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Grand Angle

Maroc : Quand et comment peut-on faire un don de sang ?

Dans les centres de transfusion sanguine au Maroc, les stocks de sang sont souvent au plus bas. Des appels aux dons sont lancés pour couvrir les besoins, parfois vitaux, mais certains donneurs ont eu la surprise de se voir éconduire. Le point sur les conditions pour être un donneur.

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Photo d'illustration / DR.
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Peut-on donner son sang lorsqu’on a déjà voyagé dans certaines zones du monde ? Un tatouage permanent exclut-il un futur donneur ? A ces questions, les personnes désireuses de sauver des vies en donnant leur sang se confrontent à toutes les réponses possibles, avec des éléments parfois contradictoires.

En dehors d’infections connues pour exclure certaines personnes des donneurs, d’autres exemptions sont invoquées, mais seulement sur une durée déterminée. Sur les réseaux sociaux, certains internautes marocains ont eu la surprise de se voir éconduire en raison d’un tatouage ou encore d’un séjour en Afrique subsaharienne.

Le continent est concerné par le classement de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), en termes de risques d’infection au paludisme. Dans son rapport de 2019, l’OMS a indiqué que 213 millions de cas dans le monde (93%) ont été enregistrés en Afrique, suivie de l’Asie du Sud-Est (3,4%) et la Méditerranée orientale (2,1%).

«Au Maroc, le contrôle de sang répond à des normes extrêmement strictes, ce qui explique que ses structures soient agréées par l’OMS, grâce à la recherche systématique d’hépatites B, C, de syphilis, du paludisme et d’autres pathologies infectieuses», indique à Yabiladi Dr. Jaâfar Heikel, épidémiologue, infectiologue.

Des exemptions temporaires ou à vie régies par la loi

Au Maroc, le don de sang est régi par le dahir 1.95.133 du 18 juillet 1995, portant promulgation de la loi 03.94 relative au don, au prélèvement et à l’utilisation du sang humain. Il est également soumis au décret 2.94.20. Dans son article 5, ce texte énonce que «ne peuvent faire don de leur sang les sujets présentant une des pathologies suivantes : néphropathies chroniques, endocrinopathies chroniques, diabète, cirrhose, hépatite aiguë ou chronique, syndrome d’immunodéficience acquise (SIDA), ulcère, asthme, hémopathies chroniques, cancer, angor, infarctus ; les sujets ayant séjourné en zone impaludée ; les toxicomanes (par voie intraveineuse)».

«Ceci n’empêche pas de donner son sang, dans le respect des durées d’exemptions prévues pour certains cas», explique Dr. Heikel, qui souligne que ce don «est même crucial au Maroc pour sauver des vies, à condition de bien préciser les données épidémiologiques, afin que les centres dédiés sachent quels prélèvements peuvent être effectués ou pas, dans le respect de la sécurité sanitaire des donneurs et des patients dans le besoin».

Des formulaires dans les centres régionaux de transfusion sanguine indiquent aux donneurs la durée de ces exclusions, selon les cas. Obtenu par Yabiladi, l’un d’eux explique en effet qu’en cas d’une récente vaccination, il faudra attendre trois mois avant de pouvoir faire un don de sang. Cette durée est de deux semaines, en cas de sérothérapie d’origine animale (sérum antitétanique ou antiscorpionique). En cas de sérothérapie d’origine humaine, elle augmente à trois mois. Si de récents soins dentaires ont été effectués, une saignée ou un rasage chez le coiffeur, il faudra attendre six mois.

La même durée est prévue si une intervention chirurgicale sans transfusion de produits sanguins a été réalisée, si le futur donneur a eu une injection avec des seringues réutilisables, ou s’il a subi une fibroscopie ou une coloscopie. Il en est de même en cas d’un récent tatouage ou piercing. Après une tuberculose pulmonaire, il faudra attendre cinq mois.

Si le donneur a déjà été transfusé, montre des symptômes de vitiligo, souffre de SIDA ou a déjà eu une hépatite, il ne peut définitivement plus faire de don.

Les périodes épidémiques nécessitent une analyse à long terme

Dans le questionnaire, le futur donneur est par ailleurs tenu d’indiquer s’il souffre d’hypertension artérielle, de diabète, d’asthme, de maladie cardiaque, rénale, pulmonaire et vasculaire, de troubles neurologique (notamment l’épilepsie), ou encore de troubles psychiatriques. Ce questionnaire permet également de préciser si le donneur a séjourné dans une zone impaludée, ou s’il a habité en Angleterre au moins un an, entre 1980 et 1996.

Pour les zones connues par des épisodes de contagion au paludisme, l’éligibilité peut être rétablie au bout de quelques mois, en fonction de l’état de santé du donneur. En Suisse ou encore en France par exemple, les dons des personnes ayant vécu en Angleterre durant la période de l’épidémie de vache folle sont remis en question. Même si cette épidémie remonte à plus de 20 ans, le risque d’une infection existe toujours. A l’Université de Zurich, des chercheurs ont indiqué l’année dernière que la période d’incubation pourrait atteindre jusqu’à 40 ans.

Compte tenu de la grande influence des facteurs épidémiques sur le don de sang, la question pourrait se poser dans les années à venir, concernant les personnes qui ont été infectées par le SARS-CoV-2. La science devra y répondre.

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