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Les Israéliens adoptent ce que l'Afrique du Sud a laissé tomber
S
23 décembre 2006 01:48
Les Israéliens adoptent ce que l'Afrique du Sud a laissé tomber / Par John Dugard

John Dugard est un professeur de Droit sud-africain qui enseigne aux Pays Bas. Il est actuellement le Rapporteur Spécial (journaliste) sur la Palestine pour le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies.

De nombreux aspects de l'occupation israélienne surpassent ceux du régime d'Apartheid.
La destruction à grande échelle par Israel des maisons palestiniennes, le nivellement des terres agricoles, les incursions militaires et les assassinats ciblés des Palestiniens dépassent de loin toutes les pratiques similaires dans l'Apartheid d'Afrique du Sud. Aucun mur n'a été jamais construit pour séparer les Noirs et des Blancs.

Le nouveau livre de l'ancien Président Jimmy Carter, "Palestine : La Paix et non l'Apartheid" relance la polémique par son allégation qu'Israel pratique une forme d'Apartheid.

En tant qu'ancien militant contre l'Apartheid Sud-Africain qui se rend régulièrement dans les Territoires Palestiniens pour évaluer la situation des droits de l'homme pour le Conseil des droits de l'homme des Nations-Unies, la comparaison à l'Apartheid sud-africain m'intéresse tout particulièrement.

Au premier abord, les deux régimes sont très différents. L'Apartheid était un système de discrimination raciale institutionalisée que la minorité blanche d'Afrique du Sud utilisait pour conserver son pouvoir sur la majorité noire.

Il se caractérisait par le refus d'accorder des droits politiques aux Noirs, la fragmentation du pays en des secteurs blancs et dles secteurs noirs (appelés Bantustans) et par l'imposition aux Noirs de mesures arbitraires conçues pour obtenir la supériorité des Blancs, une séparation raciale et la sécurité des Blancs.

Le "système des laissez-passer", qui cherchait à empêcher la libre circulation des Noirs et à limiter leur entrée dans les villes, a été imposé rigoureusement.

Les Noirs "étaient déplacés de force", et l'accès à la plupart des aménagements publics et à de nombreux types d'emploi leur était refusé. Le système a été imposé par un appareil sécuritaire brutal dans lequel la torture jouait un rôle significatif.

Les Territoires Palestiniens – Jérusalem-Est, la Cisjordanie et Gaza – sont sous occupation militaire israélienne depuis 1967.
Bien que l'occupation militaire soit tolérée et réglementée par le droit international, on la considère comme un régime indésirable qui devrait se terminer aussi vite que possible.

Depuis près de 40 ans, les Nations Unies ont condamné l'occupation militaire israélienne, ainsi que le colonialisme et l'Apartheid, puisqu'ils sont contraires à l'ordre public international.

En principe, l'objectif de l'occupation militaire est différent de celui de l'Apartheid.
Elle n'est pas conçue pour être un régime oppressif à long terme mais comme une mesure intérimaire qui maintient la loi et l'ordre dans un territoire suite à un conflit armé et en attendant un accord de paix. Mais ce n'est pas la nature de l'occupation israélienne de la Palestine.

Depuis 1967, Israel a imposé son contrôle des Territoires Palestiniens comme une puissance colonisatrice, sous l'apparence de l'occupation.

Il a saisi de manière permanente les régions les plus enviables des territoires : les lieux Saints à Jérusalem-Est, Hébron et Bethléem et les régions agricoles fertiles le long de la frontière occidentale et dans la Vallée du Jourdain - et a installé ses propres "colons" juifs sur l'ensemble de la terre.

L'occupation israélienne des Territoires Palestiniens possède de nombreux éléments de la colonisation. En même temps, elle comporte plusieurs des pires caractéristiques de l'Apartheid.

La Cisjordanie a été fragmentée en trois secteurs : le Nord (Jénine et Naplouse), le centre (Ramallah) et le sud (Hebron) - qui ressemblent de plus en plus aux Bantustans de l'Afrique du Sud.

Les restrictions à la libre circulation imposées par un système rigide d'autorisations renforcé par environ 520 checkpoints et barrages routiers ressemblent au "système des laissez-passer" de l'Apartheid , mais avec une sévérité qui va bien au-delà.

Et l'appareil de sécurité est réminiscent de celui de l'Apartheid, avec plus de 10.000 Palestiniens dans les prisons israéliennes et des allégations fréquentes de torture et de traitement cruel.

De nombreux aspects de l'occupation israélienne surpassent ceux du régime d'Apartheid.
La destruction à grande échelle par Israel des maisons palestiniennes, le nivellement des terres agricoles, les incursions militaires et les assassinats ciblés des Palestiniens dépassent de loin toutes les pratiques similaires dans l'Apartheid d'Afrique du Sud.
Aucun mur n'a été jamais construit pour séparer les Noirs et des Blancs.

Suite à la mobilisation mondiale contre l'Apartheid, on aurait pu s'attendre à ce qu'un même effort international concerté s'oppose au traitement répugnant des Palestiniens par Israel. Au lieu de cela, on trouve une communauté internationale divisée entre l'Occident et le reste du monde.

Le Conseil de sécurité est empêché d'agir en raison des vétos des États-Unis et de l'abstention de l'Union Européenne. Et les Etats-Unis et l'Union Européenne, en agissant de connivence avec les Nations Unies et la Fédération Russe, ont en effet imposé des sanctions économiques aux Palestiniens pour avoir, par des moyens démocratiques, élus un gouvernement considéré comme inacceptable pour Israel et l'Occident.

L'engagement à mettre un terme à l'occupation, à la colonisation et à l'Apartheit a été oublié.

Dans ces circonstances, les Etats-Unis ne devraient pas être étonnés si le reste du monde commence à perdre foi dans son engagement envers les droits de l'homme.

Certains Américains - avec raison - se plaignent que d'autres pays ne s'inquiètent pas de la violence au Soudan qui déchire la région du Darfour et des situations analogues dans le monde.

Mais puisque les Etats-Unis conservent une attitude de deux poids-deux mesures concernant la Palestine, ils ne devraent pas s'attendre à une coopération des autres pays dans la lutte pour les droits de l'homme.
 
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