Devant le palais présidentiel, à Bagdad, vestige prestigieux du règne de Saddam Hussein reconverti en ambassade des États-Unis, Nouri al-Maliki et George W. Bush se serrent la main. - Heureux de vous voir, dit le Premier ministre irakien.
- Je vous remercie de me recevoir, répond le président américain.
Ici, les salamalecs donnent le change et inversent les rôles. Non, Nouri al-Maliki n’accueille pas George W. Bush. L’Américain est ici chez lui. Le maître de maison, c’est lui. L’Irakien est l’invité, l’hôte de passage. Il est venu dans ce palais pour participer à une conférence télévisuelle avec les responsables américains eux-mêmes réunis autour de leur président à Camp David. Et c’est seulement cinq minutes avant qu’il avait été informé de l’arrivée imprévue de Bush.
Lapsus gestuel ? La main traînante de George W. a attiré l’attention. Le président en fait trop. À croire qu’il cherche à atténuer le saugrenu de la situation et à consoler son partenaire.
Il tenait en tout cas à ce voyage. En se rendant à Bagdad, il espérait tirer les dividendes de deux événements majeurs et concomitants : l’élimination d’Abou Moussab al-Zarqaoui et la formation d’un gouvernement d’union nationale, enfin au complet. En donnant un coup de pouce à Maliki et en tablant sur son succès, il espère pouvoir amorcer le retrait de ses troupes, que les Américains réclament de plus en plus. Wishfulling thinking ? Stratégie réaliste ? On ne tardera pas à le savoir.
Mais le risque est grand qu’il ne subsistera de cette visite de Bush, le 13 juin, à Bagdad que cette main sur le dos qui a marqué les esprits. Et choqué. Bush sait-il que les Irakiens sont gens rudes, rugueux, et très chatouilleux sur le chapitre de la dignité ? Il fut un temps où un Irakien n’aurait pas toléré d’un partenaire étranger, fût-il un allié obligé, ce laisser-aller vécu comme une détestable manifestation de familiarité paternaliste.
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