Si la religion est un sujet à polémiques en Europe, ses rites le sont autant. La semaine dernière, l’Assemblée Parlementaire du Conseil de l’Europe a choqué les communautés musulmane et juive en adoptant une résolution interdisant la pratique de la circoncision. L’APCE a invité ses Etats membres à prendre des mesures contre ce qui lui semble être une «violation de l’intégrité physique des enfants», rapporte Ouest France. Cette résolution a, dans la foulée, reçu son lot de critiques et d’indignation des communautés visées. Musulmans et Juifs sont aussitôt montés au créneau pour exprimer leur opposition à cette décision.
En effet, celle-ci veut que les Etas membres «condamnent publiquement les pratiques les plus préjudiciables, notamment les mutilations génitales féminines comme l’excision et appelle également à adopter la législation les interdisant». Elle va plus loin, appelant à «définir clairement les conditions médicales, sanitaires et autres à respecter s’agissant des pratiques qui sont aujourd’hui largement répandues dans certaines communautés religieuses, telle que la circoncision». C’est surtout cette autre mesure qui a suscité l’indignation des musulmans et des juifs qui ne sont pas contre l’interdiction de l’excision, pratique qu'ils qualifient d'ailleurs de «barbare».
Tout de même, une question s’impose : la décision de l’APCE aurait-elle été animée par un précédent en Allemagne ? Pour rappel, l’année dernière, un tribunal germanique avait indiqué que «la circoncision d'un enfant pour des motifs religieux est une blessure corporelle passible d'une condamnation». Selon le Figaro, la résolution de l’APCE est basée sur le rapport de Marlene Rupprecht, une députée allemande membre de l’Assemblée. Pour sa part, le président du conseil français du culte musulman (CFCM), Abdellah Zekri, a pris position et déploré le «silence» de ses pairs. Je m'indigne contre cette résolution et m'étonne du silence des dirigeants musulmans qui n'ont pas réagi», s'est-t-il insurgé.
Circoncision n’est pas excision
En tout cas, la réaction de certains responsables musulmans est clairement dirigée contre les mesures prises à l'endroit de la circoncision et non l’excision. D’après eux, les deux pratiques n’ont pas de similitudes. La circoncision est «un rite religieux millénaire dont les bienfaits sont en outre scientifiquement démontrés et non d’une atteinte à l’intégrité physique des garçons», comme l’a souligné Zekri. Selon ce dernier, il faut éviter l’amalgame entre la «circoncision» des jeunes garçons expressément recommandée par l’islam et l’«excision» des jeunes filles qui est «effectivement une mutilation». Sur le site Ajib, on précise même que chez les musulmans, la circoncision fait partie des «cinq actes de la nature saine originelle».
Pour le porte-parole du ministère israélien des Affaires étrangères, Yigal Palmor, cité par le Figaro, il s'agit de dispositions racistes. «Toute comparaison de la circoncision à la pratique condamnable et barbare des mutilations génitales féminines est au mieux le signe d’une ignorance consternante. Au pire, c’est de la diffamation et de la haine antireligieuse», a-t-il indiqué. Et de préciser : la résolution de l’APCE est «une tache morale» et «encourage la haine et les tendances racistes de l’Europe».
Pratiquer la circoncision quand «le garçon est en âge d’être consulté»
Le conseil de l’Europe a, tout compte fait, demandé à ce que la circoncision ne soit pas pratiquée avant que le garçon «soit en âge d’être consulté». Pourtant, dans la plupart des cas, la circoncision est effectuée quelques mois ou semaines après la naissance de l’enfant chez les musulmans et juifs.
Dans sa résolution, l’APCE nie également les bienfaits de la circoncision sur la santé. «Les tenants de ces pratiques [les] présentent souvent comme un bienfait pour les enfants, en dépit d’éléments présentant manifestement la preuve du contraire», s’est-t-elle justifiée. Une position très étonnante d’autant plus que de très récentes études de chercheurs américaines, français et sud africains ont prouvé que la circoncision est un moyen efficace pour endiguer de nouvelles infections par le VIH. Même son de cloche chez l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui avait recommandé cette pratique dans le cadre de la lutte contre la propagation du VIH.