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BOVE : Enquête sur les réseaux du candidat antilibéral
S
27 février 2007 14:20
Bové des champs essaime en banlieue


On les avait croisés sur d'autres luttes. Contre les violences policières, contre la loi interdisant le voile à l'école, contre les séquelles du colonialisme dont seraient victimes les descendants d'immigrés, ou pour la Palestine. On retrouve Omeyya Seddik (du Mouvement de l'immigration et des banlieues, M.I.b), Karim Azouz (du Collectif des musulmans de France) et Youssef Boussoumah (de la Campagne Civile Internationale pour la Protection du Peuple Palestinien et du Mouvement des indigènes de la république) ­ la frange radicale de la contestation issue des cités ­ au sein du collectif «Banlieues et immigration avec José Bové». Le leader paysan a-t-il fait mieux que les responsables des grands partis politiques en s'attirant le vote des quartiers ? «On a rencontré Bové le 21 janvier en marge du rassemblement des collectifs antilibéraux à Montreuil [Seine-Saint-Denis]», raconte Yassin Ayari, membre de l'association Veto ! Garges (Val-d'Oise). «Il est venu tout seul, sans discours tout prêt. Il a avoué qu'il n'avait pas énormément de connaissances de la banlieue. On lui a dit : "On a telle et telle revendication, est-ce que tu peux les mettre parmi les thèmes prioritaires de ta campagne ?"» Bové a dit oui. Et a accepté une autre condition : «Que les problèmes de banlieue soient portés par des gens de banlieue.»


Larzac. Avec d'autres membres du collectif, Bové a tissé des liens plus anciens. «On s'est croisés sur plusieurs histoires. Il a fait des démarches par rapport à nous que les gens en face de lui n'ont jamais faites de leur vie, rappelle Norreddine Iznasni. En 2003, il est venu manifester à Nîmes [où un jeune avait été tué par un gendarme]. En 2004, il est venu au Petit-Bard [à Montpellier] où des familles dont l'immeuble avait brûlé occupaient le gymnase.» En août 2003, le MIB et le Collectif des Musulmans de France ont participé au rassemblement organisé par la Confédération paysanne, sur le Larzac, contre la réunion de l'Organisation mondiale du commerce en septembre à Cancún (Mexique).


Arafat. En décembre 2006, ces tendances s'agrègent au sein de Banlieues et immigration. «On a signé un CDD de deux mois, le temps de la campagne», précise Eros Sana. Point commun entre ces militants ? Ils sont majoritairement arabes ou noirs, «se sont croisés dans des mobilisations diverses depuis vingt ans, comme la Marche des Beurs [en 1983], et sont extrêmement méfiants vis-à-vis du politique et de tout ce qui pourrait remettre en cause l'autonomie de leur engagement», explique Alain Bertho, ancien membre du Comité national du PCF. «C'est la première fois que je vais me mouiller dans un truc comme ça au niveau présidentiel», souligne Norreddine Iznasni.


Parmi leurs revendications : la «lutte contre l'apartheid urbain [...], la xénophobie, le négationnisme historique et culturel, la discrimination et les différentes expressions du racisme, dont l'islamophobie et la négrophobie», des «sanctions fortes contre les violences policières», l' «abrogation» des lois durcissant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers, le droit à l' «autodétermination» des DOM-TOM, la lutte contre «toute forme d'impérialisme».


«Beauf». L'alliance entre le leader paysan et les banlieues peut surprendre. «Bové n'a jamais été en responsabilité, il n'a pas d'ardoise», rétorque Eros Sana, «militant des quartiers» en congé de son poste d'attaché parlementaire de la sénatrice verte Halima Boumédiene-Thiery pour cause de campagne. La prise de position du leader paysan contre la loi interdisant le port du voile islamique à l'école et sa visite au QG de Yasser Arafat à Ramallah alors assiégé par l'armée israélienne ajoutent à sa popularité. «Ça joue, mais il n'y a pas que ça, il incarne aussi une autre manière de faire de la politique», insiste Norreddine Iznasni. Certains doutent toutefois de la réelle attractivité de Bové dans les quartiers : «Il a une image de beauf chez les 25-40 ans qui ne votent pas pour lui. Ils considèrent que c'est un paysan. Ils ne comprennent pas un type qui tape les McDo.» Pour Alain Bertho, au contraire, le côté «lui, il y va», d'un Bové prêt à risquer la prison pour ses convictions, séduit. Tariq Ramadan, intellectuel musulman proche du Collectif des musulmans de France, qui a rencontré le leader paysan à plusieurs reprises, croit pour sa part que le côté «rebelle qui parle un langage assez cru» de Bové joue en sa faveur.


Pour l'heure, l'audience de Bové dans les quartiers est difficile à mesurer. «Un des éléments centraux du vote des banlieues va être la sécurité. Parce qu'il n'y a pas que les jeunes en banlieue, il y a aussi les parents. Or, je ne suis pas sûr que Bové soit vu par eux comme une personne qui l'incarne», explique le politologue Eddy Fougier. Le soutien des jeunes pourrait également être contrarié par l'absence de José Bové d'un certain nombre de combats : «Il a des angles morts, relève encore l'un de ses soutiens. Lors des manifestations anti-CPE ou des émeutes en banlieue, on ne l'a pas entendu.»


Source : [www.liberation.fr]
 
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