Permettez-moi de vous raconter l’histoire d’un homme qui se présente aux portes du paradis.
Toute sa vie fut consacrée au perfectionnement ; il n’y avait pas une âme sur Terre qui n’avait admiré son comportement exemplaire. Il était de ces grands érudits qui travaillaient à améliorer sans cesse leur savoir, leur compréhension du monde, et leur amour incommensurable pour leur Créateur.
Il s’exilait de longs mois pour prier, méditer, et s’imposait une rigueur implacable. Toute sa vie n’avait été consacrée qu’à l’élévation de son âme. Et son parcours était sans fautes.
Le gardien du paradis hésita un moment, et, en une fraction de seconde, notre grand homme se trouva propulsé sur Terre, dans le ventre d’une mère.
Les jeunes parents étaient bien fiers de l’esprit brillant de ce si jeune enfant, et se plaisaient triomphalement à prodiguer aux autres leurs bons conseils d’éducation.
Le tout jeune prodige, diablement attiré par cette force divine, se donna tout le mal nécessaire pour parfaire davantage son caractère. Mais Il ressentait au fond de lui un sentiment de profonde déception, sans qu’il ne puisse bien comprendre pourquoi. Ainsi, toute sa vie durant, il tenta de combler cette lourde sensation, qui lui imposait une droiture inébranlable.
Ainsi, dans sa barbe blanche de vieux sage mourant, il se présenta à nouveaux devant les portes du Paradis. Se souvenant soudain de toutes ses expériences, il ralentit le pas, et aperçu un vieux fou accourant se présenter avant lui.
Notre vieillard fut sidéré de constater que le gardien du paradis ouvrait si grandement la porte à son prédécesseur, à cet homme qu’il savait bien moins spirituel que lui.
Il se mit à genoux et pria : « mon Seigneur, mon Divin Créateur, que n’ai-je fais de mon vivant qui ne te soit dévoué ? J’ai sacrifié mon existence à me parfaire; j’ai offert aux nécessiteux plus que je ne me suis offert. Qu’ai-je donc fait pour te déplaire ? »
Il avala douloureusement le silence avant de comprendre ces mots :
« Tu as élevé ton être jusqu’à son firmament, en cela tu mérites le paradis. Mais tu ne portes sur ton dos que le poids de tes nobles efforts. Observe, le fou que tu vois comme inferieur à toi, comme il porte le poids de cents âmes qu’il a mené à moi. Non par de beaux discours, non par de longs manuscrits éveillés, mais par son dévouement plein et entier, de cet amour d’abord humain avant d’être divin. Celui qui m’aime à travers les autres, celui-là sait aimer. Il est bien plus aisé d’aimer un Dieu, que d’aimer l’humanité dans ses répugnantes faiblesses.
Saches que lorsque tu t’affligeais les jeûnes les plus sévères ; ce fou offrait milles gorgées de sourires aux cœurs les plus amers.
Alors que tu t’accablais de ton inflexible rigueur ; il osait se briser pour offrir un baiser.
Alors que tu t’esseulais pour prier des jours durant, il s’entourait de la terreur des mourants, de la candeur des amants, de la sagesse des enfants. «
Sur ces mots, le vieil homme fut à nouveau arraché du ventre d’une mère. -*-*-*-
je n'ai lu que la fin, mais c'est très beau et tellement vrai. Aucun chemin spirituel ne peut être complet sans tourner tout son être vers l'autre et s'ouvrir à l'amour et au dévouement. C'est un aspect qui est présent dans toutes les spiritualités.