Menu
Connexion Yabiladies Ramadan Radio Forum News
Jeunes chercheurs : les salaires et la peur ???
j
5 avril 2005 16:09

Les salaires et la peur
-----------------------------
[email protected]

Pour remobiliser les jeunes chercheurs, il faut augmenter les rémunérations, assouplir les passages public-privé et recruter


Dans le climat actuel d'agitation de la communauté scientifique, certaines voix s'élèvent en faveur de plus de flexibilité, donc plus de précarité, pour les chercheurs. L'exemple invoqué est celui des Etats-Unis. Je crois que c'est une mauvaise idée. Si on la suit, elle conduira au démantèlement de notre recherche. Le contexte économique et psychologique de la France aujourd'hui n'est pas celui des Etats-Unis.


Certes, la fonctionnarisation des chercheurs, en 1982, fut une erreur. Non pas parce qu'elle garantissait un emploi aux chercheurs publics - bien que contractuels, ils bénéficiaient de facto de cette sécurité - mais parce que le statut de la fonction publique - qui n'a pas été conçu pour la recherche - bureaucratise la gestion des organismes et des laboratoires qui, par vocation, ont besoin de souplesse et de vitesse de réaction. En outre, cette réforme a conduit à des baisses de rémunération effectives.


Dans une période de fort chômage, revenir en arrière avait, cependant, un effet symbolique désastreux. Alors que les meilleurs jeunes éléments du monde médical ou du monde des ingénieurs se détournent de la recherche ou choisissent de partir à l'étranger, comment espérer les attirer à nouveau en les précarisant et en les rémunérant moins? Pourquoi choisiraient-ils une vie non seulement monastique, mais précaire, alors que s'offrent à eux des existences normales et des carrières mieux payées? La crainte du lendemain aurait des conséquences directes catastrophiques. Un jeune chercheur insécurisé préférera s'engager sur des sujets peu risqués pour assurer le stock de publications nécessaire à la pérennité de son emploi, plutôt que de travailler sur des questions plus innovantes et plus aléatoires. La peur de l'avenir est si grande aujourd'hui chez les jeunes qu'il faut les rassurer dès qu'ils ont fait leurs preuves, c'est-à-dire après les années de stage postdoctoral.


Les règles de la fonction publique interdisent de prendre l'avis d'experts étrangers non fonctionnaires pour promouvoir un chercheur, obligent à des concours nationaux longs et coûteux pour remplacer les personnels de laboratoire ou encore limitent l'attribution des primes. Elles doivent être assouplies par la création d'un statut des chercheurs et des enseignants du supérieur dérogatoire. Mais en conservant, bien sûr, la garantie de sécurité de l'emploi. Pour remobiliser les jeunes, il faut d'urgence augmenter fortement les rémunérations. Il faut ensuite assouplir les règles de passage entre recherche à plein temps et enseignement supérieur, ou rendre plus fluide la circulation entre recherche publique et recherche privée. Et enfin annoncer un plan pluriannuel de recrutement. On redonnera alors de l'espoir à nos jeunes scientifiques les plus brillants et on les incitera, peut-être, à s'orienter vers les beaux mais difficiles métiers de la recherche scientifique, indispensables au pays.




L'Express du 04/04/2005
 
Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com
Facebook