merci pour le partage La Louve ! Citation
La Louve** a écrit:
Bonne lecture, et belle soirée à vous
Jonas, mon amour
Des larmes de tendresse ont déferlé sur mes joues à la lecture de ta lettre. Pourquoi n’avons-nous jamais évoqué notre rencontre? Cela me semblait tellement évident. Pour moi il n’y avait rien à ajouter, cela aurait enlevé à la magie de notre histoire. Aujourd’hui je me dis que peut-être, si nous l’avions fait, nous aurions pu ne fût-ce que percevoir le mystère qui l’entourait. Tu trouveras sûrement bien étrange que mon souvenir soit un peu différent du tien.
Je me souviens de ce jour comme si c’était hier. Chaque détail est gravé dans ma mémoire. Il pleuvait. J’ai toujours aimé la pluie, surtout la pluie d’orage, son odeur âcre et le silence que dégagent les gouttes lorsqu’elles s’écrasent sur le sol encore chaud. J’étais assise seule sur le banc, notre banc, laissant l’eau du ciel laver mes peurs et mes doutes, écoutant le tambourinement délicat du silence. Souvent à cette époque, je parlais pour moi-même, je me racontais des histoires, d’une voix à peine audible, juste pour moi, espérant combler le vide qui depuis toujours avait accompagné mes pas. Ce gouffre béant dans mon cœur, bien que nous ne l'ayons jamais évoqué ensemble, je sais que tu sais exactement de quoi je parle. Mais ce jour-là, à l’instant exact où tu es venu te poser à mes côtés, j’avais enfin décidé de l’accepter, de l'accueillir même. Je ne voulais plus lutter, plus avoir peur, juste me laisser porter, écouter ce qu’il avait à me dire. Et tu es arrivé. Nos regards se sont croisés l’espace d’une seconde. Tu avais l’air agard, perdu dans des pensées profondes.
Tu t’es assis, tu as regardé un instant le paysage qui s’étendait sous nos yeux, le saule déversant ses larmes dans l’étang, le bois tout derrière, et le ciel en pleurs. Et puis tu as fermé les yeux, tu as enfoui ton visage entre tes mains et j’ai vu tout ton corps secoué de violents sanglots. Alors je t’ai parlé, de la voix la plus douce que j’ai trouvée en moi. Je t’ai parlé comme je l’avais fait si souvent souvent pour moi-même. J’ai laissé les mots venir sans chercher à rien contrôler. Je n’ai d’ailleurs pas le moindre souvenir de ce que j'ai pu te dire. Je crois que cela n’a pas vraiment d’importance. Je pouvais ressentir tous les soubresauts de ton cœur, le barrage cette souffrance trop longtemps contenue s’était brisé. Il y avait tant de tristesse, de solitude, de colère. Mais peu à peu, à mesure que mon âme parlait à la tienne, tu t’es apaisé, ta respiration s’est calmée, le déluge de tes yeux a fini par se tarir, il n’y avait plus que toi, moi et le silence… Rien d’autre n’existait plus.
Puis il y a eu cet éclair, le fracas du tonnerre et la blessure du saule s’est ouverte sous nos yeux abasourdis. Je n’ai pas eu peur. Je me sentais en sécurité, lovée dans cette bulle qui nous abritait, qui n’appartenait qu’à nous. Tu as alors plongé tes yeux dans les miens. Tu souriais. L’éblouissement avait formé un halo de lumière autour de toi. Tu ressemblais à un ange. Tu as pris ma main dans la tienne. Au contact de ta peau, le frisson de l’évidence m’a parcourue toute entière. C’était toi. J’ai su que c’était toi, qu’il n’y aurait jamais personne d’autre. Ton cœur battait dans le mien, mon cœur battait dans le tien. Et nous ne sommes plus quitté… jusqu’à ce que le destin nous enlève l’un à l’autre.
Mais il ne faut pas que tu sois triste Jonas, même si mon cœur saigne de ne pouvoir te rejoindre, je sais désormais que jamais nous n’avons été séparés, je sais que c’est la douleur qui voilait les battements de ton cœur dans le mien.
Je n’ai plus peur à présent, et je sais que toi non plus. Ta présence m’habite un peu plus à chaque mots que je pose sur cette page. Notre séparation a désormais pris pour moi, pour toi, une toute autre saveur. Oui, je savoure le délice de t’aimer plus fort que tout, au-delà de l’espace, du temps, des corps.
Avec tout mon Amour,
Anaelle
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