Elue à l’Académie Française lors de la séance du 16 juin 2005, Assia Djebar sera reçue ce 22 juin sous la coupole de la vénérable institution du Quai Conti. Ecrit et publié en Allemand, un nouvel ouvrage vient par ailleurs de lui être consacré. Schreiben auf der Grenze. Postkoloniale Geschichtsbilder bei Assia Djebar (Écrire sur les frontières. Images postcoloniales de l’histoire chez Assia Djebar) de Béatrice Schuchardt traite de l’importance des médias, surtout de l’image et de la peinture, dans la reécriture postcoloniale de l’histoire franco-algérienne chez Assia Djebar.
Une nouvelle édition d’Ombre sultane est parue en février aux éditions Albin Michel. Durant le mois de novembre, Les Enfants du nouveau monde, le troisième roman d’Assia Djebar paru en 1962, qui met en lumière les histoires et les questionnements d’une galerie de personnages féminins au coeur de la guerre d’indépendance, a été publié en anglais sous le titre de Children of the New World.
Avec un jury composé notamment de Tahar Ben Jelloun (Maroc), Björn Larsson (Suède), Predrag Matvejević (Croatia) et de Luis Sepúlveda (Chili), la 25è édition du prix Grinzane Cavour pour la Littérature, destiné à honorer "des auteurs italiens et étrangers qui ont consacré leur vie à la littérature", a vu récompenser Assia Djebar du prix de la Fondazione CRT pour la Lecture. Cette distinction lui a été remise lors d’une cérémonie à Turin, en présence d’une vingtaine d’écrivaines réunies à la faveur d’une table ronde intitulée "Ecriture dévoilée, paroles et femmes du Maghreb à l’Iran". Le 29 juin dernier, l’écrivaine a en outre été nommée docteur honoris causa de la section Langues et Littérature de l’université d’Osnabrück.
Deux semaines auparavant, elle était élue, au 2è tour du scrutin, au fauteuil n° 5 de l’Académie Française. La prestigieuse institution devait élire un successeur au fauteuil vacant du juriste Georges Vedel, disparu en 2002, pour lequel Assia Djebar s’était portée candidate. Lors de la séance du 16 juin, sur trente deux votants, les voix obtenues se répartissaient comme suit : Assia Djebar (14, puis 16 voix), Dominique Fernandez (9, 11 voix), Michel Tack (aucune voix), bulletins blancs (4, 2), bulletins blancs marqués d’une croix (5, 3).
L’écrivaine algérienne devenait ainsi la première personnalité maghrébine a être admise, parmi les 40 "Immortels", sous la coupole de l’Académie française créée en 1635. C’est aussi la cinquième femme à y siéger depuis l’élection de Marguerite Yourcenar en 1981 et la seconde personnalité africaine après Léopold Sédar Senghor en 1983. La nouvelle académicienne s’est déclarée "contente" de son élection, "pour la reconnaissance que cela implique pour la littérature francophone de tous les autres pays, y compris évidemment du Maghreb, [...] mais aussi de tous les pays africains". Elle avait alors confié son espoir que cela encouragerait en retour la traduction en arabe d’auteurs francophones en Algérie, au Maroc et en Tunisie.
En 2004 en Italie, après Antonio Tabucchi en 2001, suivi d’Amin Maalouf et de Vassilis Vassilikos, en 2002 et 2003, la dixième édition de Dedica a été consacrée à Assia Djebar. On y a notamment vu projeter l’un de ses deux films, La Nouba des femmes du mont Chenoua, qui fut primé à Venise en 1979. A cette occasion, Assia Djebar a invité Cheikha Rimitti pour un concert. Ce fut ensuite au tour de la prestigieuse messe du livre de Francfort de lancer une invitation à quelque deux cent auteurs du monde arabe, dont l’Egyptien Naguib Mahfouz, prix Nobel de littérature 1988 qui ne pouvait se déplacer, le Palestinien Mahmoud Darwish, le Libano-Syrien Adonis et l’Algérienne Assia Djebar. Lors de l’édition 2000, l’écrivaine s’était déjà vue décerner le prix de la Paix attribué par les éditeurs et les libraires allemands pour une oeuvre littéraire qui plaide "en faveur des femmes des sociétés musulmanes". Toujours en 2004, Assia Djebar a été citée pour le prix Nobel de littérature aux côtés de l’Américaine Joyce Carol Oates et de la Danoise Inger Christensen.
Auteur prolifique (romans, poésie, nouvelles, essais, théâtre) et réalisatrice, née Fatma-Zohra Imalayene en 1936 à Cherchell, Assia Djebar est la plus célèbre écrivaine algérienne de langue française. Son oeuvre interroge l’histoire et des destins de femmes dans les sociétés musulmanes. Après le lycée à Blida et Alger, elle est la première étudiante algérienne à entrer à l’École normale supérieure de Sèvres. Elle interrompt ses études au moment de la grève des étudiants algériens de 1956 et entame une carrière littéraire inaugurée avec La Soif (1957) et Les Impatients (1958). Réfugiée à Tunis à la fin de la guerre d’Algérie, elle y travaille en qualité de journaliste, puis, à la faveur d’un D.E.S. en Histoire, de professeur à Rabat et Alger. 1962 voit publier Les Enfants du nouveau monde où Assia Djebar éclaire déjà, à sa façon, la présence des femmes dans la guerre d’indépendance. En 1965, elle quitte une nouvelle fois l’Algérie pour la France où parait Les Allouettes naïves en 1967. De 1974 à 1980, Assia Djebar retourne enseigner la littérature française et la sémiologie du cinéma à l’Université d’Alger. Durant cette période où elle s’arrête de publier, elle se met à l’étude de la langue arabe et réalise deux films.
A nouveau à Paris où elle s’est établie depuis 1980, elle publie Femmes d’Alger dans leur appartement. Son doctorat ès lettres entrepris à l’université Paul Valéry de Montpellier lui ouvre les portes d’une carrière universitaire poursuivie aux Etats-Unis. De 1997 à 2001, Assia Djebar a dirigé le Centre d’études françaises et francophones de la Louisiana State University. Elle enseigne aujourd’hui à la New York University.
Traduite dans une vingtaine de langues, la romancière a été primée à plusieurs reprises en Belgique, aux Etats-Unis, en Italie, au Canada, en France et en Allemagne. Assia Djebar est notamment lauréate du prix Maurice Maeterlinck (Bruxelles, 1995), du Literary Neustadt Prize (USA, 1996) pour sa contribution à la littérature mondiale, du Marguerite Yourcenar Prize for Literature (USA, 1997) pour Oran, langue morte et du prix de Palmi (Italie, 1998). Docteur honoris causa des Universités de Vienne (1995), de Concordia (Montréal, 2000) et plus récemment d’Osnabrück (2005), elle était élue en 1999 à l’Académie royale de Belgique, au siège de Julien Green, avant d’être nommée Commandeur des Arts et des Lettres en France, en 2001, et de recevoir la Grande médaille (Vermeil) de la Francophonie décernée par l’Académie française. (photo D. R.)
Comme par hasard, c'est encore une femme qui défends les femmes contre leur soumission, dans les Etats arabes islamiques. Est-elle membre de NPNS ? Son admission à l'Académie serait-il encore un coup des français ?
je ne pense pas qu elle soit idiote pour adherer a npns nous voulons tous defendre les femmes. parceque une femme, c est notre mere, notre soeur, notre femme... tout est dans la maniere de presenter les choses. maintenant je ne connais cette femme, peut etre que je me trompe.
un style fluide, des romans trés bien construits. elle a une sacré maitrise du français. et puis surtout une femme qui n'a jamais eu peur de denoncer la domination masculine dans ..... certains pays.
C'est le rôle positif de la colonisation... Après le très (trop?) francophile et très (trop!) françafricain Lépold Sedar Senghor (chantre de la francophonie, mais qui embastilla son premier ministre Mohammed Dia), nous voilà avec miss Assia. Quand elle quittera l'Academie et les Immortels, Chirac la remplacera, comme VGE remplaça LSS à sa mort.