Intéressant votre hors-sujet... Très intéressant. Je rejoins assez Djemila75 (même si pas entièrement d'accord) sur la distinction qu'elle établit.
La question du destin/libre-arbitre est l'une des plus casse-tête à méditer... Pour tout le monde... Et ce certainement parce qu'on les oppose systématiquement, créant ainsi une impasse.
C'est dû, je pense, à la pensée philosophique occidentale qui depuis je ne sais plus quel philosophe ne peut appréhender le monde qu'en opposant des alternatives (qu'ils présentent comme contradictoires). La métaphysique occidentale se croit donc toujours OBLIGÉE de choisir l'un des termes d'une équation (en l'occurence destin/libre-arbitre) au détriment de l'autre. C'est soit l'un... Soit l'autre... Jamais l'un et l'autre.
Or... Le monde n'est pas ainsi fait... Il n'est pas soit un, soit multiple... Il est un ET multiple, par exemple. Plutôt que d'user du "ou", la pensée islamique (et religieuse en générale) semble très bien intégrer le "et"... Si on revenait simplement à la pensée traditionnelle, on n'aurait plus trop de problème pour comprendre... Mais bon...
Un exemple :
Allah n'est-Il pas "le Premier ET le Dernier, l'Apparent ET le Caché" ? (Coran 57 Le Fer ; 3) Dieu n'est-Il pas "l'Alpha ET l'Oméga, le Premier ET le Dernier" ? (Apocalypse 22 ; 11)
Ici, il s'agit d'un paradoxe... Nullement d'une contradiction.
C'est ce que Nicolas de Cues, il me semble, appelait la "coincidentia oppositorum"... Dieu est la coïncidences des opposés, et en Lui Il réunit et fait rejoindre les paradoxes.
Rien de bien surprenant donc à ce que les religions et l'Islam tout particulièrement conçoivent qu'en Allah se rencontrent le destin ET le libre-arbitre.
Sur la question du destin et de la liberté, il est possible de résoudre le problème si on comprend qu'il ne s'agit nullement d'avoir à choisir entre les deux, soit l'un ou l'autre. Mais d'intégrer les deux.
Et pour se faire, il nous faut d'abord comprendre ce qu'est le destin et ce qu'est le libre-arbitre, et ce qu'est la liberté.
Le destin ce n'est pas tant ce qui est écrit "al-maktoub", comme on tend à le penser. Maktoub dans son acception première ne signifie pas "écrit" mais "décrété"... Comme dans le Coran, al-Kitâb n'est pas le Livre tel que nous le connaissons mais le "Décret" divin. Mais, naturellement, l'homme appose les conceptions de son temps, or pour mieux comprendre, il faut revenir aux réalités linguistiques de l'instant de la Révélation (ces termes avaient des acceptions différentes pour décrire une seule et même réalités... Les réalités métaphysiques elles, sont intemporelles et jamais contextuelles).
Le destin, ce n'est donc pas ce qui est écrit, mais ce qui est décrété par Allah... C'est plutôt ce pour quoi nous sommes faits, ce pour quoi nous avons été créés par Allah.
En arabe, on appelle le destin : al-qadar... C'est à dire, ce que Dieu a déterminé (qaddara) pour chaque être, ce que Dieu a donné d'être à chaque être.
Pour donner un image céleste...
Voyons le monde comme un Cosmos. Chaque élément de ce Cosmos a un rôle à y jouer, chacun de ces éléments a une place qui lui est spécialement réservée, chacun de ces élément a son propre lieu de réalisation... Ce lieu, cette place... C'est le destin... Ce qu'Allah a choisi, déterminée pour lui d'être dans ce Cosmos, la place qu'Il lui a réservée.
Ce que je suis, mon destin, c'est ce que je dois être, ce vers quoi je chemine, ce vers quoi je tends... C'est la place que je dois occuper dans ce Cosmos, dans ce monde harmonieux choisi par Allah.
Le destin, à mon sens, ce n'est donc pas le pré-destiné mais le destiné (destin synonyme de destinée)... Non plus que le pré-déterminé mais le déterminé... Le point à horizon au loin que Dieu a choisi pour moi et qu'Il veut que j’atteigne...
Qu'est-ce que le libre-arbitre ? Qu'est-ce que la liberté ?
Le libre-arbitre... C'est le choix qu'Allah nous laisse à nous dans Son décret. Lui détermine "qaddara"... Et nous choisissons... C'est la liberté de choix seulement.
Si Allah a déterminé pour moi un destin, un point à l'horizon à atteindre, ma propre place dans le Cosmos :
Libre à moi de tendre vers ce qu'Allah m'aura destiné, ou pas. Libre à moi d'avancer vers cet horizon, ou pas. Libre à moi d'y revenir lorsque j'aurais dévié, ou pas. Libre à moi de me conformer au décret divin, ou pas.
Voilà le libre-arbitre : faire ou ne pas faire... Être ou ne pas être... Etc.
Et la liberté ?
On admet assez souvent que le libre-arbitre est le plus haut degré de la liberté. Or ce postulat ne va pas de soi... Liberté et libre-arbitre sont différents pour moi.
Le libre-arbitre c'est avoir la possibilité de choisir entre deux termes d'une équation strictement équivalents mais opposés. La liberté, elle, c'est avoir la possibilité de choisir ce qui doit être choisi et de le faire.
Par exemple, mon libre-arbitre me permet tout aussi bien de me jeter sous les rames d'un métro que de ne pas le faire. Une équation, deux choix. Je peux choisir l'un ou l'autre. Soit me jeter. Soit ne pas me jeter. Ma liberté elle... Consiste à ne pas le faire parce que c'est MIEUX pour moi.
Liberté et libre-arbitre s'opposent en fait. Le libre-arbitre nous pose le bien et le mal d'une situation comme strictement équivalent, tandis que la liberté nous pousse toujours vers le bien.
En gros, il y a le bien et le mal. Mon libre-arbitre me permet de faire soit l'un soit l'autre. Ma liberté est de faire le bien. Parce que le bien est mieux que le mal.
Conclusion :
Allah a décrété pour moi un destin qui m'est propre. J'ai le libre-arbitre de l'accomplir ou de ne pas l'accomplir. Ma liberté consiste à l'accomplir de la meilleure manière et de cheminer vers cet horizon, sur la Voie du Bien.
En simplifiant quelque peu quelques exemples :
- Si Allah m'a destinée à être une jeune fille musulmane qui se respecte, j'ai le libre-arbitre de l'être ou de ne pas l'être. Ma liberté, c'est d'accepter d'être ce qu'il a voulu que je sois, et d'être une jeune fille musulmane qui se respecte parce que c'est MIEUX POUR MOI.
- Si Allah a décidé que je sois atteinte d'une maladie qui ne soit pas incurable, j'ai le libre-arbitre de me soigner ou de ne pas me soigner. Ma liberté consiste à me soigner, parce que c'est MIEUX pour moi.
Je rappelle que je simplifie, tout n'est pas si simple. Il ne faut pas oublier de prendre en compte la complexité du monde, comme la complexité de l'être humain.
A chacun, Allah a déterminé un destin qui lui est propre... Chacun a alors à se connaître lui-même afin de cheminer de la meilleure manière vers ce destin, cet horizon qu'Allah lui aura fixé...
Car la plus grande liberté, c'est de coïncider avec cet horizon, cette destinée, ce qu'en vocabulaire religieux (métaphysiquement, et non littéralement) on appelle le "Seigneur".
Hadîth : Qui connaît son âme, aura connu Son Seigneur...
Je finirai par cette phrase qui résume tout...
De mon libre-arbitre, j'accomplis mon destin... Car là est ma liberté...
Et de tout cela, Dieu est Omniscient et le plus Savant...
Je finis là le hors-sujet... Mais si ça tente quelqu'un d'ouvrir un post... Ce pourrait être intéressant.
Voilà...
Là j'ai le libre arbitre de rester sur Yabiladi et court-circuiter mon cerveau, ou d'aller me promener au bord de l'eau par une si belle journée ensoleillée... Ma liberté consiste à faire ce qui est le mieux pour moi et pour les autres...
Très belle journée à vous également...
Modifié 1 fois. Dernière modification le 08/03/14 16:49 par Sarazinement Vôtre.
Sarazinement Vôtre, Olala comme c'est difficile de résister à ce hors sujet ! Quand je pense qu'il a commencé à cause d'une simple petite phrase qui me paraissait pourtant anodine. Je ne vais pas m'étaler mais oui en effet, il faudrait ouvrir un post sur la question car je ne suis pas d'accord avec ta vision de la destinée et du libre-arbitre. On en rediscutera inchAllah.
Standby, Tu m'as mal lue, tu continues à confondre destin et mektoub.
Mamajet'aime, Oui il y a ce hadith et un parallèle que j'avais lu quelque part. Il faudrait que je retrouve ça.
Modifié 1 fois. Dernière modification le 08/03/14 17:01 par Djemila75.
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