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l'Arabe comme hypothèse politique
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3 novembre 2004 23:27
La question linguistique, dans ses rapports au politique , est au Maroc "indépendant" facteur de crise et de dépersonnalisation; elle n'a jamais été source d'évolution. L'Etat "nationalitariste" marocain est continuellement en quête de références, car notre identité a été hypothéquée. La conception que le pouvoir a imposée repose sur l'importation de "modèles" et d'idéologie éxogènes, castratrices et totalitaires, qui ont pour corollaire la défiguration de l'histoire des Imazighen et la désintégration programmée de leur identité. Notre identité n'est pas définitivement instituée conforméménet aux données socioculturelles et historiques du pays. Elle nous est imposée par des normes iniques et arbitraires. On fut obligé de la prescrire car elle est artificielle, déconectée de notre réalité. Le choix de l'arabe comme langue officielle s'inscrit dans cette vision contre-nature, associée à une politique linguicide: l'arabisation. La langue arabe a quité son terrain, son territoire, normal de la nature pour devenir une norme inique, une sorte de devoir-être inscrit dans la constitution pour satisfaire un besoin politico-idéologique mythique. Or l'arabe n'est pas -n'a jamais été- un caractère naturel au Maroc; cette langue fonctionne comme une anomalie, une
excroissance pathologique qui tend à assouvir un désir politico-démagogique. Elle fut érigée en impératif linguistique conçu pour justifier un problème politique, une forme de colonisation masquée et vicieuse car invoquant l'Islam comme motivation "sacrée". D'où les contradictions
et les non-sens inhérentes à cette situation burlèsque et absurde.


Le premier de ces paradoxes tient à la négation de la souveraineté amazigh qui, elle, se perçoit comme caractère fondamentale - le seul trait authentique- de définition de notre identité. Pour asséoire la politique linguicide qui fonde et "légalise" la domination de l'arabe, il a fallu métamorphoser l'environnement culturel, linguistique, géographique et anthropologique amazigh: Imazighen ne seraient que "d'anciens arabes!", leur langue serait de "l'arabe ancien" et leur histoire "démarre" avec l'arrivée des hordes arabes des Beni-Hilal en Afrique du nord...
Cette entreprise "ethnocidaire" de falsification est l'apanage des "nationalitaristes" qui ont ouvertement collaboré avec le colonisateur pendant que la Résistance armée amazigh s'essoufflait. Les mosquées, l'école et les médias en sont les relais et les prolongements. Et face à toute manifestation de l'amazighité, on réprime. Il a fallu tout inventer, "créer" un peuple artificiel ex-
nihilo, un Maroc imaginaire,une nation "arabe", du moins au niveau des discours officiels et officieux. Notre pays ressemble alors à un champ de fleurs en plastique, l'arabe devient le décor, le verni qui cache la réalité amazigh. C'est l'arabe qui s'accapare le champ de la légitimité et de la souveraineté au détriment de Tamazight et des Imazighen, il devient notre propre négation. Conçu comme impératif linguistique qui fonde une politique raciste et ségrégationiste, inscrit dans la constitution, l'arabe ramène tout à l'ordre unique de la parole -la langue- autorisée, par l'exclusion, laa repression, le mépris et la contrainte. Cette situation absurde, de type colonial, s'explique: L'Etat marocain, qui n'a jamais reconnu le mode d'organisation socio-politique amazigh, reproduit l'Etat-Nation européen. Les nationalitaristes ont fait tout pour singer leur maitre-protecteur: le
colonisateur; et l'organisation "mijotée" à Rabat constitue une pâle copie de la métropole: la France.


L'Etat français repose sur une vision jacobine: un Etat, une seule langue d'Etat et une religion d'Etat. Mais en Europe, l'expérience a précédé les principes, ce qui donne à l'Etat une certaine cohérence interne dans ses rapports aux réel. Au Maroc, ce sont les principes qui ont précédé l'expérience. En France, il s'agissait de théoriser ce qui est advenu, ce qui est tangibles. Au Maroc on a spéculé sur ce qui doit être, on a théorisé un relatif inconnu, on a misé sur du probable, l'incertain. Si en Allemagne, l'allemand est langue officielle, c'est parce que c'est la langue du peuple allemand. En revanche, au Maroc, l'arabe est langue officielle en raison d'une décision unilatérale arbitraire et politique, alors que personne ne parle cette langue - elle n'est plus parlée dans son terriroire d'origine!
Dans notre pays, on a hypothéqué que l'Etat, la loi et la langue seraient tels qu'une élite de traitres arabo-andalous se les représente, les imagines pour conforter sa "stratégie" géopolitique en Afrique du Nord et sauvegarder ses interêts économiques. Il n'y a absolument pas du déja accompli, mais de l'incertitude et de l'inquiétude. On s'est imposé des obligations contre-nature
et l'obligation est signe d'inquiétude et de contrainte surtout. Dépourvue de toute légitimité au niveau sociolinguistique au Maroc -et en Afrique du Nord-, coupée du réel, la langue arabe ressemble à une mommie, un poisson hors de l'eau ( de toutes les façons elle est née au désert); et pour lui garantir un semblant de survie, il a fallu l'ériger en norme, donc en impératif: la psychose liée au Tamazight et la peur viscérale de la résurgence de cette dernière expliquent la mythification de l'arabe et sa sacralisation.


Divinisée, l'arabe devient "intouchable" et ses locuteurs aquièrent une dimension surhumaine: les Arabes deviennent des super-hommes, des hommes au dessus de tous les hommes, à commencer par Imazighen. De ce fait, l'arabe tend à devenir le sixième dogme de l'Islam aux yeux des gardiens
du temple de l'arabisme. Pour ces derniers, la défence de l'arabe - qui incarnerait l'Islam et en devient un critère discriminatoire- leur permet de réclamer leur part du butin, de "gloire" politique.
L'arabe pourtant ne peut jamais contribuer à l'institution du national, dans le cadre étatique car elle repose sur la négation du véritable national à savoir Tamazight. L'arabe n'est pas source de cohésion, elle est facteur de tension. Cet état de fait repose sur l'élection de l'arabe en langue "inégalable" et sur l'Islam conçù comme religion de domination idéologico-politique.Ainsi, d'apports historiquement datés, l'arabe et l'Islam sont devenus des maladies qui ont pour noms: l'arabisme et l'islamisme.


La négation de Tamazight, tributaire du monopole que détient l'arabe, est source de conflits qui désormais sont politiques. La conception monolithique de la souveraineté par l'Etat qui se veut arabe, exclusivement arabe, engendre la contestation de l'ordre unique et inique de la parole
(arabe) imposée par le silence délibéré, l'indifférence, la haine et la repression. Ce qui a conduit l'Etat à la perte de son autorité morale.

L'arabe tel qu'il est institué, s'inscrit dans un rapport d'opposition à Tamazight. Ce serait une erreur d'avancer que le problème linguistique au Maroc tient de la diglossie, d'un double registre linguistique. Il s'agit plutôt d'un conflit linguistique, d'un problème constitutionnel. En instituant l'arabe comme langue officielle, c'est la dimension politique de la langue qui est en jeu et enjeu, car il ne s'agit pas de la langue des fables et des contes, mais de la langue de l'administration, de la justice, des médias... Peut-on justifier l'institutionnalisation d'une langue qui soit autre chose que celle des citoyens et de la société?
La réponse est non. Dans notre pays, le conflit est gouverné par l'association entre le vécu et l'utopie: l'arabe n'est la langue de personne. Son apprentissage passe par l'école et la contrainte. Son statut au Maroc est une pure hypothèse politique. Absurde. La construction de l'Etat "nationalitariste" s'avère paradoxale car elle est synonyme de la négation du national:Tamazight. L'Etat se retrouve actuellement face à ses propres contradictions. S'il peut juguler l'arabisme en
raison du caractère utopique de ce dernier et de ses échecs perpetuels, l'islamisme, que l'arabisation à outrance a enfanté, est devenu pour lui source d'inquiétude et potentiel de destabilisation.
L'idéal démocratique serait, en matière de planification et de politique linguistiques, que le peuple amazigh détermine à partir de sa langue marticielle, la statut de l'arabe et des autres langues. C'est Tamazight, notre langue maternelle, qui doit être instituée comme langue officielle et nationale: elle est la langue du peuple et permet une association harmonieuse entre le réel et la théorie.
Tamazight est facteur d'unité et d'intégration. L'arabe est coupée du réel, elle est source de conflits et de divisions. Tamazight, langue vivante et naturelle dans notre pays, a reçu le statut constitutionnel d'un absent. L'arabe est officialisée pour satisfaire un phantasme idéologique
meurtrier, affirmer un soi imaginaire. Il en a découlé des blocages et des thraumatismes. Le premier blocage est celui de la liberté d'expression et de parole confisquée au peuple amazigh. Nos ministres, nos députés, nos présentateurs de télévision ont tous le ton de la rhétorique et nous parlent une langue de bois. Pour eux, s'exprimant dans une langue qui leur est étrangère, la prise de parole est souffrance et relève du "masochisme linguistique" integré. Dans ces conditions la pensée déraille et trébuche et les déclamations réitérées en constituent des signes probants.
L'arabe est alors refuge, un moyen qui permet de maintenir la distance entre le peuple et ses représentants. Parce que le berbère est un problème grave en raison de sa profonde réalité, on se refuse à le penser car en débattre est une chose insupportable. Beaucoup de comtpes doivent être
rendus et le méa culpa est insuffisant. Le devoir de mémoire est sacré.


Les événements survenus en Kabylie a déboussolé le pouvoir marocain et ses élites politiques. La réponse fut une fuite en avant par des "débat" biaisés et des "émissions" caricaturales". Aucun changement au niveau de la doctrine: si Tamazight devrait avoir quelques droits, ce serait dans
le cadre de la subordination des Imazighen aux Arabes et à l'Arabité. Recemment, la plus haute autorité du pays à annoncé le démarrage d'une institution -Institut Royal de Culture Amazigh- destinnée à promouvoir et développer Tamazight, au début de l'année 2001. S'il est trop tôt pour se prononcer sur ses ambitions et sa vocation, des signes avant-coureurs nous incitent à rester réservé. Faute d'une implication active du Mouvement Culturel et Associatif et des spécialistes amazighisants, faute d'une prise en considération de la dimension transnationale de la revendication amazigh, faute d'une redéfinition de la politique générale de l'Etat, faute d'un abandon de la politique linguicide de l'arabisation, et faute d'une reconnaissance pleine de la souveraineté amazigh au Maroc,la future institution risque de lier le sort de Tamazight à une idéologie arabobaâthiste dont la démagogie, l'intolérance et la haine de toute forme d'altérié constituent des constantes.



Par: Moha Moukhlis
 
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