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États-Unis : Un ouvrage dénonce le soutien inconditionnel de Washington à...
S
17 octobre 2007 18:12
Lorsqu’en 2006, l’ambassadeur de France aux Etats-Unis a invité la candidate à l’élection présidentielle, Hillary Clinton, celle-ci lui a adressé ce message très direct : « Je ne parle avec aucun ambassadeur, sauf un, l’ambassadeur d’Israël. » Cet échange confirme l’importance cardinale d’Israël dans la politique intérieure des Etats-Unis.

L’influence profonde du lobby pro-israélien dans la diplomatie américaine au Moyen-Orient est indiscutable. Mais jusqu’où va-t-elle ? Ce soutien sert-il les intérêts américains ? Telles sont les questions explorées par le Lobby pro-israélien et la Politique étrangère des Etats-Unis (1), un livre dont débat le tout-Washington depuis sa sortie, voilà quelques semaines. « Aucun autre essai académique n’a eu un tel impact, écrit la New York Review of Books, depuis la publication du livre de Samuel Huntington le Choc des civilisations [1993]. » Compte tenu des tabous historiques et sémantiques qu’elle aborde, cette étude a demandé un courage considérable à ses deux auteurs, John Mearsheimer, de l’université de Chicago, et Stephen Walt, de Harvard. Les deux universitaires ont conscience de marcher sur un champ de mines.

A la suite d’un article à l’origine de l’ouvrage actuel publié dans la London Review of Books, en 2006, « nous avons été dénoncés comme antisémites [...] par des éditorialistes du Jerusalem Post, du New York Sun, du Wall Street Journal et du Washington Post », constatent-ils dans leur préface. « Dès qu’on critique Israël ou l’Aipac [le Comité des affaires publiques américano-israélien, qui s’intitule sur son site web « le lobby pro-israélien en Amérique », ndlr] , on est sûr d’être accusé d’antisémitisme. C’est la tactique diffamatoire classique. La plupart des gens hésitent à aborder ce genre de questions, en raison de ces attaques », dit Stephen Walt. Leurs pressentiments ont été amplement confirmés. La charge a été sonnée par Eliot Cohen, un professeur de l’université Johns-Hopkins, dans une opinion, publiée dans le Washington Post, intitulée « Oui, c’est antisémite ». Eliot Cohen reproche aux auteurs, non sans une certaine mauvaise foi, le fait que leur ouvrage ait été applaudi par l’ancien chef du Ku Klux Klan.

D’autres critiques ont qualifié les universitaires de « sombres obsédés du complot ». Et ce n’était qu’un début. En septembre 2007, un livre a été publié pour dénoncer les deux auteurs : les Mensonges les plus mortels, le lobby israélien et le mythe du contrôle juif. Selon son auteur, Abraham Foxman -président très controversé, y compris au sein de la communauté juive américaine, de l’Anti-Defamation League-, l’idée « pernicieuse » qu’il existe un lobby israélien doté d’une influence hors de proportion sur la diplomatie des Etats-Unis « fait partie du mythe antisémite traditionnel du complot juif ». « Les stéréotypes antisémites haineux refont surface et deviennent acceptables », s’inquiète Abraham Foxman.

Que disent Walt et Mearsheimer ? Qu’il y a un lobby pro-israélien composé d’organisations juives, mais aussi d’éditorialistes, d’hommes d’affaires et de « chrétiens sionistes ». Cette importante minorité fondamentaliste, qui vote républicain, croit littéralement que le Christ reviendra lorsque les juifs auront repris possession de la « Terre sainte ». « Ce n’est en aucun cas, insistent les auteurs, un mouvement unifié doté d’une direction, et ce n’est pas un complot ou une conspiration qui contrôle la diplomatie américaine », mais plutôt « une coalition disparate d’individus et d’organisations qui œuvre pour aiguiller la politique américaine sur une voie pro-israélienne ».

Les auteurs n’ont aucun mal à démontrer la nature exceptionnelle de la relation entre les Etats-Unis et Israël. Entre 1972 et 2006, les Etats-Unis ont mis leur veto à 42 résolutions des Nations Unies critiquant Israël. En 2006, pendant qu’Israël bombardait le Liban, la Chambre des représentants a adopté, par 410 voix contre 8, une motion de soutien inconditionnel à Israël.

L’ouvrage devient discutable lorsqu’il affirme que, sans le lobby pro-israélien, « la guerre [d’Irak] n’aurait presque certainement pas eu lieu ». La démonstration : « La quasi-totalité des néoconservateurs est fortement engagée aux côtés d’Israël », ajoutent-ils. Mais les vrais maîtres d’œuvre de la guerre d’Irak demeurent George W. Bush et le vice-président, Dick Cheney. Et c’est oublier que plusieurs son­dages, comme le concèdent les auteurs, ont démontré que la communauté juive amé­ricaine était plus opposée à ­cette guerre que l’Américain moyen.
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17 octobre 2007 18:13
SUITE ET FIN :

L’influence du lobby serait telle qu’il compromettrait l’intérêt national américain, avancent les auteurs. L’alliance entre les Etats-Unis et Israël, utile pendant la guerre froide, suscite l’hostilité des pays arabes à l’égard des Etats-Unis, qui sont la cible des terroristes islamistes. Et s’il n’est pas dans l’intérêt de Washington de poursuivre son soutien inconditionnel à Israël, c’est que le lobby pro-israélien y est pour quelque chose. Pour Stefen Walt et John Mearsheimer, les Etats-Unis devraient considérer Israël comme un « pays normal », car son existence, selon eux, n’est plus en danger : « L’influence politique du lobby et sa sagacité en termes de relations publiques ont découragé les leaders américains à rechercher des politiques moyen-orientales conformes à leurs intérêts, qui protégeraient aussi Israël de ses pires erreurs. L’influence du lobby, pour résumer, est mauvaise pour les deux pays. » Ils préconisent « une discussion franche et civilisée sur l’influence du lobby ».

(1) John J. Mearsheimer et Stephen M. Walt, éditions la Découverte, 20


Source : [www.interet-general.info]
 
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