L'arbre qui cache la forêt de l'islam NORDIN MALOUJAHMOUM Mis en ligne le 13/04/2004 - - - - - - - - - - -
Les attentats aveugles ont assombri l'horizon des musulmans européens. Ces boucheries sans nom que nous condamnons ont permis les amalgames les plus détestables
Ancien président de l'Exécutif des musulmans de Belgique
Le 11 mars 2004 a marqué au fer rouge tous les peuples d'Europe. Les Espagnols ont vécu, ce jour-là, la pire page de leur histoire. Nos pensées et notre soutien vont aux familles des victimes et à tout le peuple espagnol; ces innocents fauchés sans distinction par un crime odieux qui n'a pas encore livré tous ces secrets.
Très vite, se tendent des doigts accusateurs: il existerait une piste «islamiste» à l'origine des attentats. L'information tombe comme un couperet.
Et voilà que la stupeur fait place à l'angoisse chez les musulmans d'Europe. Au nom de quelle cause des musulmans commettraient pareille forfaiture? Qui aurait pu commanditer cette boucherie sans nom? Dès les premiers jours, de nombreuses personnalités musulmanes se sont jointes aux fidèles anonymes pour exprimer, en tant que citoyens d'Europe, leur condamnation la plus ferme des attentats de Madrid.
Plus encore, ce séisme a ouvert, au sein de la communauté, une profonde réflexion qui a donné lieu à une prise de position unanime des théologiens quant à la dimension résolument criminelle et «anti-islamique» des actes terroristes. Les docteurs de la Loi rappellent qu'en l'espèce aucun texte sacré - émanant du coran ou de la sunna (tradition du prophète) - ne peut justifier le meurtre gratuit. Et d'assener que l'islam enseigne, a contrario, que «celui qui tue un être humain sera considéré, par Dieu, comme ayant assassiné toute l'Humanité» !
Ainsi, des hommes de foi aux simples croyants, en passant par les gouvernements musulmans, très tôt les condamnations se sont exprimées avec force et sans équivoque. A l'instar de ce rassemblement pacifique le 28 mars, devant l'ambassade d'Espagne, organisé notamment à l'initiative d'un «collectif d'associations» et de la «Ligue des imams», et rehaussé par la participation de quelques mandataires politiques d'origine ou de confession musulmane. Aucun journaliste n'avait cependant couvert l'événement malgré le communiqué de presse et les nombreuses invitations. De même, ce sont des portes closes qui ont accueilli la déclaration de soutien et de sympathie que les participants souhaitaient remettre à l'ambassadeur.
Dans ces heures douloureuses, l'anecdote serait pour le moins insignifiante si ce n'était le message de rejet qui apparaît en filigrane: la folie d'un groupe isolé devenant la faute d'une communauté... Cette «quarantaine» médiatique constitue, en soi, une forme d'injustice susceptible de crédibiliser davantage les discours extrémistes. On peut, en effet, regretter la mise à l'écart de cette frange éclairée de la communauté. Or, ces femmes et ces hommes de dialogue constituent, aujourd'hui, les seules voix capables de discréditer la rhétorique, tantôt criardes, tantôt insidieuses, des ténors extrémistes. Si, plutôt que de marginaliser les musulmans sans distinction, l'on prêtait une oreille plus attentive à leur discours d'ouverture, on comprendrait mieux comment, si l'on n'y prend pas garde, le désespoir et l'humiliation peuvent devenir haine et détermination.
Ces attentats aveugles ont assombri l'horizon des musulmans européens, en même temps qu'ils ont permis les raccourcis les plus dangereux et les amalgames les plus détestables: comme celui de décrire une forêt entière par un seul de ses arbres. Dans ce cas, certains discours islamophobes pourraient encore avoir de beaux jours devant eux.
Non je ne suis pas d'accord. Plus que jamais, l'islam importe d'être à l'écoute.Si avant les attentats du 11 septembre, comprendre le monde musulman ne semblait présenter aucune nécessité immédiate, maintenant il est devenu vital de ne pas diaboliser la réalité de 1,2 milliard de Terriens, mais de l'explorer. En Amerique du Nord, les ventes du Coran ont quintuplé en un mois.Les explorateurs peuvent aussi emprunter les voies de l'Internet. Une opinion publique désinformée devient un handicap fatal pour une société, lorsque vient le moment de voter des lois. *good guys against bad guys*on dirait un mauvais scénario de Hollywood.