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Grand Angle

Hirak de Jerada : Le CNDH recommande une stratégie pour anticiper les tensions sociales

Le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) a réitéré ses recommandations quant au respect du droit de manifester, pour une interprétation favorable aux droits humains lors des interventions des forces de l'ordre. Cet avis a été rendu public, ce vendredi, dans un rapport consacré au Hirak de Jerada.

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Photo d'illustration / DR.
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Dans un rapport consacré aux manifestations de la ville de Jerada, depuis novembre 2017, le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) est revenu sur la chronologie des faits. Sur la base des poursuites, des grâce royales ou des incarcérations ayant suivi les protestations du Hirak, l’institution a estimé important «d’interagir positivement avec les revendications urgentes d’ordre économique et social des habitants de la ville de Jerada et de sa région».

Rendu public ce vendredi, le document souligne la nécessité d’enquêter sur les violences survenues le 14 mars 2018 dans la ville et des blessures qui en ont découlé, suite à une manifestation à Jerada. Le CNDH appelle également à publier les résultats de ces investigations. Pour l’institution, une évaluation s’impose, concernant l’avancement et l’impact du «plan d’action d’urgence» lancé par les autorités régionales, le 14 février 2018, en réponse aux revendication des manifestants.

Tout en appelant à garantir le droit de manifester pacifiquement «même s’il ne se tient pas aux conditions légales» de préavis, le CNDH recommande aussi de faire un inventaire des projets mis en œuvre jusqu’à présent, «dans le cadre de l’interaction des pouvoirs publics avec les demandes des manifestants». Dans le même sens, il plaide pour l’«élaboration de directives nationales qui encadrent l’intervention des forces publiques conformément aux principes internationaux à cet égard», de même que «le respect strict de la dignité des personnes arrêtées».

Des réformes procédurales et pénales respectueuses de la dignité

Réagissant aux arrestations après les manifestations à Jerada, le CNDH est pour «incriminer la violence illégale», «de manière à garantir l’exercice du droit d’expression, de rassemblement et de manifestation pacifique». Sur le volet procédural, il recommande une réforme permettant de renforcer le rôle la défense, lors de la phase préliminaire.

Le Conseil appelle ainsi à modifier les articles 263 et suivants, 300 et suivants et 308 du Code pénal, afin de mieux définir l’outrage à agent public, la désobéissance et la résistance, dans le respect du principe de légalité pénale et de clarté du texte ainsi que son interprétation.

Remontant à la gestion de l’entreprise nationale de Charbonnages du Maroc, le CNDH appelle à questionner la structure sur le respect de ses responsabilités sociales envers les employés licenciés et leurs familles. Dans le même sens, il recommande la poursuite du processus de fermeture des puits abandonnés, encore exploités clandestinement et sans mesures de sécurité visant des ouvriers exploités. Dans ses conclusions, le rapport indique d’ailleurs que la mise en œuvre des projets de développement dans la région est au point mort.

Une stratégie nationale pour anticiper les tensions sociales

Ce rapport a été approuvé à l’unanimité par l’Assemblée générale du Conseil, tenue du 6 au 8 mars dernier, indique un communiqué de l’institution. Le document vise à évaluer la gestion des manifestations du Hirak de Jerada et son impact sur les droits et les libertés, au regard des conventions internationales ratifiées par le Maroc et des garanties prévues par la Constitution.

Il soumet également des «propositions pour une approche de droits humains dans la résolution des différends liés aux revendications des habitants de Jerada, pour tirer des conclusions et éviter que de telles situations ne se reproduisent dans des contextes similaires et dans d’autres régions» du pays.

Présidente du CNDH, Amina Bouayach, a estimé que les manifestations de Jerada illustrent en effet les problématiques de la transition du stade de l’exploitation minière, dans les villes dépendantes de ces activités, à une reconversion économique territoriale après l’épuisement des stocks naturels.

«Cela aurait dû constituer une occasion pour réfléchir à l’élaboration d’une stratégie nationale anticipatrice pour gérer ces évolutions sur les plans économique, social et environnemental dans la ville de Jerada et les zones similaires.»

Amina Bouayach

Pour Amina Bouayach, cette problématique liée au processus d’exploitation minière et de son modèle économique régional «rend inévitable» la réflexion nationale sur une «transition au-delà des mines», dont la durée de vie, quoique longue, reste toujours limitée dans le temps. Il s’agit d’y répondre par des alternatives durables, mais également respectueuses de l’environnement et des spécificités locales.

C’est dans ce sens que la présidente du CNDH alerte sur la nécessité d’adopter rapidement une stratégie concernant les violations des droits économiques et sociaux, compte tenu des conséquences qui peuvent en résulter, susceptibles de conduire à des tensions menaçant la paix sociale.

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