomplie, commence alors une marche en direction de la préfecture. Celle-ci s’est tenue sans heurs et n’a connu aucune intervention policière.
Ce calme contraste considérablement avec le recours à la force, dans la nuit du dimanche à lundi. Des éléments de la police ont en effet dispersé le sit-in observé par des jeunes devant le cimetière pour «empêcher l’enterrement clandestin des deux victimes et procéder à leur détention pendant quelques heures», ajoute la même source.
Le président de l’Oriental sur place
Craignant un Hirak dans la ville minière, qui risque de se propager dans tout l’Oriental, les élus se mobilisent. Ce matin, le président de la région, Abdenbi Bioui, a été dépêché sur place pour faire le pompier.
«Le PAMiste, dans une discussion avec un groupe de manifestants, a promis de régler les problèmes de Jerada, précise Said Al Manjami. Il annoncé également l’arrivée d’une délégation ministérielle sur les lieux. Bioui a demandé à ses interlocuteurs de constituer un comité des représentants de la contestation». Le président de la région est en poste depuis octobre 2015.
Ce dernier point divise les protestataires. «Les jeunes des ‘cendrillates’ (les mines clandestines), refusent catégoriquement que d’autres acteurs associatifs et syndicaux soient intégrés au comité de dialogue avec le gouvernement ou les autorités locales, indique notre interlocuteur. Une version à laquelle n’adhère pas d’autres forces à Jerada, arguant que le dossier dépasse l’extraction clandestine du charbon et qu’il concerne le développement de toute la ville».
Contrairement au Hirak du Rif où Nasser Zefzafi s’est vite imposé comme l’incarnation de la mobilisation, à Jerada aucune figure n’a émergé jusqu’à présent pour prendre les commandes de la contestation.