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la course au pouvoir
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27 octobre 2005 07:25
Françaises, Français, Nicolas Sarkozy vous spamme
Le président de l'UMP inaugure l'e-mailing politique venu des Etats-Unis.

par Thomas LEBEGUE
QUOTIDIEN : mardi 27 septembre 2005





C'est l'histoire d'un internaute qui achète un billet de train sur le site de la SNCF. Au passage, il coche une case autorisant une société Internet, Maximiles, à lui envoyer des mails promotionnels. Quelque temps plus tard, il reçoit un mail intitulé : «M. Monchy, participez au débat pour 2007.» Il l'ouvre par curiosité, et là, surprise : la photo de Nicolas Sarkozy s'affiche sur son écran, accompagnée d'un discours légèrement anxiogène : «La France affronte une crise politique, économique et sociale particulièrement grave [...] Il est de mon devoir de participer à l'oeuvre de redressement et de préparer les élections législatives et présidentielle de 2007 [...] Cliquez ici pour me faire connaître votre souhait d'être informé et de participer au débat.» Le tout signé de la main du président de l'UMP.

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Stupeur de l'internaute, qui ne s'attendait pas à recevoir un tel message, d'autant qu'il est sympathisant socialiste : «J'ai vécu ça comme une violation, je croyais que la propagande politique était encadrée, confie Gilles Monchy. J'ai trouvé ça très choquant car c'est finalement par l'intermédiaire de la SNCF, une entreprise d'Etat, que je reçois un mail... d'un ministre d'Etat.» Il raconte aussi son petit coup de déprime quand il a découvert que la simple lecture de ce mail lui avait rapporté 10 points de fidélité chez Maximiles.

Légalité. Cet internaute fait partie des 300 000 «victimes» de la première vague d'e-marketing politique jamais organisée en France. D'autres lecteurs de Libération en ont fait l'expérience et ont fait parvenir au journal des mails parfois surprenants, certains appelant carrément à verser son obole au parti majoritaire («Faites un don pour aider l'UMP à préparer 2007 et à amplifier le débat»). Un internaute est allé jusqu'à déposer plainte auprès de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) pour usage abusif de son adresse électronique. La Cnil, qui n'a pas encore jugé le fond de l'affaire, estime pourtant que «cet envoi est a priori conforme à la loi puisqu'il s'agit de bases de données opt-in». Traduction : toutes les personnes concernées ont, à un moment donné, coché la case autorisant l'envoi de mails promotionnels. Et se sont retrouvées dans plusieurs bases de données (Maximiles, mais aussi Lotree ou Effibases), qui ont ensuite loué leur adresse à l'UMP. Stricto sensu, les tracts envoyés par Sarkozy ne sont donc pas assimilables à des spams, ces courriers indésirables qui arrivent dans les boîtes mail sans aucun contrôle. Chez Maximiles (qui n'a en fait rien à voir avec la SNCF), on reconnaît que ce mailing a certes suscité quelques «réactions épidermiques» chez plusieurs clients, mais on souligne que l'opération a été effectuée en toute légalité.

La méthode, directement importée des Etats-Unis, a été mise au point par une boîte de communication française, l'Enchanteur des nouveaux médias, dirigée par un ancien collaborateur d'Alain Madelin passé à l'UMP. Satisfait d'un premier test effectué en juillet auprès de 30 000 personnes («pour vérifier qu'il n'y avait pas de rejet massif»), le jeune entrepreneur, Arnaud Dassier, a décidé de passer à la vitesse supérieure après la convention économique de l'UMP du 7 septembre. Nicolas Sarkozy y a présenté son programme économique et voulait vérifier que le message était bien passé parmi ses électeurs.

Ciblage. Ont donc été sélectionnés des internautes a priori réceptifs à la prose sarkozyenne : artisans, professions libérales, cadres supérieurs... 300 000 personnes au total, avec d'inévitables erreurs de ciblage. Mais qu'importe. Selon les chiffres assénés par Dassier, plus de la moitié des personnes ciblées ont ouvert le mail (contre 30 % pour un envoi commercial), et 11 % d'entres elles (contre 6 %) ont cliqué pour aller sur le site Internet de l'UMP.

«Non seulement ça marche, mais c'est beaucoup plus économique et plus écologique, qu'un envoi papier», triomphe Dassier. A 20 centimes d'euro l'adresse, le Big Brother UMP a les moyens d'inonder la France en quelques secondes. La boîte de com choisie par Sarkozy annonce d'ailleurs qu'elle s'apprête à cibler «plusieurs millions de personnes, comme le fait couramment le parti républicain aux Etats-Unis».

Ultime précision : la prochaine vague de «sarkomails», prévue en octobre, ne sera pas «critérisée». En clair, chacun, quels que soient son milieu social ou son appartenance politique, pourra bientôt voir s'afficher la bobine du ministre de l'Intérieur sur son ordinateur. Mais que fait la police ?




 
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