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Grand Angle

France : L’incendie à Notre-Dame où le rêve terroriste des islamophobes

Peu après le début de l’incendie de Notre-Dame de Paris, les réseaux sociaux se sont fait l’écho de théories conspirationnistes avant même que les enquêteurs en déterminent l’origine et écartent la piste criminelle.

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La cathédrale Notre-Dame de Paris a été en proie à un violent incendie pendant plus de douze heures. / Ph. Geoffroy Van der Hasselt – AFP
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Fallait-il s’y attendre ? Quelques heures seulement après le début de l’incendie qui a détruit une partie de la cathédrale Notre-Dame de Paris, lundi 15 avril dans la soirée, théoriciens du complot et militants d’extrême droite ont commencé à distiller leur version des faits sur la base de récits visant notamment les musulmans. Les autorités françaises n’ont pourtant à aucun moment indiqué que l’incendie avait été délibérément allumé, les enquêteurs privilégiant la piste accidentelle, comme l'indique Le Parisien.

Or, certains n’ont pas attendu les premiers éléments de l’enquête pour déployer sur les réseaux sociaux une campagne conspirationniste. En atteste une chronologie publiée mardi par le site d’information américain BuzzFeed.

«Ils récoltent ce qu’ils sèment»

De faux comptes Twitter se faisant passer pour les chaînes américaines CNN et Fox News ont été les premiers à diffuser des contenus de désinformation sur l’incendie, indiquant qu’il s’agissait d’un acte terroriste. L’un d’eux a retwitté un faux tweet de Ilhan Omar, la représentante du Minnesota au Congrès américain, qui fait régulièrement l’objet de commentaires islamophobes. Le tweet qui lui est attribué mentionne, en référence à Notre-Dame : «Ils récoltent ce qu’ils sèment.»

D’après BuzzFeed, il a fallu deux heures à Twitter pour supprimer le faux compte CNN «et encore plus longtemps pour supprimer celui de Fox News». Deux tweets qui ont suffi à jeter les bases des théories conspirationnistes et autres fausses informations qui ont été diffusées par la suite.

Christopher Hale, un homme politique du Tennessee et contributeur dans différents médias, a de son côté indiqué dans un tweet que l’un de ses amis jésuites en France avait entendu le personnel de la cathédrale dire que l’incendie était intentionnel. Il a déclaré à BuzzFeed News avoir supprimé le tweet environ 10 minutes plus tard, après s’être rendu compte qu’il véhiculait une fausse information. «Je suis absolument convaincu que [l’incendie] est un accident», a-t-il déclaré à BuzzFeed.

Si le tweet de Christopher Hale a rapidement été supprimé, il aura toutefois été suffisamment longtemps en ligne pour que Paul Joseph Watson, un YouTubeur britannique d’extrême droite, s’appuie sur ce seul tweet pour rédiger un article intitulé «La cathédrale Notre-Dame en feu, un travailleur affirme qu’elle a été "délibérément" incendiée» – à l’exception d’une brève référence à la BBC, en tout début d’article, indiquant que l’incendie pourrait être lié à des travaux de rénovation. En fin d’article, Paul Joseph Watson fait également mention d’une hausse des «attaques antichrétiennes» en France et contre les symboles juifs, s’appuyant sur un autre article dont il est lui-même l’auteur.

Une photo a mis le feu aux poudres

En France, les théories du complot sont allées bon train. Lundi 15 avril sur Fox News, Philippe Karsenty, conseiller municipal d’opposition de la ville de Neuilly, a établi un lien entre l’incendie et les dégradations commises volontairement contre les édifices catholiques. «C’est très choquant. (...) nous devons savoir que des églises sont vandalisées en France toutes les semaines. Bien sûr, le politiquement correct va vouloir nous faire croire que c’est un accident», a-t-il avancé avant de se faire recadrer par le journaliste Shepard Smit.

De plus, sur Twitter comme sur Facebook, deux hommes ont malgré eux été la cible de commentaires racistes. Circulant sur le Web depuis l’incendie, une photo montre au loin les flammes ravageant la cathédrale et, à quelques centimètres de l’objectif, deux hommes qui sourient en franchissant le cordon jaune qui marque le périmètre de sécurité, décrit le journal 20 Minutes. Il n’en a pas fallu plus pour que certains internautes assurent que ces deux hommes sont «deux musulmans qui rigolent en voyant la cathédrale brûler».

Le député Meyer Habib, proche de la droite radicale israélienne, n’a pas non plus hésité à semer le doute sur les causes de l’incendie : «Fermeture du chantier à 17h- feu à 18h50- présence d’ouvriers, pourquoi ?», a-t-il notamment écrit.

Idem pour Jean Messiha, membre du bureau national du Rassemblement national (RN), qui a mis à mal dans un tweet la thèse accidentelle.

Article modifié le 19/04/2019 à 11h27

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