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Grand Angle

L’influence religieuse du Maroc pour un retour au calme au Mali

Usant de son influence religieuse, le Maroc mène une médiation au Mali. Elle est venue s’ajouter aux efforts de la CEDEAO.

Publié
Ibrahim Boubacar Keïta, le 10 août 2018, à Bamako. / Ph. Michele Cattani - AFP
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Depuis plusieurs semaines, un front s’est ouvert au Mali, fragilisant davantage le «processus de paix» de 2015. Ses principaux protagonistes sont le président Ibrahim Boubacar Keïta, au pouvoir depuis 2013, et son ancien «allié», l’imam Mahmoud Dicko. Les différends entre les deux hommes se règlent désormais dans la rue. Le religieux de 66 ans est la figure apparente d’une coalition hétéroclite, baptisée le «Mouvement du 5 juin», qui réclame le départ du chef de l’Etat.  

Les protestations vont crescendo et inquiètent aussi bien les voisins que les principaux acteurs internationaux au Sahel. La Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a ainsi dépêché sur place une délégation, conduite par l’ancien président nigérian Goodluck Jonathan (2010-2015), en vue de rapprocher les positions des deux parties.

Le royaume et le facteur religieux      

Hautement concerné par tout ce qui se passe au Mali, le Maroc a mené sa propre médiation, révèle l’hebdomadaire Jeune Afrique. L’ambassadeur marocain à Bamako, Hassan Naciri, aurait convaincu le président Keita et l’imam Dicko de s’engager dans une trêve, notamment après que la manifestation du 10 juillet a Bamako ait dégénéré en violents affrontements entre des jeunes et les forces publiques, causant 10 morts et plus d'une centaine de blessés dans les rangs des manifestants. Des édifices publics ont été aussi attaqués et portent encore les stigmates de la colère des protestataires.  

«Si la médiation marocaine a réussi ce serait surtout grâce à l’influence religieuse du royaume au Mali», explique à Yabiladi Ali Ansari, expert en affaires maliennes. «L’imam Mahmoud Dicko, présenté comme le chef du Mouvement du 5 juin, est un salafiste traditionnel. Il a été hospitalisé à Rabat en 2018 sur ordre du roi Mohammed VI», précise-t-il.

Notre interlocuteur attribue aussi un rôle à «Chérif Abouyé Haïdara, une autre figure religieuse de la contestation, connue pour sa proximité avec le Maroc», dans la «réussite» de l’initiative de Rabat. «C’est un influent membre d’une section (Hamaliste) de la zaouïa Tijanie qui jouit d’une aura dépassant les frontière de son pays. Il compte des fidèles en Mauritanie et dans le sud algérien. Les visites de Haïdara au Maroc sont fréquentes. Sa dernière remonte en effet à janvier 2020», indique Ansari.

La médiation marocaine favorisera-t-elle un retour au calme dans ce pays sahélien ? «La situation au Mali est difficile. Le Mouvement du 5 juin est un ensemble hétéroclite d’ambitions personnelles à la recherche d’une place sur l’échiquier politique et ayant leurs propres agendas et intérêts politiques qui sûrement vont s’affranchir de la tutelle des religieux», répond Ansari.

Outre l’apport de religieux proches du Maroc dans la pacification du Mali, l’expert insiste sur la libération impérative de Soumaila Cissé, l’ancien adversaire malheureux d’Ibrahim Keita aux présidentielles du 12 août 2018, qui est otage chez le groupe jihadiste la Katiba Macina. Son enlèvement, survenu le 25 mars 2020, continue de soulever des interrogations dans le pays.

Article modifié le 18/07/2020 à 18h01

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