C’est depuis 2007 qu’il a commencé l’écriture de son livre «Journal d’un prince banni» qui sortira finalement ce 9 avril. Mais avant cette date, Moulay Hicham est revenu sur les raisons qui l’ont poussé à écrire cet ouvrage. «Je veux éclairer les gens, contribuer au débat et, dans ce cas précis, faire comprendre une partie de l'histoire contemporaine de mon pays», explique-t-il dans un entretien accordé au journal Le Monde. «Je suis allé au cœur du réacteur. Beaucoup diront : ’’Vous êtes tombé du carrosse et vous cherchez à revenir.’’ Non. Dans ma culture, ce n'est pas comme cela que l'on revient. On revient en intriguant, en faisant amende honorable», a-t-il ensuite ajouté.
Même si le prince «iconoclaste» prétend ne vouloir jouer aucun rôle, cela ne l’empêche pas de vouloir «apporter sa contribution» si l’occasion venait à se présenter. Mais cela s’avère plus que compliqué puisqu’il ne sait pas si on se dirige «vers un scénario de rupture» ou «de changement apaisé». Ce qui est sûr par contre c’est qu’il ne reviendra pas en arrière dans ses positions. «…j'ai quitté ma maison, et je n'y reviendrai pas», lance-t-il fermement.
Le prince est également revenu sur les institutions royales. Pour lui, le Maroc «ne peut pas se développer avec le Makhzen», d’où la nécessité de le supprimer. «La mise à mort du Makhzen est indispensable. C'est un pouvoir néo-patrimonial qui empêche le développement économique, un système de prédation et de subjugation», estime-t-il. Moulay Hicham demande à la place «la création d'un véritable Etat moderne, un Etat de droit». «Aujourd'hui, nous avons une monarchie avec une Constitution, nous n'avons pas une monarchie constitutionnelle», affirme-t-il.
Hassan II – Mohammed VI, «deux personnalités un même résultat»
Moulay Hicham s’est aussi lancé dans le jeu des comparaisons des règnes de Mohammed VI et de son prédécesseur, le roi Hassan II. S’il estime qu’avec le premier, «il y a eu une alternance avec un gouvernement socialiste coopté», ce qui «aurait pu mener à la démocratie», il pense en revanche que sous le roi actuel, «la logique démocratique a été laissée en rade pour un gouvernement de technocrates en 2002». Puis, avec le gouvernement dirigé par l’Istiqlal, qui a été «vidé de toutes ses prérogatives avec la création de commissions royales et de hautes instances». Enfin, avec le celui du PJD, on assiste à l’arrivée d’une «nouvelles élites que l'on vampirise, pour les lâcher ensuite comme des zombies sans vie».
Le résultat sous les deux rois est le même, selon Moulay Hicham même si les raisons différent. Alors que Hassan II «avait la passion du métier de roi», son successeur en avait moins, ce qui a empêché, au final d’assister à une démocratisation aboutie au Maroc pour le cousin du roi.
Le Maroc n’est pas l’exception du printemps arabe…c’est la Tunisie
Lorsqu’il s’était prononcé sur le printemps arabe, le prince avait prédit la chute des monarchies, mais l’histoire lui donne pour l’instant tort. Ainsi, il continue de soutenir que les monarchies lui en «veulent beaucoup», «parce qu'on estime que je me suis retourné contre ma race». Alors que le Maroc est cité comme la seule exception du monde arabe dans cette vague révolutionnaire, le prince prend tout le monde à contre pied. «La vraie exception, ce n'est pas le Maroc. La vraie exception du monde arabe, c'est la Tunisie, et ça le reste», soutient-il. Mais, à l’en croire, «la fascination pour l'autoritarisme dans la région s'est cassée. Le sentiment d'impuissance aussi».
Enfin, «l’opposant» a évoqué le conflit au Sahara et les solutions marocaines. Pour lui, l’absence de projet marocain dans cette région fait encore défaut. «Le Maroc bute sur le Sahara parce qu'il n'a pas de projet de démocratisation», assène-t-il. Pour lui, «le problème du Sahara est le même que celui du Maroc : au lieu d'engager les gens sur une base citoyenne, on les a engagés sur des bases clientélistes.»
Dans cette nouvelle sortie, Moulay Hicham continue dans sa dialectique très critique envers le pouvoir marocain et son cousin Mohammed VI. Cela devrait lui attirer encore plus de foudres au Maroc.