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Mise au point a M. Sahel
H
2 février 2006 19:34
Réponse à M. Sahel La mise au point de M. le ministre de l'Intérieur que nous acceptons de publier conformément aux dispositions légales en matière de presse nous amène à faire les commentaires suivants :
Les informations que nous avons publiées dans notre précédente édition faisant état de la poursuite de la participation du Maroc au programme dit de " extraordinary renditions " de la CIA, révélé dans le détail et largement commenté par la presse américaine depuis près d'un an (notamment par le New Yorker, le Washington Post, le New York Times, Time et Newsweek), nous ont été communiquées par une source proche des services de renseignements marocains qui a requis l'anonymat. L'exigence journalistique nous contraint à en protéger la confidentialité.
Les enquêtes menées par la presse internationale et les ONG telles que Amnesty International et Human Rights Watch ont établi que le Maroc a bel et bien participé au programme de sous-traitance d'interrogatoires et de détentions abusives menés par des services de renseignements étrangers dont la CIA en particulier. A ce jour, les autorités marocaines n'ont jamais répondu publiquement à de telles accusations. Le témoignage recueilli de Mohammed Binyam Al-Habashi, britannique d'origine éthiopienne, détenu au secret pendant 18 mois au Maroc dans des conditions inhumaines et dégradantes, dont le cas a été consigné dans un rapport rendu public par Amnesty International est pour le moins éloquent. Arrêté au Pakistan en 2002, Binyam a été transféré en toute illégalité au Maroc où il a subi de très graves sévices lors de sa captivité avant d'être de nouveau envoyé dans une prison américaine près de Kaboul, puis sur la base de Bagram avant d'être finalement expédié au camp V de Guantanamo où il est toujours incarcéré. Son avocat, Me Clive Stafford Smith, que "Le Journal" a récemment contacté, a décidé de porter plainte contre le Maroc.
Un autre cas plus récent vient étayer que le Maroc se prête à ce genre de pratiques.Le 24 janvier 2006, le bureau de l'AFP à Londres a fait état du cas similaire de Farid Hilali, un Marocain de 36 ans en instance d'extradition vers l'Espagne, où il est recherché pour sa participation aux attentats du 11 septembre 2001. Hilali a affirmé devant la Haute Cour de Londres avoir été torturé, à la demande des autorités britanniques, aux Emirats arabes unis et au Maroc. L'agence gouvernementale MAP, qui a diffusé la même information n'a fait état que de l'accusation portée à l'encontre des Emirats… Aucun de ces cas n'a été commenté ni démenti par les autorités marocaines.Aucune commission parlementaire ne s'est saisie de ces affaires qui, pour reprendre l'expression de M. Sahel "portent atteinte à l'image et à la réputation du Royaume".
Driss Benzekri, président du CCDH et ex-patron de l'IER, a admis lui-même, lors d'une interview accordée à Radio France Internationale, dont "Le Journal" a publié la retranscription la semaine passée, que les "violations continuent", en ajoutant toutefois très benoîtement qu'elles sont désormais "gérables".
Depuis les tragiques évènements du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis et plus encore depuis ceux du 16 mai 2003 à Casablanca, "Le Journal", mais aussi de nombreuses publications et organisations nationales et internationales ont fait état d'importants dépassements, que ce soit du fait des services de sécurité ou de la Justice marocaine, qui apportent un démenti cinglant aux affirmations de M.Sahel. Un rapport spécifique sur "le centre de détention de Témara" a été soumis à l'opinion internationale par Amnesty International le 24 juin 2004 où le recours à la torture a été abondamment documenté. Aucune dénégation officielle n'est venue contredire les graves constatations de ce travail d'enquête crédible et pas la moindre contre-enquête n'a été diligentée par l'Etat à ce sujet, comme cela est d'usage dans les démocraties auxquelles le Maroc tend à se comparer par la voix de son ministre de l'Intérieur.
Une toute récente enquête du "Washington Post" a révélé le scandale des "sites noirs" américains établis par la CIA en Europe Centrale. La vague de contestation au sein des opinions publiques de l'Union Européenne a poussé ses instances officielles à mener une investigation officielle sur l'existence de ces prisons illégales de la CIA en pays étrangers. Un rapport intermédiaire vient d'être présenté par le sénateur suisse Dick Marty, enquêteur en chef de cette mission. Ce même Marty, lors d'un point de presse récent à Paris a explicitement déclaré que les prisonniers,membres présumés d'Al Qaïda, détenus dans ces fameux "sites noirs" avaient été "transférés vers un pays d'Afrique du Nord… vraisemblablement le Maroc". Encore une fois, aucune réaction officielle marocaine n'est venue contredire ces allégations. L'opinion publique marocaine est en droit d'exiger du gouvernement des explications circonstanciées sur ce faisceau d'accusations dont le Maroc est de plus en plus souvent la cible. Il en va aussi et surtout du respect des droits et libertés de groupes et de personnes dont fait cas M.Sahel, notamment le droit de savoir et donc d'apprécier la bonne gouvernance des dirigeants du pays, quelle que soit la justesse bien comprise de la lutte contre le fléau du terrorisme et de ses périls. Aussi, nous nous réservons, à notre tour, le droit inaliénable d'emprunter toutes les voies d'investigation que nous confère notre profession pour l'établissement de vérités au seul profit de la collectivité.

Par : Ali Amar
Le Journal
 
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