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Grand Angle

Mariage : Attention panique !

Si le mariage est l’une des institutions sociales les plus importantes et les plus sacrées au Maghreb, les chiffres, quant à eux, révèlent un baisse considérable.  Les raisons diffèrent, mais notre priorité n’est plus de repeupler la planète. Pourquoi les jeunes hésitent ils à sauter le pas ? Ont-ils raison de s’inquiéter ? Et surtout, est ce que seuls les hommes paniquent face au mariage ?

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En moins de vingt-cinq ans, l’âge moyen du mariage des maghrébins a connu un recul important. Alors que les filles se retrouvaient fiancées avant leurs vingt ans, il est courant de nos jours que les trentenaires soient encore célibataires (et fières de l’être !).  Si vous pensez aux raisons économiques, vous avez bien raison, mais n’oublions pas aussi cette peur soudaine qu’ont les gens face au «oui pour la vie». 

Les hommes, accusés à tort ?

Combien de fois a-t-on entendu nos sœurs, copines, et collègues se lamenter de tomber sur des hommes phobiques de l’engagement. Aux yeux de quelques hommes, se marier signifie  «le début de la routine dans le couple». Nous avons également une idée ancrée dans nos têtes : ils ne veulent pas se marier, car ce serait la fin de leur vie de séducteur.  Or, la plupart des jeunes maghrébins ne sont pas d’accord. «Oui, nous avons peur, mais pas de perdre les soirées et les trips entre copains» nous dit Ahmed. Selon le jeune homme, ils craignent avant tout de ne pas être à la hauteur d’un chef de famille, et décevoir leur promise.  

Si dans la société occidentale, les jeunes mariés entament leur parcours dans des conditions modestes et construisent leur vie petit à petit, le futur marié maghrébin est censé posséder un logement, une voiture, les moyens d’acheter un beau trousseau, en plus d’un budget conséquent pour la dot et la cérémonie de mariage. «Avec toutes ces conditions, je ne serai pas prêt avant mes 50 ans» plaisante Abdou car, oui, vu comme ça, on les comprend un peu !

Avis pas du tout partagé par Basma. Pour elle, les femmes ne sont plus assises chez elles tranquillement, en attendant que Monsieur ramène le gibier. Basma pense que les femmes actives ne se contentent pas de faire du shopping, elles participent désormais aux dépenses du foyer, mais aussi à la cérémonie de mariage. «Ce dont ils ont peur, c’est de notre ascension», précise la jeune femme.

Oui,  nos princes charmants ont peur de perdre leur liberté chérie, de notre évolution ou de la responsabilité, mais  il y a des raisons à cela. Nous faisons des études plus poussées, et nous voulons gravir les échelons de la vie active avant de pouponner.  De plus, nous avons également un peu peur d’eux. Nous développons une crainte face à ces jeunes maghrébins, coincés entre cet homme libre et fier, et ce Monsieur qui veut une fée du logis et pense que virilité rime avec force.

Oui, nous avons peur les uns des autres, nous craignons de sauter le pas, mais il faut dire aussi que la vie moderne ne nous facilite pas la tâche…

Une peur justifiée ?

La plupart des jeunes disent ne pas avoir peur du mariage en soi, mais de l’échec de celui-ci. Dans le monde entier, un couple sur trois finit devant le tribunal au bout de cinq ans. «Enfant de parents divorcés, il est hors de question de faire subir un tel supplice à mes enfants», témoigne Ghita, 28ans, encore loin de se faire passer la bague au doigt. La jeune femme voudrait attendre encore un peu, «pour être sûre», mais de quoi ? Ghita hausse les épaules et avoue une certaine peur de l’abandon.

Etre issu d’une famille éclatée n’est pas la seule raison d’avoir peur du divorce. Parfois, des mariages dans l’entourage n’arrivent pas à la séparation, mais ne nagent pas dans le bonheur, ce qui ne donne pas une image très positive de la vie à deux. Une relation ou une rupture douloureuse à la fin de l’adolescence ou au début de la jeunesse peut également freiner toute envie de se marier.

Ne pas tenter pour ne pas échouer, voilà une idée pas très censée pour nos mères et nos grands-mères. «Ces jeunes se cachent derrière cette raison» affirme Fatima, 55ans. Elle pense qu’ils n’ont aucune peur du mariage, mais qu’ils n’en ont simplement plus besoin. Selon elle, la libération des mœurs a fait que les couples vivent ensemble, et «s’essaient au mariage». Avis contredit par Lamia, 26ans, en couple depuis deux ans. «Oui, nous vivons presque ensemble, nous pouvons faire ce que nous voulons, mais j’ai vraiment peur d’un éventuel mariage» Pour la jeune fille, vivre ensemble n’implique que les deux personnes. Un mariage unit les deux familles, et ce n’est pas gagné d’avance selon elle.

Certains (et certaines)  pointent la crise économique du doigt. Les jeunes savent qu’ils peuvent à tout moment tomber dans le chômage, et se retrouver sans argent.  «Se retrouver sans ressources quand on est tout seul est une chose,  nous pouvons retourner chez les parents, crécher chez les copains et se nourrir de pâtes» plaisante Faissal. A deux ou à trois, ce serait plus difficile de sortir la tête de l’eau. La crise du logement n’encourage pas non plus. Si l’on pouvait auparavant vivre avec sa famille ou sa belle-famille, la plupart des couples veulent d’abord avoir un nid d’amour avant d’être unis pour la vie.

Les sociologues disent que la baisse est plutôt récente, et que le taux n’est pas encore alarmant. En plus, si nous continuons à ce rythme, nos enfants feront exactement le contraire, et se marieront plus tôt.

Si les contes de fée nous ont parlé de prince charmant, de château et nous ont gavé de «ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants», la vie moderne nous rappelle, à travers un proverbe japonais, qu’à la loterie de l’amour, il ne suffit pas d’avoir le bon numéro, il faut être soi-même un bon numéro…

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