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Une petite nouvelle à lire avec interet
L
Lin
17 mars 2004 17:19
Salam

Actuellement il a pas mal de petite histoires qui se postent ici et j'ai pensé à celle ci qui m'avait bcp touché il ya queqlue tps et m'avait fait même pleuré sad smileysad smileysad smileysad smiley mais je ne vous en dit pas plus winking smiley

Par la porte entrebâillée de la cuisine, Meriem jette des regards curieux et fait un compte rendu rapide à sa sœur Amina, assise tranquillement sur une chaise.
Elles sont trois : une vieille, très grosse, et deux femmes, plutôt jeunes.
— Arrête de regarder comme ça, dit Amina, elles vont te voir.
— Elles me tournent le dos... Mais dis-moi, ton amoureux, il ne devait pas venir ?
— Si, dit Amina.
— Alors pourquoi n’a-t-il pas accompagné sa mère et ses sœurs ? Ces femmes sont bien sa mère et ses sœurs ?
— Je pense, dit Amina, évasive.
— Comment cela, tu penses ? Tu ne les as jamais vues ?
— Arrête de dire des bêtises. Comment veux-tu que je les connaisse ? Je ne suis jamais allé chez Rachid ! Maintenant, cesse de regarder à la dérobée...
Mais Meriem continue à regarder. Elle pouffe même de rire.
— La vieille a eu des difficultés à s’asseoir sur le matelas. Elle est si grosse !
— Ne te moque pas des gens !
— On aurait dû prévoir pour elle une chaise... Mais on ne pouvait pas savoir que ta future belle-mère serait aussi grosse. Maman s’est assise à côté d’elle. On dirait qu’elle les connaît depuis longtemps.
— Si tu n’arrêtes pas, je vais te tirer par les cheveux.
Cette fois-ci, Meriem se retire et ferme doucement la porte de la cuisine. Elle jette un coup d’œil sur la table.
— Tout est prêt ? La limonade, les gâteaux... Il faudra réchauffer le lait et le café...
— Tout à l’heure, dit Amina, assieds-toi !
— Tu ne sembles pas très émue ! dit Meriem.
— Et pourquoi le serai-je ?
— Mais on vient demander ta main. Dans quelques minutes tu vas servir la limonade et les gâteaux à ces inconnues !
Amina hausse les épaules. Elle est toujours évasive. Plutôt que d’être émue, elle est inquiète, avant tout. Pourquoi Rachid n’a-t-il pas accompagné sa mère et ses sœurs, comme il le lui a dit ? A-t-il été retenu ? Ou alors quelque chose s’est passé ? Rachid a un peu annoncé la couleur en lui déclarant une fois que sa mère est une femme “un peu difficile”. Il lui a aussitôt expliqué que c’est une femme qui a beaucoup souffert, ayant perdu très tôt son mari, et qu’elle “couve” de façon exagérée ses enfants. Couve-t-elle ses enfants ou le couve-t-elle, lui ? Amina ne va sans doute pas tarder à avoir une réponse.
Meriem, qui s’est assise un moment, se lève.
— Où vas-tu ? demande Amina.
— Je jette un coup d’œil.
— Toi, ta curiosité va te perdre !
Mais la porte s’ouvre avant que Meriem ne l’atteigne. Sa mère, Djamila, entre dans la cuisine.
— Prépare-toi, dit-elle à Amina.
— Me préparer à quoi ? demande la jeune femme qui feint d’ignorer ce que sa mère lui demande.
— À te présenter devant ces femmes qui viennent te voir !
— Elle sert d’abord la limonade ? demande Meriem.
— Toi, occupe-toi de tes affaires, dit Amina.
— Tu apporteras la limonade dans cinq minutes, dit Djamila. Je retourne auprès d’elles.
Elle s’apprête à repartir mais elle revient.
— Un mot... La mère du garçon semble très exigeante.
— Exigeante ? dit Amina.
— Oui... Elle a des goûts... Elle porte des jugements.
— Et alors ?
— Alors, essaye de te tenir bien... Ne fais pas de gestes maladroits, surveille ton langage.
— Si j’ai bien compris, dit Amina, c’est un examen que je vais subir ?
Elle prend le plateau de limonade d’une main ferme et prend la direction du salon. Arrivée devant la porte, elle s’arrête soudain, apeurée. Sa mère ne vient-elle pas de lui dire que la mère de Rachid est “exigeante” ? Elle va sans doute la soumettre à un pénible examen, sans oublier ses deux filles qui vont la regarder sous toutes les coutures .
Rachid l’a un peu avertie en lui disant que sa mère est “difficile”, mais elle n’a pas tenu compte de cette remarque. L’essentiel n’est-il pas de se plaire mutuellement, voire de s’aimer ? La mère de son amie vient en dernier. Mais aujourd’hui cette mère est là, elle est venue accompagnée de ses filles, pour la juger.
Sa mère, Djamila l’aperçoit, et vient à son secours.
— Amina, mais entre donc... Ne sois pas intimidée.
Comme elle hésite toujours, elle se lève et la force à entrer.
— Je vais faire tomber le plateau, gémit Amina.
— Ne fais surtout pas ça, chuchote Djamila.
La jeune femme avance, les yeux baissés. Elle pose son plateau et demeure immobile. Elle sent les trois paires d’yeux se fixer sur elle et la pénétrer comme la pointe d’une vrille.
— Bouh, Amina, dit Djamila scandalisée, tu n’embrasses pas khalti Taos et ses deux charmantes filles, Saliha et Malika ?
(Elle se retourne vers les trois femmes), excusez-là, elle est très timide.
Avec grand-peine, Amina s’approche de Taos la première et l’embrasse puis elle embrasse ses deux filles.
— C’est elle, Amina, la fille que Rachid veut épouser ? fait Taos en la fixant des pieds à la tête. Mais elle est très maigre !
Venant d’une femme très grosse, la remarque est cocasse et Amina, retrouvant brusquement son assurance, sourit. Si ce n’était sa mère, elle aurait certainement pouffé.
— Oui, plutôt maigre, dit l’aînée des filles, Malika.
— Mais ça lui va bien, dit la seconde, Saliha.
Amina lui jette un regard furtif : celle-là paraît la moins antipathique. Maintenant qu’on l’a vue, on va peut-être la laisser partir. Et puis à quoi sert cette cérémonie ? Ne s’est-elle pas mise d’accord avec Rachid ? Avait-il besoin d’envoyer sa mère et ses sœurs pour se donner en spectacle à elle ?
— Viens t’asseoir auprès de moi? dit Taos
Elle ébranle ses kilos de chairs et de graisses pour lui faire une place. Amina, qui n’a pas du tout envie de se mettre avec cette femme, hésite. Sa mère l’encourage du regard. La mort dans l’âme, elle s’assoit donc. Elle doit se serrer, car la place entre Taos et sa fille Malika est plutôt étroite.
— Ainsi donc, c’est toi ! dit Taos.
Elle la tâte aux bras.
— Maigre, maigre ! répète-t-elle
Amina rougit violemment. Elle lui palpe les seins.
— Et de tout petits seins !
Amina, humiliée, s’apprête à se lever, mais son regard croise celui de sa mère : elle doit rester.
Elle reste donc. Et Taos, l’examinant attentivement, hoche la tête.
— Tu es maigre, mais très jolie ! Je dois admettre que mon fils a plutôt bon goût !
Elle se retourne vers Taos et sourit.
— De toutes façons, je n’ai rien à dire, puisque mon fils a choisi ! Je veux seulement que vous sachiez, toi surtout Amina, que Rachid est mon garçon unique et que toute ma vie je me suis sacrifiée pour lui, pour l’élever après la mort de son père, lui payer ses études. Je tiens à lui plus qu’à la prunelle de mes yeux et il tient à moi. Voilà, c’est la seule chose que j’avais à dire.
C’est la règle du jeu.

......

la suite bientôt

La vie est comme un arc-en-ciel: il faut de la pluie et du soleil pour en voir les couleurs.
m
17 mars 2004 17:28
Wouaw c'est trop!!
Vite la suite !!! hihi smiling smiley
Bisous à toi!!!

Missbizou
L
Lin
17 mars 2004 17:44
.....

La suite


Elle sourit encore et regarde Amina.
— Tu es d’accord avec moi ?
Mais Amina abasourdie par le flot de paroles, ne répond pas. Sa mère mère répond à sa place :
— Oui, brave femme.
Dès que Djamila ferme la porte derrière les trois femmes elle s’exclame :
— Cette femme n’est pas normale !
Sa fille cadette Meriem qui, de la cuisine, a entendu la conversation, pouffe de rire et dit à sa sœur :
— Je l’ai vue assise à côté d’elle. On dirait une souris avec un éléphant.
L’image fait rire Amina.
— Tout cela est secondaire, dit-elle, cette femme et ses filles n’avaient même pas besoin de venir me voir puisque Rachid et moi avons déjà tranché !
— Oui, mais tu l’as entendue parler de ton Rachid ? Elle a dit qu’elle tient à lui plus qu’à la prunelle de ses yeux et qu’il tient à elle !
Amina sourit.
— Quelle est la femme qui ne tient pas à son fils, maman ? Surtout si c’est le seul garçon qu’elle a. Et toi, tu ne tiens pas à Noureddine ? Tu ne tiens pas à Abdenour ?
— Bien sûr, dit Djamila, mais ne je ne le crie pas sur tous les toits, je ne pose pas cela en règle du jeu ! Et puis qu’est-ce que cela peut signifier : c’est la règle du jeu ? Elle n’a énoncé aucune règle, à moins que...
Amina secoue la tête.
— Maman, laisse, je t’ai dit que ce n’est pas important...
— Quoi ? Mais tu étais toi-même gênée... Si je ne t’avais pas foudroyée du regard, tu serais partie !
— Oui, reconnaît Amina... Je n’ai pas aimé qu’elle me touche...
Meriem pouffe encore :
- Elle t’a palpée comme on palpe une vache qu’on veut acheter ! D’ailleurs elle a dit à plusieurs reprises que tu es trop maigre !
Amina hausse les épaules.
— C’est vrai que cette femme et ses filles sont bizarres mais, une fois de plus, la décision nous revient, à Rachid et à moi !
— Et apparemment, la décision est déjà prise.
Amina sourit.
— Tu verras, maman, Rachid est un garçon formidable, doux, généreux...
— Mais c’est avec sa mère et ses sœurs que tu vivras !
— J’habiterai dans une villa maman... Une villa à trois étages. Si je ne m’entends pas avec la mère et les sœurs de Rachid, je pourrai toujours faire ménage à part !
— Ton Rachid te l’a dit ?
— Il n’a pas besoin de me le dire, maman. C’est une chose qui va de soi !
— Avant de t’engager, dit Djamila, qui paraît plutôt sceptique, il vaut mieux clarifier les choses avec ce Rachid. Moi, cette femme et ses filles ne m’inspirent pas confiance.
Quand elle se retrouve seule, Amina réfléchit à ce que sa mère lui a dit. La mère de Rachid est, on ne peut dire moins, étrange. Il y a cette façon de la dévisager et de la palper comme on palpe du bétail, mais il y a surtout ces propos mystérieux : “Je tiens à mon fils plus qu’à la prunelle de mes yeux, il tient à moi... C’est la règle du jeu !”. Elle n’a pas énoncé la règle mais il n’est pas difficile de la deviner : Je ne te laisserai pas prendre mon fils... Mon fils ne t’appartiendra pas puisqu’il est à moi !
Paroles de femme jalouse et possessive ? Menaces ? Il y a les deux à la fois. Rachid, une fois, distraitement, lui a dit que sa mère est une femme “difficile”, mais elle sait aussi qu’il l’aime et qu’il veut l’épouser. Demain, elle lui téléphonera au travail et il passera la prendre au lycée où elle travaille. Ils mettront certaines choses au clair...
Il savait ce que sa mère pensait.
Taos n’a pas tort quand elle dit qu’elle a peiné pour élever son fils et ses deux filles. Lorsque son mari a péri, il y a une trentaine d’années, dans un accident de la circulation, elle avait trente-cinq ans et elle s’est retrouvée seule avec ses trois enfants : Malika qui avait dix ans, Saliha huit ans et Rachid, le benjamin, seulement cinq ans.
Le défunt avait laissé plusieurs commerces, mais comme il était associé à ses frères, ces derniers s’étaient emparés de tous les biens, ne laissant pas de miettes à la veuve et aux orphelins.
Mais Taos a bien su gérer le peu de biens qu’elle put récupérer et elle éleva dignement ses enfants. Elle économisait sur tout, amassant de l’argent pour Rachid. Après de brillantes études, celui-ci embrassa une carrière juridique et, tout en tenant un cabinet d’avocat, il fit du commerce. Des deux filles, seule la cadette, Saliha, avait fait des études. L’aînée, Malika, sortie de l’école très tôt, avait tenté diverses formations avant de se fixer sur la couture. Les deux filles ne se sont pas mariées et vivent, donc, avec leur mère et leur frère. D’ailleurs, Taos aurait eu du mal à se séparer d’elles. Mère possessive à l’excès, Taos entoure ses enfants, et plus particulièrement Rachid, d’une affection sans limite. À trente-cinq ans, le jeune homme doit consulter sa mère sur tout : de la couleur de ses costumes et de ses cravates, aux affaires qu’il traite en tant qu’avocat. Jusqu’à un âge avancé, il n’avait pas fréquenté de filles. C’est par hasard qu’il a rencontré, il y a près de six mois, Amina. La jeune femme sortait du lycée où elle travaillait et il avait failli la renverser.
En arrivant, il s’était excusé et, pour se rattraper, il lui avait proposé de la ramener chez elle. Il avait bavardé avec elle — c’était la première fois qu’il le faisait — et il s’était épris d’elle. Elle est très jolie, avec ses grands cheveux noirs et ses yeux couleur miel. Lui aussi est beau, avec sa grande taille de sportif, ses yeux noirs et son teint légèrement halé. Mais plus que le physique, c’est sa douceur et son intelligence qui ont séduit Amina. Ils se sont revus quelques jours plus tard, puis ils sont sortis ensemble. Si ça n’avait tenu qu’à lui, Rachid aurait tout de suite demandé la main de Amina, mais il lui fallait en informer sa mère et surtout obtenir son accord. Voilà quelques années que Taos voulait le marier, mais il a fallu qu’il finisse ses études — il a fait une licence puis un magistère de droit — et qu’il s’installe. Elle lui a aussi proposé quelques filles de leur entourage, mais comme il ne semblait pas enthousiaste, elle a fini par lui dire : “Choisis une fille et montre la moi, j’irai demander sa main pour toi !” Cette proposition est, on ne peut plus libérale, mais Rachid n’est pas dupe : sa mère n’acceptera qu’une fille qui lui conviendra.
Il a mis plus d’un mois avant de lui parler de Amina. Elle a été surprise qu’il ait une liaison et qu’il lui en parle, lui d’habitude si discret.
— Cela fait longtemps que tu fréquentes cette fille ? Où l’as-tu connue ? C’est elle ou c’est toi qui l’a abordée ?
C’était trop de questions à la fois. Il lui a tout raconté et Taos a regardé ses filles.
— Voilà comment on met le grappin sur les hommes !
Et elle a dit à Rachid :
— Mon fils, réfléchis bien avant de t’engager !
— Tu la verras, a-t-il dit.
— Moi ? s’est-elle écriée. Tu as fait ton choix, je n’ai pas à me mêler de ta vie privée !
Rachid savait très bien ce que sa mère pensait, mais il n’a pas voulu la contrarier, il a préféré attendre encore un peu.
Un mois passe sans que Taos ne lui reparle de Amina. Il en parle de nouveau et lui demande d’aller la voir...
Djamila s’attendait à ce que sa fille accepte la demande, elle n’en exprime pas moins ses réserves.
- Prends encore le temps de réfléchir, lui dit-elle.
- Rachid est un garçon merveilleux, maman.
- Tu me l’as déjà dit, dit Djamila. Mais il y a sa mère et ses sœurs. Surtout sa mère !
- Il m’a dit que je ne suis pas obligée de vivre avec elle. Il y a trois étages dans la maison !
- Tu vivras quand même dans leur entourage.
- Maman, Rachid me plaît !
Djamila sourit. Voilà un argument convaincant contre lequel on ne peut rien... Le père de Amina, Ali, ne s’oppose pas, lui non plus, au choix de sa fille. Après tout, elle a vingt-sept ans, elle doit savoir où elle met les pieds.
Rachid est, bien sûr, heureux. Déjà, il commence à faire des projets avec Amina : ils se marieront l’été prochain et ils passeront leur lune de miel dans un complexe touristique, sur la côte Ouest qu’il aime tant. Si Amina veut bien, ils vivront dans un premier temps en communauté, avec sa mère et ses sœurs.
- C’est d’accord, dit Amina.
- Bien sûr, s’empresse d’ajouter le jeune homme ravi. S’il y a des problèmes, nous emménagerons dans un étage.
J’espère qu’il n’y aura pas de problèmes. Tu verras ! Ma mère, en dépit des apparences, est une brave femme. Mes sœurs aussi !
Il a parlé sur un ton qu’il veut convaincant. En réalité, il est lui-même inquiet. Il va falloir annoncer à sa mère et à ses sœurs qu’il va épouser Amina...
Taos n’est pas dans son meilleur jour et Rachid hésite à aborder le sujet avec elle.
- Tu as l’air énervée, lui dit-il. Qu’est-ce qui t’a mise de mauvaise humeur ?
- Rien, dit-elle. Ça va me passer. Tu veux un café ?
- Pourquoi pas ? dit-il.
Peut-être qu’elle acceptera d’en prendre un avec lui et qu’ils pourront discuter.
Elle pose sur la table la cafetière et une tasse.
- Tu ne veux pas en prendre un avec moi ? dit-il.
- Ça va m’énerver encore plus, dit-elle. Je te laisse.
Elle s’en va. Sa sœur Saliha entre dans la cuisine.
- Bonsoir, Rachid.
- Tu es rentrée ? dit-il.
- Oui, dit-elle, je suis allée voir une copine malade.
- Elle va mieux, j’espère. Mais dis-moi, qu’est-ce qui a énervé notre mère ?
- Je ne sais pas, dit la jeune femme. Je l’ai trouvée comme ça, quand je suis rentrée. Je vais aller la voir.
- Attends, dit-il. J’ai à te parler.
De ses deux sœurs, Saliha est celle avec laquelle il s’entend le mieux. Il lui apprend sa décision d’épouser Amina.
- Parles-en à notre mère, dit-il.
- Tu ne veux pas qu’on attende un peu, qu’elle soit moins énervée ?
- Non, dis-le lui maintenant. De toute façon, je veux juste l’informer. Ma décision et déjà prise.
Saliha regarde son frère avec surprise. Il n’a pas l’habitude de s’affirmer avec autant de détermination.
- La fille accepte donc la demande ? dit la jeune femme.
- Oui !
- Et vous pensez vous marier bientôt ?
- En été, dans quatre ou cinq mois, si tout va bien. Bien sûr, mère pourra donner son avis sur la date.
- Je le lui dirai, dit Saliha.
Elle est encore toute retournée : Rachid prend des décisions, Rachid ne consulte plus sa mère...
Taos éclate : - Quoi ! Il a décidé d’épouser ce sac d’os, sans m’en informer ?
Je lui ai pourtant dit qu’il devait réfléchir !
- Il a réfléchi, dit Saliha, et il a pris sa décision. D’ailleurs, toi-même tu le lui as dit, le jour où nous sommes allés voir la fille : “décide toi-même, je ne me mêle pas de ta vie privée.”
Taos la foudroie du regard.
- Je n’ai pas dit ça.
Elle prend Malika, sa deuxième fille, à témoin.
- J’ai dit cela ? Dis-moi, j’ai dit cela ?
- Je ne m’en rappelle plus, dit la jeune femme apeurée.
- Tu ne t’en rappelles pas ! Mais vous oubliez toutes les deux que je suis sa mère ?
Qu’il est mon fils unique et que j’ai peiné pour l’élever ? Il n’a pas le droit de me faire un coup pareil !
Saliha tente encore de défendre son frère.
- Il t’a mise au courant dès le départ, tu as même été voir la fille.
Mais Taos est hors d’elle.
- Ce n’est pas à lui de se choisir une femme... C’est un droit qui me revient. Ce sont les mères qui marient leur fils !
- Et que dois-je lui dire ? dit Saliha timidement.
- Dis-lui que je suis contre ce mariage !
Rachid, dans la cuisine, attend toujours. Il a pris trois ou quatre tasses de café et il a allumé une cigarette. Il a entendu les éclats de voix de sa mère, mais comme elle se trouve à l’étage, il n’a pas compris ce qu’elle disait. Mais il n’a pas besoin d’être sorcier pour comprendre...


........

la suite à venir

La vie est comme un arc-en-ciel: il faut de la pluie et du soleil pour en voir les couleurs.
j
jam
17 mars 2004 17:56
Elle a du caractère la mère........

La suite........................
k
17 mars 2004 18:08
Mmm intéressant ... la suite stp
L
Lin
17 mars 2004 18:14
...... winking smiley winking smiley winking smiley

Saliha finit par revenir.
- Le café doit être froid, dit-elle, tu veux que je le réchauffe ?
- Non, dit-il, j’en ai assez pris.
Il repousse sa tasse.
- Je vais débarrasser, dit Saliha.
- Alors, tu lui en as parlé ?
- Oui, dit la jeune femme, en évitant de le regarder.
- Et alors ? dit-il.
Saliha repose la cafetière.
- Tu sais, Rachid, tu dois lui donner un peu de temps.
- Du temps ? Mais pourquoi faire ?
- Pour… pour qu’elle réalise que tu vas te marier !
- Mais elle a été suffisamment informée... Elle a même été voir la fille.
- Oui, dit Saliha, mais le fait que ce ne soit pas elle qui te l’ait choisie l’irrite.
Il fronce les sourcils.
- Elle a bien dit l’autre jour que je pouvais décider à ma guise, qu’elle ne voulait pas se mêler de ma vie privée !
- Oui... mais elle est très déçue, tu sais.
- Autrement dit, elle ne veut pas d’Amina ?
Saliha préfère baisser les yeux. Rachid frappe du point sur la table, manquant de renverser la cafetière et la tasse.
- Mais moi, je veux Amina et je l’épouserai !
Il se lève.
- Où vas-tu ? demande Saliha terrorisée.
- Lui dire ce que je pense !
La jeune femme le suit, le suppliant de ne pas se mettre en colère.
Il ouvre la porte de la chambre où se trouve sa mère et lui dit :
- J’ai décidé d’épouser Amina !
Taos le regarde, surprise par cette intrusion. Elle réagit aussitôt :
- Et moi, je ne veux pas que tu l’épouses !
- Je l’épouserai, avec ou sans ton consentement !
- Alors, emmène-la ailleurs, je ne veux pas d’elle chez moi !
Et elle éclate en sanglots.
- Je n’aurais jamais pensé, un jour, que tu allais me traiter de la sorte !
Il est monté directement dans sa chambre et, vers vingt heures, quand sa sœur Saliha vient l’appeler pour le dîner, il refuse de descendre. La jeune femme insiste.
- Je n’ai pas faim, dit-il.
- Maman veut que tu descendes.
- Eh bien, dis-lui que moi je ne veux pas.
Saliha retourne à la cuisine.
- Il est encore en colère, dit-elle à sa mère, tu devrais monter le voir.
- Quoi ! s’écrie Taos, il m’a humiliée et tu voudrais que j’aille encore le prier de descendre ?
- Ce n’est pas logique, dit la deuxième sœur, Malika, c’est plutôt à lui de faire des excuses.
Malika, il n’y a pas de doute, est du côté de sa mère, Saliha, elle, est plutôt neutre, et surtout, elle ne veut pas envenimer les choses.
- Maman…, commence-t-elle.
- En voilà assez, dit Taos avec colère. S’il ne veut pas descendre qu’il reste là où il est !
Le dîner est lugubre. C’est la première fois qu’on est à table sans Rachid. Même Taos, pourtant toujours en colère, ressent son absence. D’ailleurs elle mange très vite et se retire, laissant la vaisselle aux filles.
- C’est malheureux, dit Saliha.
- Oui, dit Malika. C’est malheureux que Rachid se comporte de cette façon avec maman. Il oublie tout le bien qu’elle lui a fait.
- Rachid a quand même le droit de choisir son épouse.
- Non, ce droit revient à maman.
Saliha regarde sa sœur. Celle-ci s’empresse aussi d’ajouter :
- Oui, je sais, tu vas dire que je suis vieux jeu, que de nos jours, les garçons épousent les filles qu’ils veulent... Je connais tes idées sur ce sujet. Mais Rachid n’est pas un garçon comme les autres. C’est le garçon unique, maman a peiné pour le faire grandir et lui assurer des études... Il n’a pas le droit d’agir à sa guise.
- Tu penses comme maman ?
- Oui, dit Malika. Et je le répète : maman a raison.
Dans sa chambre, Rachid est en proie à une grande agitation.
Il savait sa mère possessive, mais il ne croyait pas qu’elle allait se montrer si dure avec lui. Il sait bien qu’elle l’aime et qu’elle donnerait sa vie pour lui, mais cette fois-ci, elle a été trop loin. Elle n’a pas le droit de prendre une décision qui engage son avenir !
Il est vrai qu’il s’est montré violent avec elle, mais elle lui a répondu sur le même ton. Elle a été jusqu’à l’inviter à quitter la maison.
“Emmène ta femme ailleurs”, lui a-t-elle dit, je ne veux pas d’elle chez moi !
Chez elle ! Il a toujours cru qu’il était, lui aussi, chez lui.
Il a toujours pensé qu’il vivrait avec sa mère et ses sœurs. Même si elles sont difficiles, il y a toujours moyen de trouver un terrain d’entente. Et Amina, il le sait, n’est pas femme à provoquer des disputes.
Il se met de nouveau en colère, puis, se rappelant encore les durs propos de sa mère, il décide de la prendre au mot : il s’en ira. Il habitera provisoirement dans son cabinet d’avocat où il a d’ailleurs aménagé une petite chambre pour manger et se reposer quand il n’a pas le temps de rentrer chez lui, puis il cherchera un appartement à louer. Puisque sa mère ne veut pas d’Amina, il ne restera pas, lui non plus, dans cette maison devenue hostile.
Taos, elle aussi, est dans une grande excitation. Elle ne regrette pas les durs propos qu’elle a proférés à l’encontre de son fils : peut-être qu’il va comprendre qu’elle ne veut pas de cette fille et qu’il n’en parlera plus. S’il veut se marier, elle lui choisira elle-même, la femme de sa vie. Et ce ne sera pas, comme cette Amina qu’elle a vue, contre son gré, un sac d’os ! Ce sera non seulement une jolie femme mais une femme obéissante, qui tiendra son ménage et lui donnera de beaux enfants !
Taos s’est levée de bonne heure, comme à l’accoutumée, pour préparer le petit-déjeuner.
Aujourd’hui ses trois enfants doivent sortir assez tôt : Rachid, pour aller au tribunal où il doit plaider une affaire, Malika pour faire un essai de recrutement dans un atelier de couture et Saliha pour rencontrer un promoteur qui accepte de l’inscrire à un sujet de magistère. Après une rupture de quelques années avec les études et quelques essais infructueux de se faire recruter, la jeune femme a décidé de reprendre ses études. L’odeur du café emplit bientôt la cuisine. Taos a oublié ce qui s’est passé la veille avec Rachid et elle est persuadée, connaissant son fils, qu’il va renoncer à son projet et même lui présenter des excuses. Si elle refuse qu’il épouse Amina ce n’est pas parce que cette fille est mauvaise : elle veut seulement éviter à son fils de faire un choix qu’il pourrait regretter. Quand on veut se marier, il faut prendre le temps de choisir une femme, d’enquêter même sur elle, et, pour éviter les mauvaises surprises, il n’y a rien de mieux qu’une mère pour faire les démarches. Malika descend la première, suivie peu après de Saliha.
— Et votre frère ? demande Taos.
— Il s’est levé, dit Saliha, il fait sa toilette.
— Très bien, nous allons donc l’attendre.
Mais l’attente se prolonge et Taos commence à perdre patience.
— Que fait-il, celui-là ?
— Je monte le chercher, dit Saliha.
Elle sort de la cuisine et, quelques minutes après, elle revient, très pâle.
— Maman, gémit-elle.
— Quoi ! s’écrie Taos, Rachid est malade ? Il lui est arrivé quelque chose ?
Elle se lève déjà, prête à se précipiter à l’étage.
— Non, dit Saliha, les larmes aux yeux, il s’apprête à partir !
— À partir ? Sans prendre le petit-déjeuner ?
Saliha se met à pleurer. Taos comprend soudain la signification de “il s’apprête à partir”.
— Mon Dieu, gémit-elle.
Et elle se précipite dans le couloir, suivie par ses deux filles. Rachid est en train d’ouvrir la porte, une valise à la main et un cabas à l’épaule.
— Rachid ! s’écrie Taos, Rachid que fais-tu ?
— Je m’en vais, dit le jeune homme en évitant de la regarder
— Tu t’en vas ? Mais pour aller où ? Et puis, pourquoi pars-tu ?
Il se retourne vers sa mère et la fustige du regard.
— C’est toi qui me chasses !
— Moi ? Moi ? gémit Taos, moi chasser mon fils unique, la prunelle de mes yeux ?
— Tu me l’as dit, hier : “Si tu veux épouser cette fille, emmène-là ailleurs, je ne veux pas d’elle chez moi !”
— Je ne savais pas ce que je disais, pleure Taos, si tu t’en vas, je mourrai !
Elle va vers lui, terrassée par l’émotion, éprouvant des difficultés à ébranler son énorme poids. Rachid a brusquement pitié d’elle. Il l’accueille dans ses bras.
— Je ne veux pas te quitter !
Ses sœurs, derrière, sanglotent.
— Moi non plus, leur dit-il, je ne veux pas vous laisser.
— Epouse cette fille, lance Taos, épouse-là. Fais-la venir ici dès demain si tu veux, mais ne nous prive pas de ta présence.
Elle l’enlace, le couvrant de baisers, le mouillant de ses larmes.
— Tu me laisses vraiment l’épouser ? demande encore Rachid, incrédule.
— Oui, dit Taos
Rachid s’apprêtait à partir le cœur léger lorsque sa mère est revenue à la raison : elle accepte Amina. Il sait qu’il a usé d’une sorte de chantage pour l’amener à changer d’avis, mais avait-il un autre moyen pour la convaincre ?
Taos a tout accepté : elle va retourner de nouveau chez Amina, si son fils le souhaite, pour faire une demande officielle. Il fixera lui-même la date du mariage. Elle accepte de vivre en communauté avec sa future belle-fille. Et, pour lui enlever tout doute sur ses intentions, elle a ajouté : “Je ferai tout pour te garder ! Tout !” Le jeune homme est pressé d’annoncer la bonne nouvelle à son amie, mais comme il doit plaider ce matin au tribunal, il est obligé de faire preuve de patience.
À midi, il est devant le portail du lycée où travaille la jeune femme. Il sait que, ce jour-là, elle est libre l’après-midi. Amina passe devant sa voiture sans le voir. Il se met à lui klaxonner. Elle se retourne et l’aperçoit. Il lui fait un signe de la main.
Elle va vers lui.
— Je ne savais pas que tu venais, lui dit-elle. Tu aurais dû m’appeler.
— C’est une surprise, lui dit-il en souriant. Tu montes ?
— Pour aller où ?
— Je t’emmène déjeuner. Je sais : tu n’as pas informé ta mère, tu l’appelleras du restaurant. Tu montes ?
Elle monte. Elle est frappée par la bonne humeur de Rachid qui se met aussitôt à plaisanter.
— Tu as gagné ton affaire ? finit-elle par lui demander.
— Oui, dit Rachid. Pourquoi me poses-tu cette question ?
— Parce que tu es joyeux !
— Ce n’est pas cela qui me rend joyeux !
— Alors, dis-moi…
- Tout à l’heure, au restaurant.
Elle est impatiente de savoir, mais il ne veut rien dire. Au restaurant, ils prennent une table isolée. Rachid appelle le garçon qui prend commande.
— Alors, demande Amina, tu me dis ce qui te rend heureux ?
— Oui, dit-il, avec un grand sourire. Nous allons nous marier !
— Mais, je sais déjà cela !
— Eh bien, maintenant, c’est officiel. Nous allons, si tu veux, fixer la date.
— La date ? Mais c’est encore tôt !
— Quoi ? C’est toi qui dis cela, alors que je me suis disputé avec ma mère pour t’imposer ?
Amina le regarde, surprise. Rachid, qui s’est rendu compte de sa bourde, essaye de se rattraper.
— Je veux parler de la date du mariage, elle veut la retarder pour mieux préparer la fête.
Amina ne répond pas. Elle se répète les propos de Rachid : “Je me suis disputé avec ma mère pour t’imposer.“ Il n’a pas dit : “Pour imposer la date du mariage…”
— À quoi penses-tu ? demande Rachid.
— À ce que tu viens de dire. Tu t’es disputé à mon propos avec ta mère ? Elle ne veut pas de moi ?
— Non, non, bien sûr.
Mais il ne veut pas lui mentir.
— Elle aurait aimé me choisir elle-même une épouse. Mais elle a vite compris que je tiens à toi.
— Rachid !
— Ne dis rien. Aujourd’hui, je suis heureux. Nous allons manger et, en même temps, faire des projets. Nous ne sortirons pas d’ici avant d’avoir arrêté la date du mariage.
Elle secoue la tête.
— S’il te plaît, supplie-t-il, je t’aime.
Elle sourit.
— D’accord ! dit-elle.
Amina ne dit rien à sa mère des réticences de Taos, mais Djamila la met de nouveau en garde.
— Tu auras des difficultés à vivre avec cette femme.
— Rachid a promis que nous emménagerons dans un étage de la maison au moindre problème.
Djamila donne donc son consentement, ainsi que Ali, le père d’Amina.
Les jours suivants, Taos et ses filles viennent de nouveau voir Amina. Mais cette fois-ci, Rachid les a accompagnées.
— On vient pour faire la demande officielle et procéder au “qataâ alchart”, au trousseau dont il faut doter la future mariée.
— Nous ne demandons rien, dit Djamila.
— Il faut demander, dit Taos. Nous sommes en mesure de combler tous vos désirs !
— L’essentiel est que notre fille soit heureuse, dit Djamila.
— Je te dis qu’on peut combler tous vos désirs. Nous en avons les moyens.
Taos a élevé la voix, elle est prête à se mettre en colère.
— Mère, dit Rachid sévèrement.
— Excusez-moi, dit Taos. mais je trouve que le “qataa al chart” doit se faire dans les règles de l’art.
— Alors, dit Djamila, apportez-lui ce que vous jugez utile.
— A la bonne heure, dit Rachid. (Et à sa mère), ne parlons plus du “qataa al chart”. On parle de la date du mariage que l’on fixe au début du mois de juillet. On prend des boissons et des gâteaux et on se sépare en bons amis.
Djamila, elle, est contente.
— Je crois que Rachid a commencé à dompter sa mère. Elle n’a plus sa superbe.
— En fait, c’est une brave femme, dit Amina, on ne peut pas lui reprocher d’aimer son fils.
— Tu as raison, dit Djamila.
Les jours suivants, elle sort avec Rachid. Celui-ci, après en avoir discuté avec sa mère, décide que la jeune femme achètera elle-même son trousseau. Elle n’aura qu’à choisir, il payera.
— J‘ai déjà mon trousseau dit Amina, n‘oublie pas que je travaille depuis plusieurs années.
— Ma mère se sentirait humiliée si on ne t’achetait rien !
Elle achète donc. Les jours passent et la date du mariage approche. Depuis la grande dispute qu’elle a eue avec son fils, Taos ne s’est plus opposée aux projets du jeune homme. Mais si devant lui, elle ne fait aucune remarque désobligeante sur Amina, elle ne manque pas de la dénigrer quand elle se retrouve seule avec ses filles.
— Il ne faut pas laisser cette étrangère nous enlever notre Rachid, leur dit-elle. Une fois qu’elle sera à la maison, il faut la surveiller étroitement.
Malika se met de la partie. Seule Saliha essaye de prendre la défense d’Amina qu’elle trouve très gentille.
— Elle prend ton frère et tu la trouves gentille ?
— Rachid l’a choisie !
— Elle lui a plutôt mis le grappin dessus ! Mais elle ne perd rien pour attendre.
Ce discours surprend Saliha. Sa mère serait-elle hypocrite ?
— Ce n’est pas ce que tu dis à Rachid et à Amina !
— Tu voudrais que je leur dise le fond de ma pensée ? Pour que Rachid quitte la maison et aille vivre avec cette chipie ? Non, non, je ne suis pas aussi bête que cela. 2 2Saliha soupire.
— Nous allons vers de graves difficultés !
— Non, je pense débarrasser au plus vite mon fils de cette vermine. Il comprendra de lui-même qu’elle ne vaut rien, il la répudiera et me demandera de lui chercher une épouse.
— Mon Dieu, mon Dieu, gémit Saliha, protège-nous !
Les noces sont célébrées comme prévu, au début du mois de juillet. La villa étant trop étroite pour contenir la foule des invités, Rachid a loué une grande salle des fêtes.
Plus d’un quintal de couscous a été préparé et pas moins de six moutons ont été égorgés. Des centaines de bouteilles de limonade et des centaines de gâteaux aux amandes sont proposés aux convives. Après le repas qui s’est prolongé jusqu’à quatorze heures, on procède à la “tesdira” ou exposition des toilettes de la mariée.
Amina est ravissante dans toutes les robes qu’elle revêt : “fergani”, le velours brodé au fil d’or, le karakou, la veste et le pantalon traditionnels aux riches broderies, la robe kabyle aux couleurs chatoyantes et, enfin, la robe blanche, une merveille, que Rachid a fait venir de paris. Tout le monde se presse autour de la mariée pour se faire filmer et photographier, à l’exception de Taos et de ses filles qui s’isolent dans un coin. Rachid doit aller vers elles et les supplier de monter sur l’estrade de la mariée.
- Je ne peux pas, dit Taos, je suis trop grosse.
- Tu exagères, dit Rachid, et puis, je te soutiendrai !
- Je ne peux pas !
- Et moi, je veux que tu viennes !
Il l’oblige à se lever et à l’accompagner. Les filles les suivent.
- Voilà, dit rachid, on va prendre une photo avec Amina.
Taos s’efforce de sourire. Dès que les photos sont prises, elle s’empresse, suivie de ses filles, de regagner sa place. Rachid, lui, retourne auprès de Amina.
- Ta mère semble bouder, dit la jeune mariée.
- Pas du tout, dit Rachid, elle est seulement émue.
La musique, transmise par une puissante chaîne stéréo, retentit. Des jeunes filles se lèvent et commencent à danser.
La fête se prolonge jusqu’à vingt-deux heures, puis les invités commencent à partir.
Pour la nuit, Rachid a retenu une chambre dans un grand hôtel. Il va conduire lui-même, dans sa voiture sa femme. Il va prendre congé de sa mère, mais celle-ci s’écrie :
- Je viens avec toi !
- Quoi ? dit Rachid consterné, j’ai chargé un ami de te reconduire, ainsi que les filles à la maison.
- Moi, je viens avec toi, dit Taos.
- Voyons, maman…
- Si tu ne me laisses pas aller avec toi, je vais me rouler ici et pleurer !
Elle commence déjà à élever la voix.
- Je n’ai retenu qu’une chambre, dit Rachid.
- Je dormirai dans les couloirs, devant ta porte, devant ton lit, s’il le faut.
Rachid se gratte la tête. Il va voir Amina et lui fait part de l’exigence de sa mère. La jeune mariée, d’abord surprise, finit par dire :
- Laisse la venir, puisqu’on ne peut faire autrement.
Taos s’installe donc sur la banquette arrière de la voiture et Rachid démarre. Il ne dit rien, mais il ne cache pas son irritation. Taos, elle non plus, ne dit rien, mais elle est satisfaite : elle ne laissera pas son fils seul avec cette étrangère.
A l’hôtel, heureusement, on lui trouve une chambre. A deux en trois reprises elle vient frapper à la porte des nouveaux mariés pour demander des “nouvelles de son fils”. “Va dormir ! lui dit à chaque fois Rachid, en colère. Tu m’ennuies”. Le lendemain, le couple se lève de bonne heure. Après un petit-déjeuner avalé à la va-vite, Rachid et Amina montent dans la voiture : direction le complexe touristique où les jeunes mariés ont prévu de passer leur lune de miel. Si Taos venait à l’apprendre, elle demanderait certainement à les accompagner !
Rachid regarde en arrière.
— Elle ne nous suit pas !
Amina rit.
— Comment veux-tu qu’elle nous suive ? Elle n’a pas de voiture et je ne pense pas qu’à l’hôtel, elle trouve quelqu’un qui accepte de la conduire.
Rachid rit également.
— Elle pourrait corrompre quelque maître d’hôtel.
— J’espère qu’on va la reconduire à la maison, dit Amina.
— Bien sûr, j’ai chargé un chauffeur de l’hôtel de le faire.
Il se penche vers elle et l’embrasse.
— Ne parlons plus de ma mère, ne pensons qu’à notre lune de miel !
Le centre touristique est très confortable et la plage est merveilleuse. Le couple va passer un mois de vacances délicieux, bercé par les vagues, la tête pleine de rêves.
Mais les rêves ont une fin et la veille de leur retour, Amina et Rachid, tout en arpentant la plage, à la nuit tombée, parlent de leurs prochaines vacances.
— Nous reviendrons ici, dit Amina.
— Ou alors nous irons à l’est du pays. Là-bas aussi, il y a de belles plages !
— Et si on essayait la montagne ?
— Nous avons le temps d’y penser.
Il ne dit pas à Amina que, pour le moment, il pense à sa mère et à l’accueil qu’elle va leur réserver. Ne l’ont-ils pas abandonnée à l’hôtel, le lendemain de leur nuit de noces ? Elle doit certainement leur en vouloir encore. Il appelle à la maison. C’est sa sœur Saliha qui répond. Il lui dit qu’il rentre le lendemain avec Amina.
Le lendemain, ils rentrent. C’est la première fois que Amina va voir la maison où elle va vivre.
C’est une vieille maison de maître, un peu décrépie mais charmante.
Le portail est ouvert, le couple rentre donc sans sonner. La porte d’entrée est également ouverte.
— Hé ho ! crie Rachid. maman, Saliha, Malika ! Où êtes-vous ?
Personne ne répond.
— Bon, dit rachid, elles sont quelque part. Nous allons monter dans notre chambre et déposer nos affaires.
— Comme c’est grand ! dit Amina.
— Il y a trois étages, dit Rachid. Il y a aussi un jardin, je te le ferai découvrir tout à l’heure.
Ils montent au premier étage.
- Voilà notre chambre, dit Rachid. La chambre de droite est celle de maman, la chambre de gauche est celle des filles.
La porte de la chambre de gauche s’ouvre. Saliha en sort.
— Ah, dit-elle, vous êtes de retour.
— Tu étais là ? dit Rachid surpris. Et les autres, où sont-elles parties ?
— Heu… dit Saliha embarrassée, maman et Malika ont rendu visite à la tante Fatma.
— Tu ne leur a pas dit que nous rentrons ?
— Si,dit la jeune femme.
— Et elles sont parties quand même ?
— Elles reviendront dans une heure ou deux. Si tu veux, je vais téléphoner à ma tante.
— Ce n’est pas nécessaire, dit rachid.
Il réfléchit, puis lance.
— Et si on allait au restaurant, pour fêter l’arrivée d’Amina chez nous ?
— Maman et Malika vont revenir, dit Saliha.
— Eh bien, on laissera la porte ouverte, dit Rachid.
— Je reste les attendre, dit Saliha.
— Non, dit Rachid, tu viendras avec nous.
Rachid reprend son travail quelques jours plus tard. Amina, elle, a encore trois semaines de vacances avant la reprise du lycée. La cohabitation avec Taos et ses filles s’est plutôt bien passée, du moins tant que Rachid était là. Le jeune homme absent, Taos change de comportement avec sa belle-fille.
Ce sont d’abord des remarques désobligeantes, puis des attaque ouvertes.
— C’est ainsi que tu fais le ménage ? Ta mère ne t’a donc rien appris ?
— Ne touche pas à la cuisine, c’est moi qui prépare les repas ici !
— C’est moi qui fait le lit de Rachid.
À chaque fois, la jeune femme obéit. Rachid lui a dit, à plusieurs reprises, qu’elle doit ménager sa mère qui est très susceptible.
“Parfois, ses propos dépassent sa pensée, mais je t’assure que cette femme est très affectueuse !”
Il n’y a pas de doute que Taos est affectueuse, mais avec lui seulement ! Elle continue à voir dans sa belle-fille une étrangère, une intruse qui s’est introduite dans sa vie et celle de sa famille.
Amina ne dit rien à Rachid, de peur de provoquer une dispute. Après tout, Taos ne fait que parler et gesticuler !
À chaque fois que Rachid rentre, il ne manque pas de lui demander comment sont les relations avec sa mère.
— Correctes, répond Amina.
— Elle ne te cherche pas querelle ? Elle ne te fait pas des misères ?
— Non, non, dit la jeune femme sur un ton qu’elle veut convaincant, mais qui sonne faux.
Un matin, Rachid qui est parti au travail revient à l’improviste pour prendre des documents. Du portail extérieur de la maison, il entend les éclats de voix de sa mère.
— Tu n’es qu’une vaurienne et une paresseuse ! Je me demande comment mon fils a pu t’épouser !
Rachid s’introduit dans la maison sans se faire remarquer et, caché dans une chambre, il sent la dispute. Taos, très excitée, insulte sa belle-fille et la traite de tous les noms ; c’est à peine si Amina lui répond.
Ce jour-là, même Malika, la fille aînée, se met de la partie.
“Qu’es-tu venue faire chez nous ? Tu n’es pas l’épouse qu’il faut pour mon frère !”
Rachid sort de sa cachette et s’en prend à sa mère et à sa sœur.
— C’est ainsi que vous la traitez en mon absence ? crie-t-il.
Et à Amina :
— Pourquoi ne m’as-tu rien dit ?
Pour toute réponse, la jeune femme éclate en sanglots.
Taos, confuse, envisage de se défendre :
— Elle m’a mise en colère, dit-elle. Elle n’écoute pas mes conseils. Je veux la former, moi, en faire une femme d’intérieur parfaite !
— Elle n’est pas une femme d’intérieur, crie Rachid. Je t’interdis de la maltraiter. (À Amina) habille-toi, je t’emmène.
Amina obéit. Au fond d’elle, elle est contente que Rachid ait découvert le jeu de sa mère. Peut-être que maintenant, elle la laissera tranquille.
— Où allons-nous ? demanda-t-elle.
— Je te dépose au cabinet. Je viendrai te chercher à midi. Je t’emmène au restaurant et nous parlerons l’après-midi ensemble.
— Tu dois avoir du travail !
— Pour une fois je m’occuperai de toi.
Il lui fait aussi des reproches
— Tu aurais dû me mettre au courant, je suis sûr que ce n’est pas la première fois que ma mère te maltraite !
— Ce n’est pas grave, dit la jeune femme, il ne faut pas envenimer les choses, ta mère finira par se calmer.
— Espérons-le, dit le jeune homme, autrement je prendrais des mesures qui ne vont pas lui plaire !
Elle ne se montrera plus agressive avec la jeune fille, elle ne lui fera même plus de reproches : elle va se comporter comme si elle n’existait pas…
Ce comportement est encore plus pénible que le précédent. En fait, Amina préfère les insultes et les remarques vexatoires à ce silence poignant.
Elle entre dans la cuisine, la belle-mère en sort aussitôt. Elle lui parle, elle détourne la tête, elle veut préparer un plat, elle lui arrache le batteur ou le hachoir électrique des mains et l’enferme dans une armoire. Le message est clair : elle ne veut pas d’elle.
Si Malika, la fille aînée de Taos, soutient sa mère, elle non plus ne parle plus avec Amina ; Saliha, la cadette, essaye de lui remonter le moral. Mais elle ne lui parle que lorsque sa mère et sa sœur ne sont pas là.
“Montre-toi patiente, lui dit-elle, ma mère fait sa crise de jalousie, mais ça lui passera”.
Elle demande surtout de n’en rien dire à Rachid.
Amina veut bien se montrer patiente, mais la situation devient intenable pour elle.
Heureusement que les vacances finissent et qu’elle retournera bientôt au lycée. Au moins, elle n’aura pas à affronter sa belle-mère toute la journée.
Rachid finit par découvrir que sa mère ne parle plus avec sa femme.
— Vous êtes fâchées ? demande-t-il à Amina.
— Non, dit la jeune femme.
— Alors pourquoi ne vous parlez-vous plus ? Malika non plus ne parle pas avec toi ?
— Je ne sais pas, se contente de dire Amina.
Le jeune homme interroge sa jeune sœur Saliha.
— Toi, dis-moi ce qui se passe.
— Rien… il ne se passe rien, dit Saliha. Tu connais maman.
— Je la connais très bien ! tonne-t-il, elle est incorrigible.
Saliha regarde son frère, étonnée. Il n’a pas l’habitude d’élever la voix aussi fort. Et surtout, il n’a pas l’habitude de parler de la sorte de sa mère.
Il va retrouver Taos et à elle aussi il demande ce qui se passe.`
— Demande-le plutôt à ta femme, lui répond-elle. Depuis plusieurs jours, elle ne m’adresse plus la parole. Sans raison.
— Mais c’est toi qui ne lui parle plus. Malika et toi vous l’avez mise en quarantaine !
— C’est ce qu’elle t’a raconté ? Mon Dieu, mon Dieu, je suis la victime et elle fait de moi le bourreau. Et elle éclate en larmes. Rachid embarrassé, ne sait quoi faire. De toute évidence, sa mère ment, mais si ce qu’elle dit était vrai ? Taos déteste Amina mais Amina, non plus ne la porte pas dans son cœur. Il appelle sa femme.
— Va embrasser maman, réconciliez-vous.
— J’ai entendu ce qu’elle t’a dit, dit la jeune femme.
— Oublie tout cela, ne laissons pas la haine s’épanouir dans la maison. Va l’embrasser !
Amina obéit. Il lui coûte d’embrasser cette mégère qui n’a pas cessé depuis qu’elle a mis les pieds dans cette maison de l’importuner, mais elle ne veut pas donner une mauvaise image d’elle. Taos ouvre les bras.
— Viens ma fille, viens je te pardonne tout !
Amina va vers elle. Taos l’étreint dans ses bras puissants et lui murmure :
— Tu ne perds rien pour attendre, fille du péché. Je te ferai regretter d’être entrée chez moi

..... encore une suite winking smiley

La vie est comme un arc-en-ciel: il faut de la pluie et du soleil pour en voir les couleurs.
k
17 mars 2004 18:41
La suite steuplé !!!!!!!
L
Lin
17 mars 2004 18:42
.........

De retour au lycée, Amina peut enfin respirer. Elle ne verra pas sa belle-mère une bonne partie de la journée et même toute la journée quand elle travaille le matin et l’après-midi. Souvent, elle s’arrange pour rentrer avec Rachid, qui passe la prendre. Taos, qui ne la laissait rien faire quand elle était à la maison, se met à se plaindre à rachid.
— Je suis toute seule à trimer, du matin jusqu’au soir. Saliha est prise par ses études, Malika et ta femme travaillent. Moi, je dois faire le ménage, la cuisine...
— Et, au milieu des plaintes, elle glisse une phrase assassine.
— Je croyais qu’au lycée, on ne travaille pas tout le temps.
C’est vrai, se demande rachid. Amina ne fait que seize heures au lycée : où passe-t-elle le reste de son temps ?
Ce matin, en la déposant, il lui demande à quelle heure elle rentre.
— À dix-sept heures, dit la jeune femme.
Il fait semblant de plaisanter.
— De huit heures à dix-sept heures ? Tu travailles comme à l’usine ?
— J ‘ai deux heures le matin et deux heures l’après-midi, dit la jeune femme.
— Tu pourras rentrer après les deux heures du matin, tu pourras donner un coup de main à ma mère.
— Ça va me prendre du temps, dit Amina, surprise par les propos de son mari.
— Eh bien, dit Rachid, je passerai à dix heures, je te déposerai.
Voilà une journée qui commence mal, se dit Amina. Taos a certainement “travaillé” son fils pour qu’il se comporte de la sorte.
D’ailleurs, elle a remarqué, depuis quelques jours, que son mari est distant avec elle. Sa mère est peut-être en train de le reconquérir.
À dix heures, Rachid arrive. Mais Amina ne veut pas rentrer à la maison.
— Maman est malade, dit-elle, je viens d’appeler. je veux la voir.
— D’accord, dit le jeune homme embarrassé, mais juste pour cinq minutes.
— Je veux rester avec elle.
— Et moi j’ai appelé ma mère pour lui dire que nous rentrons dîner.
D’ailleurs, c’est toi qui va préparer le repas... Pour une fois !
Amina fronce les sourcils.
— Pour une fois ? Mais c’est ta mère qui ne me laisse pas cuisiner.
— Arrête d’accabler ma mère, dit Rachid. À te croire, elle n’arrête pas de te persécuter.
La jeune femme éclate :
— Elle ne fait pas que me persécuter, depuis que j’ai mis les pieds chez elle. Elle ne veut pas de moi, et tes sœurs non plus !
Elle éclate en sanglots. Les passants s’arrêtent pour la regarder.
— Bon, bon, dit Rachid, monte dans la voiture, je vais te conduire chez toi ! Tu t’occuperas de ta mère, je retournerai te prendre à deux heures.
— Ne viens pas ! lui dit-elle avec agressivité.
— Tu as cours à deux heures, si j’ai bien compris.
— Je ne ferai pas cours, je veux rester avec ma mère. J’ai besoin de respirer un peu d’air frais, de voir des visages qui ne m’accueillent pas avec hostilité.
Rachid ne dit rien. Il la dépose chez elle.
— Je passerai à cinq heures, lui dit-il.
— Je ne sais pas si je vais rentrer avec toi !
— Tu n’es pas sérieuse !
— Si, rachid, je ne peux plus supporter ce que ta mère me fait subir
Sa mère est surprise de la voir arriver.
— Tu ne travailles donc pas ? lui demande-t-elle.
Pour toute réponse, la jeune femme éclate en larmes.
— Maman, je n’en peux plus !
Elle se jette dans ses bras et l’enlace.
— Calme-toi, calme-toi, dit Djamila. Tu vas tout me raconter.
Mais il faut un long moment avant qu’elle ne reprenne ses esprits. Et elle lui raconte tout. Revenant de vacances avec son mari, elle trouve la maison déserte, et la belle-mère exige qu’elle rentre pour l’aider.
— Elle m’a insultée et humiliée, puis m’a mise en quarantaine, refusant de m’adresser la parole. Elle m’a interdit de faire le lit de ma chambre, d’entrer dans la cuisine, d’aller dans les pièces de la maison. Et maintenant elle se plaint que je ne l’aide pas.
Elle pleure de nouveau.
— Si je n’ai rien dit, si je ne me suis pas plainte, c’est parce que Rachid a toujours été de mon côté. Mais aujourd’hui, je crois qu’elle lui a tourné la tête.
Elle raconte la querelle qu’elle a eu avec lui, au lycée.
— Je ne veux plus retourner chez cette mégère.
— Voyons, Amina, ce n’est qu’une dispute.
— Une dispute ? s’écrie la jeune femme. Mais ma vie est devenue un enfer !
— Je t’avais avertie, dit Djamila.
— Je ne veux plus retourner là-bas! Je ne veux plus retourner là-bas!
Elle fait une nouvelle crise de larmes. Djamila a toutes les peines du monde à la calmer. Son père, Ali, la trouve dans cet état. Djamila lui raconte ce qui s’est passé.
— je vais aller dire deux mots à cette mégère, dit-il.
— Non, dit sa femme, c’est avec Rachid qu’il faut régler le problème.
— Et comment ? demande Ali.
— Comment ? En lui demandant d’honorer son engagement.
Elle se tourne vers Amina.
— Il a promis, n’est-ce pas, qu’au cas où tu ne t’entendais pas avec sa mère, tu ferais ménage à part.
— Oui, dit la jeune femme, en essuyant ses larmes.
— Alors, tu vas faire ménage à part. La maison est spacieuse, tu prendras un étage ! Nous l’exigerons de ton époux quand il viendra te chercher tout à l’heure.
— Je ne veux pas retourner chez cette sorcière.
— Tu n’y retourneras pas, dit Ali, tant que ton mari ne satisfera pas ton exigence.
À dix-sept heures, Rachid, de la rue, klaxonne. Mais à la place d’Amina, il voit arriver Ali.
— Monte à la maison, lui dit-il, nous avons à parler.
Il ne niera pas les reproches qui sont faits à sa mère, mais il essaye, comme pour sauver l’honneur, de la défendre.
— C’est son caractère mais, au fond, elle n’est pas méchante.
— Notre fille ne peut plus supporter les tourments qu’elle lui fait subir, dit Djamila avec fermeté. Tu as promis qu’en cas de problème, Amina et toi emménageraient dans un étage.
Rachid ne répond pas. Ali insiste.
— Amina ne retournera avec toi que si tu la sépares de ta mère.
— Je réfléchirai, dit Rachid confus.
— Alors réfléchis, dit Ali sévèrement, et ne reviens la chercher que lorsque le problème sera réglé.
Ali et Djamila ont été clairs : leur fille ne retournera chez son mari que si elle fait ménage à part. D’ailleurs, Rachid l’avait promis à Amina, avant leur mariage : au cas où la cohabitation avec sa mère et ses sœurs deviendrait difficile, ils emménageraient dans un étage de la maison.
Une semaine a passé sans que Rachid se manifeste. Amina, elle, après avoir pris deux jours de congé, est retournée au lycée. Elle est peinée que son mari ne vienne pas la chercher, mais elle se sent revivre. Elle n’a plus, comme les jours précédents, cette angoisse d’affronter, à la fin de la journée, sa belle-mère. Elle n’a plus à subir ses sarcasmes ou, pire encore , ses sous-entendus. Elle aime Rachid, mais s’il lui préfère sa mère, elle est prête à se passer de lui. Ce vendredi, Amina s’apprête à rendre visite à sa grand-mère quand sa jeune sœur, Meriem, vient lui dire :
— Ton mari arrive. Ta belle-mère l’accompagne !
La jeune femme n’en croit pas ses oreilles.
— Viens ! Viens les voir ! insiste Meriem.
Elle va au balcon. Meriem n’ a pas menti. Djamila va à son tour au balcon.
— Ils viennent te chercher ! dit-elle à sa fille.
— Je ne retournerai jamais avec eux ! dit Amina, prête à faire une crise de larmes.
— Sauf s’ils acceptent nos conditions.
On frappe à la porte. Tandis qu’Amina s’enferme dans une chambre, Djamila va ouvrir.
Aussitôt, Taos tombe dans ses bras.
— Ah, chère Djamila, voilà longtemps que je ne t’ai vue !
Comment vas-tu ? Pourquoi ne viens-tu pas nous voir ? Et ton cher époux, les enfants ?
— Tout le monde va bien, dit Djamila, surprise par ce flot de paroles. Et tes filles, comment vont-elles ? (À Rachid) Et toi, cher gendre, comment vas-tu ?
— Bien… bien, tout le monde va bien, répond Taos.
Djamila les conduit au salon. Taos va dire, pendant un moment, des banalités, tandis que Rachid reste silencieux.
— Et Amina ? demande-t-elle brusquement. Où est-elle passée ?
— Elle doit corriger des copies, dit Djamila.
— Fais-la venir s’il te plaît. Cette petite nous manque, nous nous sommes déjà habitués à elle.
Djamila ne répond pas. Son visage se ferme.
— Hé, dit Taos, je t’ai dit de l’appeler.
— Pas avant que nous réglions certains problèmes, dit Djamila.
— Je sais, je sais... Mais ne va pas croire tout ce qu’elle te raconte. C’est comme mes filles, elles parlent à tort et à travers. Cette nouvelle génération...
— Nous avons une exigence à formuler, continue Djamila sur un ton très ferme.
— Ça aussi, je le sais, dit Taos. Ta fille va emménager dans un étage de la maison. (Elle regarde son fils). Je me suis entendue avec Rachid. Et maintenant, tu peux faire venir ma belle-fille ?
— Oui, dit Djamila, en souriant.
Elle se lève et va chercher Amina. Dès qu’elle la voit, Taos ébranle ses kilos de chair et de graisse et va la prendre dans ses bras.
— Ma petite Amina, comme je suis heureuse de te voir. Tu m’as manquée toute cette semaine. Je t’aime, tu sais, même si, parfois, je ne m’entends pas avec toi. Il est vrai que j’ai mauvais caractère, mais je ne suis pas du tout méchante.
Elle l’embrasse à plusieurs reprises. Elle ne veut pas la lâcher.
Rachid regarde Djamila.
— Je crois que cette fois-ci, dit-il, elles sont réconciliées.

......

La suite pour demain winking smiley winking smiley

La vie est comme un arc-en-ciel: il faut de la pluie et du soleil pour en voir les couleurs.
17 mars 2004 21:59
Merci lin très véridique cette histoire, vivement demain la suite, gros bisous à toi.

La vie est un CDD. lorsque tu seras DCD, l'au delà sera ton CDI ,améliores ton CV en attendant ton Entretien.Allah punit les injustes tot ou tard !
s
17 mars 2004 22:30
Merci lin et j'attend la suite avec impatience .


siryne
a
17 mars 2004 22:39

Merci linette smiling smiley

Tu avait disparue et tu reviens avec une grande nouvelle à lire , je t'apprecie , c'est formidable . Ton histoire est celle de tout les magrebins , c'est le mal qui est tomber dans l'eau et que tout le monde a but , genial fait vite on est tous pendu a tes lèvres , raconte vite la suite winking smiley
C
18 mars 2004 00:33
Merci Beaucoup Lin

A demain In cha'Allah
18 mars 2004 03:30
Bonjouir mes ami(e)s

Salut Lin

Comme a dit abdell, tu as disparu un moment mais tu reviens en force.
En fait, tu as dis que la suite est pour demain, je crois qu'on est demain winking smiley alors la suite !!! sad smiley
Non serieux prends ton temps smiling smiley c'est une histoire très passionnante et je t'en remercie.
@@@+++

On dit que ça ne prend qu'une minute pour remarquer une personne spéciale, une heure pour l'apprécier, un jour pour l'aimer. Mais qu'on a ensuite besoin de toute une vie pour l'oublier. Cool as ice.
w
18 mars 2004 10:50
salam**


Sabah el khir jami3ane smiling smiley winking smiley
Sabah el khir LIN winking smiley

Merci pour cette histoire pationnante et si reélle,
Allah yahfed d'avoir une belle mere pareil eye popping smiley eye popping smiley eye popping smiley eye popping smiley
la suite la suite la suite .................................................................

Femme, tu es l’éducatrice d’une communauté, tu représentes une école qui formera les générations à venir. Pour vous les femmes :)wanasa
s
18 mars 2004 10:58
salut lin!!!!

ça fait longtemps et quand tu reviens on te remarque toujours avec tes histoires passionantes!! trop bien!!

je me languit la suite!!!!

Le combat continue...
L
Lin
18 mars 2004 10:59
Salam Abdel

J'ai pas vraiment disparu juste un peu voir bcp débordée winking smiley, mais je vous lisait tjs et puis le chat je reviens dès que j'ai un moment Incha allah winking smiley

La vie est comme un arc-en-ciel: il faut de la pluie et du soleil pour en voir les couleurs.
C
18 mars 2004 11:03
Et si tu revenais justement maintenant, histoire de nous livrer la suite ?
18 mars 2004 11:13
Bonjour mes ami(e)s

Salam

Bien dit Chireen
Bonne journée

@@@+++

On dit que ça ne prend qu'une minute pour remarquer une personne spéciale, une heure pour l'apprécier, un jour pour l'aimer. Mais qu'on a ensuite besoin de toute une vie pour l'oublier. Cool as ice.
C
18 mars 2004 11:17
Salam Hicham

A chaque fois je me fais avoir...Je me dis non, tu ne liras cette histoire q'une fois complétée..Mais nan..j'ai pas pu m'en empêcher...

Et me voilà maintenant cliquant désespéremment sur le post dès qu'un nouveau message apprait, pensant trouver la suite de l'histoire mais non....
Rmq c probablement l'effet qu'aura mon présent message...
Sorry

Allez Adorable Lin, viens éclairer ma journées avec les rayons de ton histoire... :-)
S
18 mars 2004 11:31
Viiiiiiiiiiiiiiiiite Lin aye pittié de nous.
Ne fais pas uen saga et poste tout d'un coup.
Pleeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeaaaaaaaaaaaaaaaaaasssssssssseeeeeeeee
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