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INTERVENTION DE FELIPE PÉREZ ROQUE, MINISTRE CUBAIN, A L'UNESCO
M
13 octobre 2005 13:06
INTERVENTION DE SON EXCELLENCE M. FELIPE PÉREZ ROQUE, MINISTRE DES
RELATIONS EXTÉRIEURES DE LA RÉPUBLIQUE DE CUBA, À LA TRENTE-TROISIÈME
SESSION DE LA CONFÉRENCE GÉNÉRALE DE L'UNESCO





Monsieur le Président,




Je vous félicite de votre élection et vous souhaite, au nom de la délégation
cubaine, beaucoup de succès dans la conduite de nos travaux.

Je souhaite aussi transmettre mes condoléances aux victimes des récentes
catastrophes naturelles au Pakistan, en Inde et dans d'autres pays du Sud de
l'Asie, ainsi qu'à celles du Guatemala, d'El Salvador, du Mexique et d'autres
pays centraméricains.

Je tiens encore à exprimer ma satisfaction d'être ici, aujourd'hui, 10 octobre,
qui marque le cent-trente-septième anniversaire du jour où les Cubains ont lancé
leurs luttes pour l'indépendance nationale et l'abolition de l'esclavage.

Monsieur le Président,

L'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture est
née voilà soixante ans pour « contribuer au maintien de la paix et de la
sécurité » dans un monde encore sous influence de la barbarie de la seconde
guerre mondiale, « favorise[r] la connaissance et la compréhension mutuelle des
Nations », « imprime[r] une impulsion vigoureuse à l'éducation populaire et à la
diffusion de la culture » et « aide[r] au maintien, à l'avancement et à la
diffusion du savoir ». Nous nous étions dits « résolus à assurer à tous le plein
et égal accès à l'éducation ».

Or, soyons franc, nous ne vivons pas précisément dans ce monde de paix,
d'harmonie, d'accès général à la culture et à la science, d'éducation pour tous
et de justice sociale qu'augurait la Constitution de l'Unesco.

Nous visons dans un monde où plus de 2,6 milliards de personnes survivent avec
moins d'un ou deux dollars par jour ; où 11 millions d'enfants meurent tous les
ans de maladies qu'on pourrait parfaitement prévenir ; où 600 000 femmes pauvres
meurent à l'accouchement ; où 852 millions de personnes, dont 300 millions
d'enfants, se couchent tous les soirs la faim au ventre. Que dirons nous aux
parents des presque 20 000 enfants qui mourront de faim aujourd'hui, tandis que
se déroule notre réunion ?

Les plus de 800 millions d'adultes qui ne savent ni lire ni écrire, ou les 103
millions d'enfants qui ne vont pas à l'école bénéficient ils par hasard de la
justice, de la liberté et de la paix que prône l'Unesco ?

Quelles sont donc les causes de cette situation ? Pourquoi, sur notre planète,
plus la richesse augmente, et plus l'inégalité croît ?

En tout premier lieu, monsieur le Président, à cause de l'ordre économique,
social et politique injuste qu'on a imposé à notre planète et qui empêche le
développement, la paix, le progrès et la culture à la majorité de nos peuples.

Nous vivons dans un monde marqué au sceau de la violence, où nos pays sont
menacés de guerres préventive, d'interventions et de « changements de régime ».
Où l'on nous intoxique par un modèle de consommation effrénée qui n'a rien à
voir avec l'éducation, la science ou la culture, qui épuise au contraire de
précieuses ressources naturelles et détruit notre environnement.

Nous visons dans un monde où l'on refuse toujours plus aux pays sous développés,
la majorité, l'accès aux technologies et aux progrès de la science, tout en leur
volant leurs ressources humaines. Ainsi, l'Amérique latine et les Caraïbes ont à
elles seules envoyé 1 200 000 professionnels aux USA et dans deux autres pays
développés, ce capital humain équivalant à 120 milliards de dollars.

L'ordre international en place n'est pas compatible avec les postulats de
l'Unesco. Comment pourrait-il l'être quand les pays sous développés paient trois
dollars au titre du service de la dette par dollar reçu au titre de l'Aide
publique au développement, si bien que leur dette ne cesse de croître à l'infini
?

Nous vivons dans un monde où le droit à une information véridique et objective
est impossible à exercer. Tant que l'information sera une marchandise, elle
restera la propriété de ceux qui ont de l'argent. Les médias, toujours plus
concentrés et monopolistiques, répondent aux intérêts de leurs patrons
oligarchiques, non à la vérité. La campagne que le gouvernement des Etats-Unis
finance contre Cuba, dont 2 300 heures de transmissions illégales de radio et de
télévision, en est une preuve irréfutable.

Il ne peut y avoir de démocratie sans justice sociale. Il ne peut y avoir de
liberté sans droit à l'éducation et à la culture. Il ne peut y avoir de droits
de l'homme sans égalité ni équité. Les riches et les pauvres ne jouiront jamais
des mêmes droits, même si ceux-ci sont proclamés sur du papier.

Nous vivons dans un monde où l'on applique des blocus génocides qui frappent des
peuples entiers, tel celui que le gouvernement des Etats Unis impose à Cuba
depuis quarante-cinq ans. Où le président de la nation la plus puissante de la
Terre - rêvant d'un objectif impossible - s'est permis de déclarer que, une fois
notre patrie conquise, il y liquiderait l'industrie biotechnologique sous
prétexte que, comme l'affirme son Plan pour Cuba, « elle n'est pas appropriée
par son ampleur et ses dépenses à une nation foncièrement pauvre ». Comment une
affirmation de ce genre correspond-elle aux objectifs de l'Unesco ? Ou encore,
comment la prohibition faite aux scientifiques étasuniens de participer à des
réunions à Cuba peut-elle être en accord avec « l'échange international de
représentants de l'éducation, de la science et de la culture » que l'Unesco doit
promouvoir ?

Quoi qu'il en soit, monsieur le Président, ne pourrions-nous pas nous demander
si l'Unesco ne s'est pas trompée de cap ? Les réunions, les tables rondes, les
forums les plus divers et les débats savants du plus haut niveau sont, certes,
utiles et nécessaires, mais nous croyons fermement qu'il est temps que les
activités de notre Organisation deviennent bien plus opérationnelles et
dynamiques. Que l'Unesco exerce vraiment le leadership dans les domaines qui
doivent constituer sa priorité.

Le moment n'est-il donc pas venu pour l'Unesco de lancer une puissante campagne
universelle en vue de liquider totalement l'analphabétisme dans le monde entier
durant la prochaine décennie et de dépasser ainsi les objectifs de Dakar ? Au
Venezuela, 1 400 000 personnes ont été alphabétisées en un an et demi, si bien
que le pays sera déclaré officiellement le 28 octobre prochain « Terrritoire
libre d'analphabétisme ». Nous félicitons la délégation de la République
bolivarienne du Venezuela. Nous nous réjouissons d'avoir contribué à cette noble
tâche en fournissant la méthode « Oui, je peux », comme le ministre de
l'Éducation de ce pays frère en a informé cette Conférence.

Monsieur le Président,

Cette Conférence générale examinera trois importants documents internationaux à
la préparation desquelles Cuba a participé activement.

Nous estimons que la Convention sur la protection de la diversité des contenus
culturels et des expressions artistiques revêt une importance particulière, à
plus forte raison quand on prétend imposer aujourd'hui plus que jamais au monde
la culture et la pensée uniques. Voilà pourquoi le gouvernement des Etats-Unis
s'oppose d'une manière obsessionnelle à ce projet qui exige le respect des
identités et le fruit créateur de chaque peuple, promouvant par là la
compréhension et la solidarité nécessaires à la paix dans le monde.

Nous soutenons aussi la Déclaration relative à des normes universelles en
matière de bioéthique et la Convention internationale contre le dopage dans le
sport.

Monsieur le Président.

De Cuba, ma patrie, je me bornerai à dire ceci : malgré le blocus et les
agressions, elle compte plus de 700 000 diplômés universitaires ; tous ses
enfants vont à l'école et tous ses enseignants ont un emploi. En quarante ans,
nous avons diplômé presque 43 000 étudiants du tiers monde, tandis que 18 000
jeunes de 107 pays sont aujourd'hui des boursiers dans notre pays. À cette
heure-ci, 25 000 médecins, personnels infirmiers et techniciens de la santé
cubain sauvent des vies et soulagent des douleurs dans des dizaines de pays.

Nous avons aussi décidé qu'entre le Venezuela et Cuba, dans les dix prochaines
années, nous prêterions des soins hospitaliers gratuits à six millions de
Latino-Américains et de Caribéens pour les sauver de la cécité et nous
diplômerions 200 000 médecins de notre région. Notre époque réclame des faits,
non des paroles creuses !

Nous savons très bien, nous les Cubains, ce que veut dire l'accès à l'éducation,
à la science, à la culture et au sport. Nous connaissons aussi le prix de la
dignité et de la souveraineté. D'où notre confiance absolue dans la valeur des
idées. Ce n'est pas pour rien que la Révolution cubaine a quasiment inauguré sa
victoire en tirant Don Quichotte à un million d'exemplaire et que Fidel a
affirmé à notre peuple : « Nous ne te disons pas : "Crois". Nous te disons :
"Lis". »

Cuba, monsieur le Président, croit, tout comme son Héros national, José Martí,
que « la Patrie est l'humanité » ; qu'être cultivé est la seule manière d'être
libre ; que savoir lire est savoir marcher et savoir écrire est savoir s'élever
; que l'enseignement doit être, dès l'école primaire, scientifique et doit
convertir l'homme en résumé vivant du monde qui l'a précédé, afin qu'il soit un
homme de son époque et de son peuple, capable de contribuer à créer une société
« avec tous et pour le bien de tous », parce que l'heure a sonné dans le monde
que le forces de la construction l'emportent sur celles de la destruction.

Nous croyons à l'Unesco et aux valeurs qu'elle représente. Nous croyons au
multilatéralisme et à la coopération internationale. L'Unesco, monsieur le
Président et messieurs les délégués, peut continuer de compter, pour atteindre
ses nobles objectifs, sur le soutien du peuple généreux et solidaire de Martí,
du Che et de Fidel.

Je vous remercie.




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