Dans leur bergerie traditionnelle, Naïma et Zahra occultent mal leur joie. La lueur d'espoir retrouvée se lit sur leurs visages arides. La raison: Des chèvres de race alpine, un don/crédit offert par l'association Rosa de Ouarzazate. Mères respectivement de six et deux enfants, elles vantent fièrement les vertus de cette race importée de France. "C'est notre fazenda", lancent-elles sur un ton humoristique et en guise de bienvenue. Bien qu'elles n'aient reçu ce don/crédit qu'un an auparavant, elles s'apprêtent déjà à le rembourser. Et en nature. Une vieille/nouvelle formule de micro crédit en animaux. L'expérience est, certes, étrange. Du moins inhabituelle. Ses résultats dépassent pourtant les prévisions. Le satisfecit de l'organisation française "Elevages sans frontières", bailleur de fonds, est inégalé. La jeune expérience de l'association Rosa, baptisée au nom d'une américaine source d'inspiration de l'initiative, est en tête des projets initiés par cette ONG partout dans le monde. Mais qu'est ce qui distingue ce genre de micro-crédit ? Pas d'argent en espèces. Pas de taux d'intérêt. Pas de remboursement à une quelconque institution financière. Pas de pression sur l'endettée. Juste un passage de dons. Une expérience pilote et singulière en matière de développement local et solidaire. Moins connue et moins suivie, cette forme de crédit ne cesse pourtant de faire tâche d'huile. Des dons de caprins, de ruchers et de poulaillers et bientôt d'ovins, peuvent constituer une alternative majeure pour des petites gens plutôt attirées par des métiers informels sans réel avenir. "Nous avons pu augmenter nos revenus modestes et subvenir, pour l'instant du moins, au besoin familial en lait, mais lorsqu'on arrive à vendre un bouc, à 2000 dh en moyenne, nos budgets se gonfleront manifestement", a tenu à préciser Naima, présidente du groupe des bénéficiaires du village d'Imzebiatn. Une aubaine pour des familles indigentes. Le don de solidarité n'est pas, pour autant, figé dans le temps. L'association Rosa adopte une démarche de solidarité permanente. Une devise gagnante: Recevoir puis donner. Une chaîne de solidarité sans fin. L'ultime objectif reste d'aider ces femmes rurales et leurs familles à améliorer leur quotidien. Un exemple. Deux chèvres de race alpine gestantes sont offertes en tant que don à une femme rurale. Celle-ci doit, six à sept mois après la mise bas, rembourser ce crédit. Pour qui ? A une autre femme rurale nécessiteuse. Mais pas n'importe comment. Le passage de don suit tout un rituel. Le cérémonial est festif. Parée d'embellissements, la chèvre est hissée telle un enfant gâté. Avant de la remettre, la donatrice tient à rappeler à la nouvelle bénéficiaire le devoir de prendre soin d'elle: "Vous devez faire attention à sa santé, à sa nourriture, à sa propreté et n'oubliez pas qu'une femme quelque part en a grandement besoin". C'est dire que les valeurs les plus prestigieuses peuvent être traduites par de simples gestes, auxquels on ne prête souvent pas attention tellement ils sont accessibles et incarnés par sa communauté. "Nous avons lors du diagnostic remarqué que certaines valeurs de solidarité commençaient à se faire de plus en plus rares dans leur fief de prédilection: le monde rural. Grâce à cette initiative, les femmes retrouvent les coutumes d'antan et se montrent plus solidaires et plus coopératives", a expliqué à la MAP, Mme Hassania Kanoubi, présidente de l'association Rosa. Les dons ne s'effectuent pas uniquement de manière individuelle. L'association Tawasna de la commune de Tarmigt dispose d'une quinzaine de chèvres et de deux boucs. Dans quelques mois, leur nombre sera doublé. En attendant la parturition, elles cotisent ensemble pour le forage, le nettoyage de la bergerie, les soins des chèvres malades, le lavage des mangeoires. Le tout dans une dynamique de groupe infaillible, mais aussi créative et prometteuse. "Nous ne comptons pas en rester là, notre action collective s'étendra certainement à d'autres activités, telles que la tapisserie et la poterie", confie Keltoum présidente de Tawasna, qui estime qu'il faut simplement penser désormais la question de la commercialisation dans un cadre coopératif. Rien à craindre, anticipe Hassania Kanoubi. Des produits faits à base de lait de chèvres alpines se trouvent déjà exposés dans les grandes surfaces de la ville, dit-elle. Pour l'instant, nous assurons en tant qu'association le rôle d'intermédiaire, mais envisageons la mise en place prochaine d'une fromagerie moderne. Libellé produit terroir, le fromage Rosa ne manque déjà pas de clients désireux d'encourager ce genre d'économie solidaire. Un certain Mohamed Yunus, banquier des pauvres et prix Nobel de la paix 2006, n'en sera que ravi.
source : menara
Merci d'enrichir le débat , sans dévier du débat .
[b] [center]*****[color=#FF0000] Il n'est point de bonheur sans liberté, ni de liberté sans courage.
Anciennement ( Le marocain_2007 ) [/color] *****[/center] [/b]
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