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Faits divers, la folie médiatique !
S
5 janvier 2007 18:29
Faits divers, la folie médiatique ! par alain vernon.


Certains esprits chagrins auront bien remarqué la propension qu’ont les medias à développer outrageusement leur rubrique faits divers à l’antenne depuis quelques années. Il est plus que fréquent de compter jusqu’à 15 voire 20 minutes de faits divers dans les journaux télévisés dès l’ouverture à 13 ou 20H. A croire que le reste de l’actualité s’évapore devant l’importance grandissante d’une marée de faits divers tous plus jubilatoires les uns que les autres.

Comment s’opère cette véritable folie médiatique ? D’abord, ne jamais arriver en conférence de rédaction sans son indispensable « Parisien » ou « France Soir » sous le bras pour ne rien oublier de l’horreur que vivent les français chaque jour. Un viol odieux dans telle banlieue, un crime abject dans telle commune à cent bornes de Paris, un procès de la légitime défense dans tel département qu’on fera couvrir en urgence par un bureau régional, un accident sanglant sur une autoroute, des inondations en Bretagne ou des congères en montagne, rien n’échappe aux fins limiers du fait divers à la télévision !

Une fois ce travail de listing établi des horreurs vécues par nos pauvres concitoyens, il suffit de multiplier les équipes de tournage sur les lieus décrits par nos confrères de la presse écrite qui eux font un vrai travail journalistique sur la rubrique « faits divers ». Parties vers 10H dans le meilleur des cas, ces équipes récoltent à toute vitesse des images et des témoignages parfois volés pour monter en 30 minutes vers midi un sujet d’une minute trente sans avoir visionné toutes les images le plus souvent. A 13H, pour l’ouverture du journal, on balance un semblant « d’enquête » qui sera déclinée jusqu’à 13H15. S’enchainent ensuite des sujets destinés à faire pleurnicher la France des concierges, du prix de l’essence à l’échouage de baleines sur une cote américaine, des angoisses des tous petits lors de la rentrée scolaire à la psychose des bergers victimes des méchants loups dans les Pyrénées…

On atteint ainsi gentiment 13H25, il reste juste le temps de traiter en « off » le sport, la culture ou l’actualité internationale.

Alors, si un journaliste demande pourquoi l’information économique et sociale, les grands problèmes du monde directement liés à notre comportement collectif ou les raisons profondes qui ont conduit les français a voter NON au référendum européen par exemple sont si peu souvent abordés, deux réponses lui sont faites :

« ça n’intéresse pas les français ! »

« pas le temps coco ! »

L’après-midi est tout aussi passionnant. Comme on a tourné en catastrophe pour le 13H, on retourne faire quelques images et témoignages pour le 20H et le rendu antenne est lui aussi encore plus jubilatoire qu’à la mi-journée car les pauvres salariés victimes de ces salopards de grévistes de la SNCF n’ont bien sur pas pu apprécier à leur juste valeur les horreurs vécues par leurs concitoyens. Et ainsi de suite pendant des mois et des années…

Lorsque par souci de débat éditorial dans l’entreprise, les délégués élus du personnel demandent pourquoi le fait divers a envahi notre société et donc notre antenne, les responsables de l’information s’étonnent qu’on puisse en débattre, affirment au contraire leur fierté de faire une télévision qui répond aux « aspirations des téléspectateurs » et s’assurent que pareille propagande syndicale ne vienne plus perturber le « travail de la rédaction ».

Voilà ce qui constitue aujourd’hui le quotidien des journalistes élus des rédactions soucieux du débat éditorial refusé par les directions !

Il ne nous échappe pourtant pas que cette politique volontariste du fait divers répond à un dessein bien précis : en faisant pleurnicher la France entière sur le sort de malheureux, on évite surtout de parler de ce qui fâche. La condition sociale et économique des travailleurs du monde entier, les responsabilités des entreprises dans le sort fait aux salariés, les vrais raisons de nos comportements en matière de politique étrangère, la montée de la pauvreté, les responsabilités réelles de la dégradation de notre environnement, les scandales financiers liés à la spéculation internationale et boursière, les raisons de l’implantation croissante des mafias dans nos sociétés, les conditions objectives du développement du chômage, les raisons de la marchandisation de la culture, la santé ou l’éducation…Bref, de quoi fabriquer 30 minutes d’information un peu plus intéressantes que celles qu’on nous déverse chaque jour sur fond de crise sécuritaire, morale ou sanitaire.

Pendant qu’on s’apitoie sur le sort de malheureux, on renforce aussi le sentiment dans l’opinion que ces fâcheux faits divers sont plus importants que la misère du reste du monde. Ajourez à toute cette folie médiatique la désagréable sensation que le comportement individuel est la seule chose digne d’intérêt pour nos décideurs d’opinions et vous comprendrez mieux pourquoi les faits divers ont envahi nos journaux télévisés.

Que faire pour enrayer le processus ? Sans doute exiger de nos futurs élus de la nation une autre approche de l’information à la télévision, avec une autre philosophie et d’autres priorités. C’est aussi l’un des enjeux fondamentaux de la campagne électorale !
Mano Solo : Mes amis ne pleurez pas, le combat continue sans moi, tant que que quelqu'un écoutera ma voix, je serai vivant dans votre monde à la con
L
5 janvier 2007 19:24
Un Air de Famille,

ce sujet est bon, et j'ajouterais que a force de prendre les gens pour des imbéciles, j'ai bien peur que le peuple soit entrainé dans l'abrutissement

je m'imagine le niveau intellectuel, un exemple en humour qui n'est pas contestable :

[www.koreus.com]

ok le gars est peut être ému, mais quand on s'imagine que le public répond cela après être invité à ne répondre que s'il connait la réponse

56 % pensent que le soleil gravite autour du soleil, c'est à désespérer


A force de tirer le niveau par le bas, j'ai bien peur que le problème ne soit pas qu'au niveau de l'information politique et sociale
L
5 janvier 2007 19:27
Pour en revenir aux fait divers il faut non pas voir seulement le style presse "people" mais aussi le niveau de l'analyse qui est jointe au reportage

bien traité, même un fait divers pourrait être instructif
C
5 janvier 2007 23:39
Nour 3liik Air de Famille,ce sujet tombe très bien parce que ce soir même je me suis dit que j'allais regarder pour une fois le JT de 20h et j'ai choisir celui de France 2 avec "Mme Borloo"aux commandes.
Mal m'en a priiiiiiiiis!Que des faits divers en ouverture dont la triste histoire de Samy Nacéri!
Pas la peine de te préciser que j'ai zappé très vite,sur al Jazeera où j'ai appris que Chirac avait prononcé un discours très intéressant!!!
C
5 janvier 2007 23:42
J'ajoute qu'on est pas épargnés même sur ce forum.Il n'est que voir les fils ouverts sur le mangeur de coeur ou l'horrible assassinat d'une pauvre étudiante (fût-elle marocaine).Franchement,je préfére encore la lecture d'Edgar Allan Poe.
Si c'est de l'actualité internationale,ça,alors je n'y comprends plus rien.
t
5 janvier 2007 23:54
salam

... mais si y'aurait pas de téléspecateurs friant de ces faits d'hiver les jt ne se rueraient pas sur la dernière histoire farfelue pour en faire leur 20h...

en france arte fait de la resistence..pourvu que ca dure...

salam
C
6 janvier 2007 00:02
Les faits d'hiver?Mais ce n'est pas encore de saison avec l'été indien qu'on a.Pas la peine de faire suer le burnous du téléspectateur donc.smiling smiley
L
6 janvier 2007 20:00
en consultant des archives sur une presse régionale (où relater les faits divers est naturel) y a quelques jours je suis tombé sur une affaire de bagarre dans une école dans les années 50,cela n'avait pas fait d'esclandre au niveau national et le sujet ne fut pas repris les jours suivant que par un unique entrefilet

Il faut bien se rendre compte aussi qu'une société inscrite dans le progrès social et s'attaquant plus ou moins inefficacement à la résolution des problèmes majeurs, en vient a aborder plus a fond de problème qui ne relevaient pas du fait divers autrefois

par exemple la violence dans les écoles étaient monnaie courante autrefois, accepté voir même parfois vue comme une normalité, elle devient aujourd'hui un sujet sensible, c'est peut être optimiste de ma part d'y voir une autre sensibilité que d'y voir systématiquement une dérive sur les faits divers
 
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