Menu
Connexion Yabiladies Ramadan Radio Forum News
Sagesse et intelligence
v
6 avril 2016 08:41
Un texte de Graham qui m'a bien plu. Une réflexion sur quelques concepts difficiles à définir. A la frontière des définitions de la sagesse, l'intelligence, l'éthique, l'inspiration. Finalement qu'est-ce que la sagesse pour vous ?

Is it worth being wise ?

Il y a quelques jours, j'ai finalement compris une question sur laquelle je m'interrogeais depuis vingt-cinq ans: le rapport entre la sagesse et l'intelligence. On voit bien que ce n'est pas la même chose, avec le nombre de gens qui sont intelligents mais pas vraiment sages. Mais pourtant ces deux qualités paraissent liées. Comment ?

Qu'est-ce que la sagesse ? Je dirais que cela consiste à savoir ce qu'il faut faire dans un grand nombre de situations. Je ne cherche pas ici à définir la vraie nature de la sagesse, mais seulement à comprendre dans quel sens nous employons ce mot. Une personne sage est celle qui sait en général ce qu'il faut faire.

Et pourtant, est-ce qu'il ne faut pas être intelligent aussi pour savoir ce qu'il faut faire dans certaines situations ? Par exemple, savoir quoi faire si l'instituteur demande en classe d'additionner tous les nombres entre 1 et 100 ? [1]

Certains disent que la sagesse et l'intelligence s'appliquent à des problèmes de nature différente - la sagesse aux problèmes humains et l'intelligence aux problèmes abstraits. Mais ce n'est pas vrai. Une certaine sagesse n'a rien à voir avec les hommes: par exemple, la sagesse d'un ingénieur qui sait que certaines structures sont moins sujettes à la rupture que d'autres. De plus les gens intelligents peuvent sans doute trouver des solutions astucieuses aussi bien aux problèmes humains qu'au problèmes qu'abstraits. [2]

Une autre explication courante est que la sagesse viendrait de l'expérience tandis que l'intelligence serait innée. Mais les gens ne sont pas sages simplement en proportion de leur expérience. D'autres facteurs doivent contribuer à la sagesse, dont certains peuvent être innés, comme par exemple le goût de la réflexion.

Aucune de ces explications conventionnelles ne résiste à l'examen. Quelle est donc la différence entre la sagesse et l'intelligence ? Quand on regarde comment les gens utilisent ces deux mots, ils semblent vouloir dire deux formes d'activité différentes.

Graphique

"Sage" et "intelligent" sont deux manières de dire qu'une personne sait ce qu'il faut faire. La différence est que "sage" signifie un résultat élevé en moyenne dans toutes les situations, alors qu' "intelligent" signifie un résultat spectaculaire dans quelques unes. C'est à dire que si l'on représente sur un graphique l'ensemble des situations sur l'axe des x et le résultat sur l'axe de y, le graphique de la personne sage serait globalement élevé, tandis que celui de la personne intelligente aurait des pics élevés.

Cette distinction est similaire à la règle d'après laquelle on devrait juger le talent à ce qu'il a de meilleur et le caractère à ce qu'il a de pire. La différence est qu'ici on juge l'intelligence à son meilleur et la sagesse à sa moyenne. C'est en cela qu'elles sont liées: elles représentent les deux différentes façons pour la même courbe d'être élevée.

Ainsi, une personne sage sait ce qu'il faut faire dans la plupart des situations, tandis qu'une personne intelligente sait ce qu'il faut faire dans des situations où peu d'autres le sauraient. Il faut ajouter un critère supplémentaire: on doit ignorer les cas où une personne sait ce qu'il faut faire parce qu'elle dispose d'une information particulière.[3] Mais en dehors de cela, je ne pense pas qu'on puisse être beaucoup plus précis sans commencer à se tromper.

Ce n'est d'ailleurs pas nécessaire. Tout en étant simple, cette explication prédit, où du moins est en accord avec les opinions traditionnelles sur la distinction entre la sagesse et l'intelligence. Les problèmes humains sont les plus courants, ainsi en sachant bien les résoudre on obtient un résultat élevé en moyenne. De plus il paraît naturel qu'un tel résultat dépende surtout de l'expérience, mais que d'autre part les pics spectaculaires ne peuvent s'obtenir que par des personnes possédant des qualités rares et innées; à peu près n'importe qui peut nager correctement, mais pour être un nageur olympique il faut un physique particulier.



Modifié 3 fois. Dernière modification le 06/04/16 09:40 par Summertime..
v
6 avril 2016 08:42
Cela explique aussi pourquoi la sagesse est un concept aussi insaisissable: elle n'existe tout simplement pas. Le mot «sage» veut dire quelque chose – que l'on est en moyenne bien capable de faire le bon choix. Mais donner le nom de «sagesse» à cette qualité supposée qui permettrait de faire cela, ne signifie pas qu'une telle chose existe. Si le mot "sagesse" signifie quelque chose, cela renvoie à un ensemble de qualités aussi variées que la discipline personnelle, l'expérience et l'empathie.



Modifié 7 fois. Dernière modification le 06/04/16 09:13 par Summertime..
v
6 avril 2016 08:49
De même, bien que le mot «intelligent» veuille dire quelque chose, on aura du mal à identifier une chose unique nommée «intelligence». De plus quelles que soient ses composantes, elles ne sont pas toutes innées. On utilise le mot «intelligent» pour indiquer de la capacité: un individu intelligent peut comprendre des choses que peu d'autres pourraient comprendre. Il existe probablement une certaine prédisposition innée à l'intelligence (et aussi à la sagesse), mais cette prédisposition n'est pas elle-même de l'intelligence.

Une des raisons pour lesquelles on a tendance considérer l'intelligence comme innée, est que ceux qui ont essayé de la mesurer se sont concentrés sur ses aspects les plus mesurables. Une qualité qui est innée sera évidemment plus facile à manier qu'une qualité qui est influencée par l'expérience, et qui donc pourra varier au cours d'une étude. Le problème vient lorsqu'on réduit le mot "intelligence" à ce que ces personnes mesurent. S'ils mesurent quelque chose d'inné, ils n'est pas possible qu'ils mesurent l'intelligence. Un enfant de trois ans n'est pas intelligent. Quand on en décrit un comme tel, c'est un raccourci pour dire «plus intelligent que les autres enfants de trois ans."

Séparation

C'est peut-être un détail technique de dire qu'une prédisposition à l'intelligence n'est pas la même chose que l'intelligence. Mais c'est un point important, parce que cela nous rappelle que nous pouvons devenir plus intelligent, comme nous pouvons aussi devenir plus sage.

La chose inquiétante c'est que nous avons peut-être à choisir entre les deux.

Si la sagesse et l'intelligence sont la moyenne et les pics de la même courbe, alors elles convergent lorsque le nombre de points sur la courbe diminue. S'il n'y a plus qu'un seul point, elles sont identiques: la moyenne et le maximum sont les mêmes. Mais lorsque le nombre de points augmente, la sagesse et l'intelligence divergent. Et historiquement le nombre de points sur la courbe semble avoir augmenté: notre capacité est testée sur un éventail toujours plus large de situations.

Au temps de Confucius et de Socrate, les hommes paraissent avoir considéré la sagesse, l'expérience et l'intelligence comme plus étroitement liées que nous ne les voyons. C'est une habitude moderne de distinguer entre «sage» et «intelligent». [5] Et la raison pour laquelle on le fait est qu'elles ont divergé. Lorsque le savoir devient plus spécialisé, il y a plus de points sur la courbe, et la distinction entre les pics et la moyenne devient plus marquante, comme dans une image rendue avec plus de pixels.



Modifié 1 fois. Dernière modification le 06/04/16 09:04 par Summertime..
v
6 avril 2016 08:50
Une conséquence est que certaines recettes traditionnelles peuvent être devenues obsolètes. A tout le moins il faut revenir en arrière et se demander si elles étaient vraiment des recettes pour la sagesse ou pour l'intelligence. Mais le changement vraiment marquant, avec la séparation de l'intelligence et de la sagesse,c'est que nous avons peut-être à décider laquelle nous préférons. Peut-être qu'il ne nous est pas possible d'optimiser les deux en même temps.

La société semble avoir opté pour l'intelligence. On n'admire plus le sage – plus comme les gens l'admiraient il y a deux mille ans. Maintenant on admire le génie. Parce qu'en fait notre distinction initiale a une réciproque assez brutale: de la même manière que l'on peut être intelligent sans être vraiment sage, on peut être sage sans être très intelligent. Cela ne paraît pas spécialement admirable. Cela nous donne James Bond, qui sait se débrouiller dans beaucoup de situations, mais a besoin de Q pour toutes celles impliquant des mathématiques.

L'intelligence et la sagesse ne sont évidemment pas mutuellement exclusives. En fait, une moyenne élevées peut favoriser des pics élevés. Mais il y a des raisons de penser qu'à un certain moment il faut choisir entre les deux. Il y a l'exemple des individus très intelligents, qui sont si souvent imprudents que dans la culture populaire on voit cela comme la règle plutôt que comme l'exception. Peut-être que le professeur distrait est sage à sa façon, ou plus sage qu'en apparence, mais il n'est pas sage commme Confucius ou Socrate voulaient que les gens le soient. [6]

Nouveauté

Pour Confucius et pour Socrate, sagesse, vertu et bonheur étaient nécessairement liées. L'homme sage était celui qui savait quel était le bon choix et le faisait toujours; pour que cela soit le bon choix, il fallait que cela soit moralement juste; le sage était par conséquent toujours heureux, sachant qu'il avait fait du mieux qu'il pouvait. Je ne vois pas beaucoup de philosophes anciens qui aurait été en désaccord avec cela.

"L'homme supérieur est toujours heureux; l'homme petit toujours triste", disait Confucius. [7]



Modifié 1 fois. Dernière modification le 06/04/16 09:03 par Summertime..
6 avril 2016 08:56
Socrate ou Socrates ?
C'est pas pareil smiling smiley
v
6 avril 2016 08:58
Σωκράτης Socrates normalement en grec ancien. Mais en français on écrit Socrate plutôt.
Citation
Jennett a écrit:
Socrate ou Socrates ?
C'est pas pareil smiling smiley
6 avril 2016 09:00
Me voilà rassurée, j'avais pensé à Sòcrates grinning smiley
v
6 avril 2016 09:02
Alors qu'il y a quelques année j'ai lu l'interview d'un mathématicien qui disait que la plupart des nuits il se couchait mécontent, en sentant qu'il n'avait pas fait assez de progrès. [8] Les mots Chinois et Grecs que nous traduisons par "heureux" n'avaient pas exactement la même signification que pour nous aujourd'hui, mais cela se recouvre assez pour que cette remarque les contredise.

Est-ce que le mathématicien est un homme petit parce qu'il est mécontent ? Non; il fait simplement un genre de travail qui n'était pas très répandu du temps de Confucius.

Le savoir humain semble grandir de manière fractale. De temps en temps, ce qui semblait être un domaine petit et inintéressant - une erreur expérimentale, même - se révèle, quand on l'examine de près, avoir autant en elle que tout le savoir jusqu'à ce point. Plusieurs de ces bourgeons fractals qui ont explosé depuis l'époque ancienne impliquent l'invention et la découverte de nouvelles choses. Les mathématiques, par exemple, étaient une chose qu'une poignée de gens faisaient à temps partiel. Maintenant c'est la carrière de milliers. Et dans un travail qui implique de faire de nouvelles choses, certaines règles anciennes ne s'appliquent plus.

Récemment j'ai passé du temps à conseiller des gens, et là je pense que l'ancienne règle s'applique: essayer de comprendre la situation le mieux que vous pouvez, donner le meilleur avis possible en fonction de votre expérience, et ensuite ne plus vous faire de soucis, sachant que vous avez fait tout votre possible. Mais je n'ai pas du tout cette sérénité quand j'écris un essai. A ce moment là je suis inquiet. Et si je n'avais plus d'idées ? Quand j'écris, quatre nuits sur cinq je me couche mécontent, en ayant l'impression de ne pas avoir suffisamment avancé.

Conseiller des gens et écrire sont deux types d'activité fondamentalement différents. Quand des gens viennent vous voir avec un problème et que vous devez trouver la bonne chose à faire, vous n'avez pas besoin (en général) d'inventer quoi que ce soit. Vous considérez simplement les alternatives et essayez de juger quel est le choix prudent. Mais la prudence ne peux pas me dire quelle phrase je dois écrire ensuite. L'espace de recherche est trop grand.

Quelqu'un comme un juge ou un officier militaire peut la plupart du temps dans son travail être guidé par son devoir, mais le devoir n'est pas un guide pour créer des choses. Les créateurs dépendent d'une chose plus précaire: l'inspiration. Et comme la plupart des hommes qui mènent une vie précaire, ils ont tendence à être inquiet, et non pas satisfaits. A cet égard, ils sont plus proches de l'homme petit du temps de Confucius, toujours à une mauvaise récolte (ou à un mauvais chef) près de la famine. Sauf qu'au lieu d'être à la merci des conditions climatiques et des fonctionnaires, ils sont à la merci de leur propre imagination.
.....

J'ai fait exprès de donner à cet essai un titre provoquant; bien sûr que cela vaut la peine d'être sage. Mais je pense qu'il est important de comprendre la relation entre l'intelligence et la sagesse, et en particulier ce qui semble être l'écart grandissant entre les deux. Ainsi l'on peut éviter d'appliquer à l'intelligence les règles et les normes qui sont en réalité destinées à la sagesse. Les deux significations de l'expression "savoir ce qu'il faut faire" sont plus éloignées que la plupart des gens ne l'imaginent. Le chemin vers la sagesse est la discipline, et celui vers l'intelligence l'auto-indulgence. La sagesse est universelle, et l'intelligence particulière. Et si la sagesse apporte le calme, l'intelligence conduit la plupart du temps à l'insatisfaction.


Citation
Jennett a écrit:
Me voilà rassurée, j'avais pensé à Sòcrates grinning smiley



Modifié 9 fois. Dernière modification le 06/04/16 11:25 par Summertime..
6 avril 2016 09:16
Salam Summertime,

Ton thread a l'air intéressant. Il faut bien évidemment que je prenne le temps de le lire dans son intégralité. Je vais essayer de faire ça à ma pause-déjeuner.
i
6 avril 2016 09:40
.

Sage ou intelligent ? Il vaut mieux être très intelligent et sage

un exemple tout simple :

Un in intelligent idiot qui invente et fabrique un moteur il va le greffer sur un char d'assaut en gros son intelligence tue.

un intelligent sage il va s'en servir dans un véhicule de transport en commun car son intelligence est au service de sa sagesse

Un sage qui n'est pas intelligent ne sert à rien, on en trouve dans tous les lieux de cultes et qui te conseillent en plus.


.
v
6 avril 2016 09:52
Pour toi, ce qui distingue la sagesse de l'intelligence est tout simplement d'ordre éthique.

Reste qu'il est difficile d'être sage sans intelligence. Pour être sage, il faut absolument de l'intelligence. Alors qu'on peut être intelligent sans être sage.

Citation
imtiyaz a écrit:
.

Sage ou intelligent ? Il vaut mieux être très intelligent et sage

un exemple tout simple :

Un in intelligent idiot qui invente et fabrique un moteur il va le greffer sur un char d'assaut en gros son intelligence tue.

un intelligent sage il va s'en servir dans un véhicule de transport en commun car son intelligence est au service de sa sagesse

Un sage qui n'est pas intelligent ne sert à rien, on en trouve dans tous les lieux de cultes et qui te conseillent en plus.


.



Modifié 1 fois. Dernière modification le 06/04/16 09:55 par Summertime..
C
6 avril 2016 10:22
Me suis régalé à te lire...
A
6 avril 2016 10:52
Salam Bye

Merci pour cet article sur la sagesse et l'intelligence smiling smiley

Moi aussi, j'aurais tendance à ne faire qu'une distinction morale entre ces deux mots : l'intelligence, c'est le fait de pouvoir trouver une solution à tous types de problèmes, alors que la sagesse, c'est de parvenir à une fin morale pour chaque problème rencontre. C'est la sagesse, c'est de savoir comment agir en vue de faire le bien. Bien entendu, on peut être intelligent et ne pas être sage, avec pour preuves (extrêmes) les tyrans de l'Histoire. Mais être sage sans être intelligent... effectivement, ça me parait impossible. D'où un lien que l'on peut faire entre les deux.

En fait, ce qu'on entend communément par intelligence va plutôt dans le sens de la ruse. C'est-à-dire être capable de trouver les moyens les plus appropriés et qui coûtent le moins d'effort pour parvenir à une fin, n'importe laquelle. Quoique... l'intelligence est parfois vue, pour certains, à travers la capacité à pouvoir agir ou penser de façon "mauvaise", vicieuse, comme si arpenter les sentiers non-conformistes était signe d'élévation par rapport à la moyenne des gens.

Et ce qu'on entend communément par sagesse va dans le sens de la maturité. C'est-à-dire avoir assez de recul sur la vie pour pouvoir donner des "leçons" et lois générales à son propos et agir avec vertu dans celle-ci (et surtout aider les nouvelles générations à agir avec vertu, la sagesse étant vue comme une "qualité" propre aux vieillards).
Cette distinction entre intelligence et sagesse me fait penser à l'intelligence des jeunes, ou en tout cas à leur goût/"culot" pour essayer de raisonner sur des questions de la vie et pour apporter des solutions originales, voire pour, avec plaisir, "remettre les vieux et la tradition à leur place". Il y a une témérité là-dedans que les adultes peuvent considérer comme signe d'intelligence, mais pas de sagesse parce que ça va à l'encontre de ce qu'ils tiennent pour principe.
Du coup, la sagesse n'a-t-elle pas une base "conformiste"? Pas forcément dans un sens négatif, dans le sens de préservation d'une tradition considérée comme vraie et intouchable.
v
6 avril 2016 10:55
Merci, mon frère.

Un exemple de sagesse qui pourtant a requis énormément d'intelligence:

La Kaaba avait été touchée par un torrent destructeur qui a sérieusement endommagé ses murs, obligeant les Quraychites à la démolir puis à la reconstruire complètement. Ils se sont engagés à ce que sa construction se fasse avec de l'argent licite et conforme à l'éthique et qu'en conséquences, seraient refusés les fonds provenant des revenus de la prostitution, de ventes entachées d'intérêts, usuraires etc.

Les nobles parmi les Quraychites se mirent à transporter les pierres sur leurs épaules. Le Messager d'Allah (saws) en faisait de même. A chaque coin de la Kaaba était dédié un groupe de notables chargés d'y amener des pierres.

Quand la construction parvint à la hauteur où était enchâssée la Pierre Noire, ils se disputèrent au sujet de celui qui l'y placerait. Ils se querellèrent à ce propos avec tant d'acharnement qu'un conflit armé faillit éclater entre eux.

La dispute dura quatre jours, puis Allah (swta) leur inspira de désigner comme juge entre eux le premier homme qui traverserait la porte d'as-Safâ. Cet homme en question fut... Muhammad ibn 'Abdullah (saws).

Ils furent ravis et heureux.

Ils se dirent : " Voici "al-amîn " [l'homme honnête], nous l'acception comme juge ". Quand ils l'informèrent de la situation, celui-ci étala sur le sol son vêtement et dit :

" Que chaque tribu tienne un côté du vêtement ", c'est à dire que chacun des chefs de clan quraychites se saisisse d'un côté du vêtement, ils étaient quatre chefs de clan.

Ceci fait, il y déposa la Pierre Noire et leur demanda de soulever le vêtement. Après qu'ils la transportèrent jusqu'à l'endroit où elle doit être enchâssée, il la prit et l'y plaça.

C'est ainsi que prit fin ce problème qui a failli dégénérer en combat meurtrier, par la grâce d'Allah (swta) d'abord puis grâce à la sagesse de Muhammad Ibn Abdullah (saws) et à sa perspicacité.

Citation
Cryxus a écrit:
Me suis régalé à te lire...
v
6 avril 2016 11:02
Salam Assiatou,

Je prends note de ta remarque sur le conformisme apparent de la sagesse que tu soulèves. Prenons Muhammad (saws) par exemple, qui a gardé les traditions chevaleresques arabes, mais qui a juste rejeté les traditions qui allaient à l'encontre de l'éthique nouvelle. Nous sommes d'accord que ce faisant il fit preuve de sagesse en cherchant à sauvegarder les valeurs morales des traditions mecquoises. Il a su quoi garder, préserver et quoi rejeter ou amender. C'est faire preuve de sagesse quand il faut réformer une société en profondeur en étant intraitable sur les problèmes éthiques et flexible et tolérant sur d'autres points mineurs. Il en est de même d'Omar quand il encouragea à sauvegarder les Diwans arabes ( poésie anté-islamiques).

Je me rappelle de ce penseur africain qui face à des Occidentaux, avait affirmé: certes, nous avons beaucoup à apprendre de l'Occident, nous autres Africains, la gestion de l'eau, des ressources de nos pays, la bonne gouvernance, mais l'Occident a aussi beaucoup à apprendre de l'Afrique. Nous autres traitons infiniment mieux nos vieux que l'Occident ne le fait. l'Occident doit aussi accepter d'apprendre de l'Afrique. Je l'ai trouvé génial dans sa réponse.

Sinon, nous sommes d'accord, et ceci contrairement à Graham, que la sagesse requiert assurément de l'intelligence.
Citation
Assia_ta a écrit:
Salam Bye

Merci pour cet article sur la sagesse et l'intelligence smiling smiley

Moi aussi, j'aurais tendance à ne faire qu'une distinction morale entre ces deux mots : l'intelligence, c'est le fait de pouvoir trouver une solution à tous types de problèmes, alors que la sagesse, c'est de parvenir à une fin morale pour chaque problème rencontre. C'est la sagesse, c'est de savoir comment agir en vue de faire le bien. Bien entendu, on peut être intelligent et ne pas être sage, avec pour preuves (extrêmes) les tyrans de l'Histoire. Mais être sage sans être intelligent... effectivement, ça me parait impossible. D'où un lien que l'on peut faire entre les deux.

En fait, ce qu'on entend communément par intelligence va plutôt dans le sens de la ruse. C'est-à-dire être capable de trouver les moyens les plus appropriés et qui coûtent le moins d'effort pour parvenir à une fin, n'importe laquelle. Quoique... l'intelligence est parfois vue, pour certains, à travers la capacité à pouvoir agir ou penser de façon "mauvaise", vicieuse, comme si arpenter les sentiers non-conformistes était signe d'élévation par rapport à la moyenne des gens.

Et ce qu'on entend communément par sagesse va dans le sens de la maturité. C'est-à-dire avoir assez de recul sur la vie pour pouvoir donner des "leçons" et lois générales à son propos et agir avec vertu dans celle-ci (et surtout aider les nouvelles générations à agir avec vertu, la sagesse étant vue comme une "qualité" propre aux vieillards).
Cette distinction entre intelligence et sagesse me fait penser à l'intelligence des jeunes, ou en tout cas à leur goût/"culot" pour essayer de raisonner sur des questions de la vie et pour apporter des solutions originales, voire pour, avec plaisir, "remettre les vieux et la tradition à leur place". Il y a une témérité là-dedans que les adultes peuvent considérer comme signe d'intelligence, mais pas de sagesse parce que ça va à l'encontre de ce qu'ils tiennent pour principe.
Du coup, la sagesse n'a-t-elle pas une base "conformiste"? Pas forcément dans un sens négatif, dans le sens de préservation d'une tradition considérée comme vraie et intouchable.



Modifié 2 fois. Dernière modification le 06/04/16 11:20 par Summertime..
A
6 avril 2016 11:42
Citation
Summertime. a écrit:
La société semble avoir opté pour l'intelligence. On n'admire plus le sage – plus comme les gens l'admiraient il y a deux mille ans. Maintenant on admire le génie. Parce qu'en fait notre distinction initiale a une réciproque assez brutale: de la même manière que l'on peut être intelligent sans être vraiment sage, on peut être sage sans être très intelligent. Cela ne paraît pas spécialement admirable. Cela nous donne James Bond, qui sait se débrouiller dans beaucoup de situations, mais a besoin de Q pour toutes celles impliquant des mathématiques.

Il me semble avoir lu le contraire. Au contraire, la figure du génie (comme une personne exceptionnelle qui avait, au cours de sa vie, révolutionné notre compréhension dans tel ou tel domaine) est en train de tomber, au profit de l'idée de l'égalité, selon laquelle tout le monde a un potentiel qu'il peut mettre en valeur, et au profit de l'idée selon laquelle le génie est le fruit de la situation d'une société à un moment donné.

Après, je ne sais pas si on parle du même "génie". Dans l'article que j'ai lu (issu du magazine Books), le génie était clairement différencié de l'intelligence. Déjà parce que les génies sont personnes extrêmement, extrêmement rares, mais en plus parce qu'il faut avoir concrétisé son potentiel pour que l'on puisse être qualifié de génie, et avoir bouleversé notre compréhension d'une science. Contrairement à l'intelligence, notamment ce qu'on mesure avec les tests de QI : tu peux très bien être "surdoué" et n'avoir rien accompli de ta vie.
v
6 avril 2016 11:46
Une anecdote qui va te plaire, si tu ne la connais pas, qui va dans ton sens:

Paul Valéry et Albert Einstein, qui s’admiraient mutuellement, se rencontrèrent à plusieurs reprises au cours des années 1920. Un jour, le penseur-poète, persuadé que le père de la théorie de la relativité produisait des idées à une cadence d’essuie-glaces, osa lui poser la question qui lui brûlait les lèvres depuis longtemps : « Lorsqu’une idée vous vient, comment faites-vous pour la recueillir ? Un carnet de notes, un bout de papier… ? » La réponse le déçut sans doute, le physicien se contentant de lancer : « Oh ! Une idée, vous savez, c’est si rare ! »

Citation
Assia_ta a écrit:
Il me semble avoir lu le contraire. Au contraire, la figure du génie (comme une personne exceptionnelle qui avait, au cours de sa vie, révolutionné notre compréhension dans tel ou tel domaine) est en train de tomber, au profit de l'idée de l'égalité, selon laquelle tout le monde a un potentiel qu'il peut mettre en valeur, et au profit de l'idée selon laquelle le génie est le fruit de la situation d'une société à un moment donné.

Après, je ne sais pas si on parle du même "génie". Dans l'article que j'ai lu (issu du magazine Books), le génie était clairement différencié de l'intelligence. Déjà parce que les génies sont personnes extrêmement, extrêmement rares, mais en plus parce qu'il faut avoir concrétisé son potentiel pour que l'on puisse être qualifié de génie, et avoir bouleversé notre compréhension d'une science. Contrairement à l'intelligence, notamment ce qu'on mesure avec les tests de QI : tu peux très bien être "surdoué" et n'avoir rien accompli de ta vie.
6 avril 2016 12:02
Toujours agréable de vous lire, Springtime et Assia_ta smiling smiley
6 avril 2016 12:03
Je te rejoins entièrement Summertime. Une personne intelligente n'a nullement besoin d'être sage. La sagesse quant à elle ne peut exister sans intelligence. Elle est à mon sens l'expression la plus aboutie d'un surconscient. Et puis “La connaissance sans la sagesse, est de l'intelligence artificielle....” Comment donc s’enorgueillir d'une supposée intelligence lorsque notre réflexion est dénouée de toute forme de sagesse... "Le sage, dit Kojève, est l'homme capable de répondre de manière compréhensible, voire satisfaisante, à toutes les questions qu'on peut lui poser au sujet de ses actes, et répondre de telle façon que l'ensemble de ses réponses forment un discours cohérent. Ou bien encore, ce qui revient au même : le Sage est l'homme pleinement et parfaitement conscient de soi" ... Maintenant pour accéder à cette sagesse, il faudrait dans un premier temps s'éloigner des mondanités qui pervertissent notre vision du monde et change l'ordre de nos priorités. Il est donc primordial de trouver un juste milieu entre la solitude et la socialisation... La sagesse islamique voilà le secret pour un cœur apaisé. Malheureusement, de nombreuses personnes banalisent ou ignorent la sagesse inhérente à cette croyance. Le prophète Muhammad 'Alayhi Salat wa Salam nous a donné un cadre pour que nous puissions vivre avec sagesse notre spiritualité... Encore faudrait-il que nous appliquions le quart de ses nobles conseils.
v
6 avril 2016 12:16
D'accord avec toi sur la sagesse muhamadienne, que nous avons réduite à sa plus simple expression en la dépouillant de ses joyaux pour ne laisser qu'un vêtement qui ne cache pas même notre âme nue.

Je n'avais pas pensé à consulter Kojève sur la sagesse. J'aurais pas pensé à lui. Je vais m'informer un peu plus, je te dirai ce que j'en pense.

Citation
Gozen a écrit:
Je te rejoins entièrement Summertime. Une personne intelligente n'a nullement besoin d'être sage. La sagesse quant à elle ne peut exister sans intelligence. Elle est à mon sens l'expression la plus aboutie d'un surconscient. Et puis “La connaissance sans la sagesse, est de l'intelligence artificielle....” Comment donc s’enorgueillir d'une supposée intelligence lorsque notre réflexion est dénouée de toute forme de sagesse... "Le sage, dit Kojève, est l'homme capable de répondre de manière compréhensible, voire satisfaisante, à toutes les questions qu'on peut lui poser au sujet de ses actes, et répondre de telle façon que l'ensemble de ses réponses forment un discours cohérent. Ou bien encore, ce qui revient au même : le Sage est l'homme pleinement et parfaitement conscient de soi" ... Maintenant pour accéder à cette sagesse, il faudrait dans un premier temps s'éloigner des mondanités qui pervertissent notre vision du monde et change l'ordre de nos priorités. Il est donc primordial de trouver un juste milieu entre la solitude et la socialisation... La sagesse islamique voilà le secret pour un cœur apaisé. Malheureusement, de nombreuses personnes banalisent ou ignorent la sagesse inhérente à cette croyance. Le prophète Muhammad 'Alayhi Salat wa Salam nous a donné un cadre pour que nous puissions vivre avec sagesse notre spiritualité... Encore faudrait-il que nous appliquions le quart de ses nobles conseils.



Modifié 1 fois. Dernière modification le 06/04/16 13:12 par Summertime..
Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com
Facebook