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Les grossesses au-dessus de 35 ans sont de plus en plus fréquentes
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2 juillet 2005 14:48
Les chiffres sont là pour en attester : depuis vingt-cinq ans, le nombre de grossesses tardives augmente sensiblement. Selon les statistiques de l'Insee, 17,5 % des bébés nés en 2004 ont une mère âgée de 35 ans et plus (et 3,3 % une mère de plus de quarante ans), alors qu'ils étaient 14 % en 1995 et 8 % en 1980. Dans un avis rendu public fin avril, le Haut Conseil de la population et de la famille a jugé ce phénomène "préoccupant", qualifiant la progression de l'âge de la première maternité de "véritable problème de santé publique" (Le Monde du 28 avril).

Mettant en avant l'augmentation des risques sanitaires pour la mère (diabète, hypertension artérielle, accouchement difficile, mortalité maternelle) et pour l'enfant (trisomie 21, grande prématurité avec risque de handicap, naissances multiples avec bébés de faible poids), le Haut Conseil tire la sonnette d'alarme sur un phénomène qui touche la plupart des pays européens.

Au-delà de l'inquiétude qu'il peut susciter chez les femmes, le ton de cet avis ne fait pas l'unanimité parmi les professionnels de santé. "Je suis un peu choqué par cette alarme, par ce discours paternaliste" , réagit le docteur Bruno Carbonne, secrétaire général du Collège national des gynécologues et obstétriciens, qui "fulmine" lorsque certaines femmes lui racontent qu'elles se sont fait "engueuler" par leur gynécologue à cause de leur âge. "Il faut les informer, pas les angoisser ni les stresser. Malheureusement, il n'y a pas un message unique qui convient à tout le monde, ajoute-t-il. Une femme qui fume ou qui a un diabète à 30 ans aura plus de problèmes lors d'une grossesse qu'une femme de 40 ans en bonne santé."

"NE PAS TOUT MÉLANGER"

Si les Françaises font des enfants de plus en plus tard ­ l'âge moyen à la première maternité est passé de 24 ans en 1974 à 29,6 ans en 2004 ­, elles n'en font pas moins qu'avant. Avec 794 400 naissances en 2004, la France occupe toujours le deuxième rang en Europe (derrière l'Irlande) par l'indice de fécondité. "En matière de grossesses tardives, il faut avoir un discours nuancé et ne pas tout mélanger", fait valoir Nicole Mamelle, spécialiste d'épidémiologie périnatale et membre de l'Audipog (Association des utilisateurs de dossiers informatisés en pédiatrie, obstétrique et gynécologie). "Sinon, à force d'angoisser les femmes, on risque d'empêcher les troisièmes enfants", résume-t-elle.

Car, à y regarder de plus près, les grossesses tardives recouvrent des situations hétérogènes. Pour Nicole Mamelle, il est nécessaire de différencier les femmes qui ont leur premier enfant (primipares) à un âge avancé de celles (multipares), largement majoritaires, qui accouchent sur le tard de leur deuxième, troisième ou quatrième enfant. Or, selon les données de l'Audipog, entre ces deux catégories de femmes, les risques sanitaires liés à l'âge n'augmentent pas dans les mêmes proportions. "Beaucoup de choses sont écrites sans que soit précisé qu'elles concernent davantage les primipares", regrette Mme Mamelle.

Les femmes qui ont leur premier enfant tardivement ne représentent que 18 % des mères entre 37 et 39 ans et 16 % de celles de 40 ans et plus. Pour elles, concevoir un enfant peut en effet s'avérer un peu plus compliqué. La nature est ainsi faite que la fertilité féminine, mais aussi masculine, diminue avec l'âge. De 5 % à 25 ans, la proportion de femmes stériles approche les 30 % à 40 ans.

Le développement de l'aide médicale à la procréation (AMP) et la médiatisation de quelques cas extrêmes de mères de 60 ans ont donné l'impression que la médecine allait réparer les fatalités de la nature. "Le plus dramatique, finalement, est de découvrir un problème d'infertilité à 38 ou 40 ans, car on n'a plus beaucoup de temps pour trouver une solution", souligne Bruno Carbonne.

"L'AMP n'améliore pas le problème de vieillissement des ovocytes ", insiste le docteur François Olivennes, responsable de l'unité de médecine de la reproduction de l'hôpital Cochin, à Paris. Là encore, plus la femme est âgée, plus les chances d'être enceinte après une insémination artificielle s'amenuisent. "De 25 % à 28-30 ans, le taux de succès tombe à moins de 15 % à 38 ans et à peine à 5 % à 42 ans ", indique Jacques de Mouzon, spécialiste des questions de reproduction à l'Inserm, qui souligne que "l'AMP n'est pas une réponse médicale satisfaisante pour retarder l'âge de la grossesse".

Mais, pour certaines femmes, ces pourcentages passent bien après leur désir d'enfant. Si la chance, aussi faible soit-elle, d'être enceinte existe, elles la tentent. D'autant, souligne le docteur Olivennes, que "certains médecins ne savent pas dire non".

Il en est de même des problèmes sanitaires accrus pour les femmes enceintes après 35 ans. Que pèse, par exemple, le risque d'hypertension ­ qui passe, chez les primipares, de 4 % avant 35 ans à 7 % après ­ ou celui de la grande prématurité ­ 3,7 % à 38 ans contre 2 % avant 35 ans ­ face à l'envie d'être mère ? "Bon nombre d'indicateurs sont perceptibles en termes de santé publique, mais pas à l'échelle de risque absolu pour une femme", insiste Nicole Mamelle. Les chiffres deviennent abstraits, et "les discours de santé publique ne portent pas forcément leurs fruits", constate-t-elle.

"Certes, les complications augmentent, mais pas dans de grandes proportions" , complète le docteur Olivennes. Et puis, ajoute le professeur Francis Puech, chef du service de pathologies maternelles et foetales au CHU de Lille, "les femmes acceptent de prendre plus de risques parce qu'elles ont conscience que la grossesse est moins dangereuse qu'à l'époque de leur mère" grâce aux progrès du dépistage et du suivi médical.

"CARRIÈRE ET VIE FAMILIALE"

"Il ne faut pas reporter la culpabilité sur les femmes, car les grossesses tardives sont aussi imposées par la société, notamment à cause de la difficulté de concilier parcours professionnel et vie familiale", insiste le docteur Carbonne. "Plutôt que de tirer la sonnette d'alarme médicale, il faudrait s'intéresser aux raisons socio-économiques qui poussent les femmes à différer leur grossesses" , renchérit le docteur Olivennes. Pour lui, il faut aussi améliorer "l'information sur les questions de fertilité" pour en finir avec "la confusion qui est faite entre absence de grossesse et ménopause".

Refusant l'expression "véritable problème de santé publique" retenue par le Haut Conseil de la population et de la famille, le professeur Puech estime pour sa part qu'il est préférable d'insister sur "les mesures d'encadrement médical que nécessite une grossesse tardive, afin que les femmes fassent leur choix en toute connaissance de cause".
Sandrine Blanchard

source : lemonde.fr
[b]"Quand le dernier arbre aura été abattu - Quand la dernière rivière aura été empoisonnée - Quand le dernier poisson aura été péché - Alors on saura que l'argent ne se mange pas."[/b] [i]Géronimo[/i]
 
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