À l’automne, sinon à l’hiver, de leur vie, voilà que certains se soulagent et tentent d’apaiser sans doute leur conscience bien troublée. Que disent-ils? Que font-ils? C’est simple: ils chargent le regretté Roi Hassan II du passif du précédent règne. Un acte de courage? Allons, allons! plutôt l’expression d’un lâche soulagement, une pleutrerie pour tout dire. Déprimant, non ? Qu’avancent aujourd’hui ces trois personnages? Abdelahdi Boutaleb, familier des arcanes du makhzen durant un demi-siècle, comme il le revendique en plastronnant quelque peu, s’est ainsi distingué, lors de sa déposition devant l’IER en formulant cette sortie: «Hassan II est moralement responsable de ce qui s’est passé au cours des années de plomb». Une salve assassine dévoilée dont la prese s’en est fait l’écho. Abdehadi Boutaleb a été un privilégié du Méchouar depuis les années cinquante. Il jouit, à juste titre, du respect et de la considération que l’on doit à sa culture, à sa science et à son parcours au côté du monarque disparu. Mais avec de tels propos, il se discrédite et ne fait pas honneur à ce que l’on pourrait appeler l’éthique de la responsabilité. Espère-t-il, d’une manière aussi malheureuse, se défausser, quoi qu’il en dise, de sa part de responsabilité dans l’exercice et la mise en œuvre d’une politique gouvernementale où il a été, à un titre ou à un autre, partie prenante? Même grief à l’encontre, cette fois, d’un ancien Premier ministre, en l’occurrence Abdellatif Filali. On l’a déjà signalé dans ces mêmes colonnes, voici quelques semaines à peine: il dresse dans son “livre inachevé”, Le Maroc et le monde arabe, une évaluation sévère et injuste de la politique de Hassan II et de son bilan après trente-huit ans de règne. Faut-il rappeler à cet égard qu’il met «au passif du régime… L’éducation, la politique économique et sociale, les droits de l’Homme et le déficit démocratique». Même l’opposition historique est plus nuancée aujourd’hui dans cet audit des quatre décennies écoulées. Alors? À quoi rime cette contorsion qui s’apparente à un reniement; reniement tardif comme un râle d’aigreur de quelqu’un qui paraît ressasser rancune et rancœur; mais de quoi, lui qui a eu toutes les aisances d’un statut à nul autre pareil; mais aussi reniement du sens d’un engagement d’une vie au côté d’un Roi qui l’a honoré et couvert de tant de bienfaits. Avec Moulay Ahmed Laraki, l’on se trouve globalement dans la même équation: celle d’un sursaut de blanchiment politique. Voilà en effet une personnalité octogénaire qui a eu, lui aussi, les plus hautes fonctions publiques qui soient -ministre des Affaires étrangères puis Premier ministre (1970-71) avant de revenir à la tête du précédent département (1974-77). Il se distingue aujourd’hui en arguant «plusieurs erreurs» dans la gestion du dossier du Sahara, à un moment où il dirigeait la diplomatie chérifienne. Comprenne qui pourra! il se fend même d’une note datée du 20 juillet 1971 -dix jours après les événements de Skhirrat - qu’il a décidé de rendre publique dans l’hebdomadaire La Gazette du Maroc. Un texte de huit feuillets qui est un cas d’école de poncifs et de généralités qui laissent perplexes; un catalogue de pétitions de principe, de professions de foi moralisatrices ainsi qu’une liste de prescriptions sommaires du genre: «les partis doivent», «le pays doit être mobilisé» et autre variantes de la même veine. Pour un Premier ministre en fonctions, force est de faire ce constat: aucune vision ni stratégie. Au final, qui est responsable de quoi? Avec un tel entourage, Hassan II était-il bien servi? Aux historiens d’en débattre, mais une chose est sûre: ceux qui veulent réécrire les séquences du précédent règne -les “révisionnistes” qui sortent du bois- n’ont peut-être pas voix au chapitre dans cette entreprise. Et si cette pantalonnade devait se répéter, il ne manquerait plus que Karim Lamrani et Ahmed Osman pour boucler cette descente si peu vertueuse.
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