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Grand Angle

Maroc : Les méfaits de la surinformation et des fake news en temps de crise

Au Maroc, les autorités ont mis en garde contre les fake news, appelant les citoyens à la vigilance. L’instantanéité et la surinformation, combinées aux réseaux sociaux font qu’aujourd’hui, des fausses informations circulent, s’amplifient et impactent, selon les sociologues.

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Photo d'illustration. / DR
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De nos jours, l’instantanéité et la surinformation ne sont pas qu’un atout. Elles engendrent des situations de panique qui tendent à se généraliser. Les réseaux sociaux, créés initialement pour garder contact, se transforment ainsi, dans certains cas, en canaux pour véhiculer des fake news, impactant la société et les individus et amplifiant les crises.

C’est la raison pour laquelle le ministère de l’Intérieur a appelé ce mercredi à la vigilance face à la diffusion d'informations mensongères concernant le coronavirus, attribuées à des parties officielles à travers des techniques de nouvelles technologies. Hier, le ministre de l’Education nationale a démenti une information qui lui a été attribuée sur une fermeture d’école à cause du coronavirus.

Au sein de la société, les rumeurs, qui laisseront place à une forme plus compliquée comme les fake news, ne sont pas un phénomène nouveau, nous déclare le sociologue Abdeljebbar Boucetta. «Les êtres humains recherchent des informations et des nouvelles depuis la nuit des temps. Les fake news existent depuis des siècles», ajoute-t-il.

Mais aujourd’hui, «ce type d’information change de façon de circuler. Internet et les réseaux sociaux deviennent aujourd’hui à la fois un canal d'information et de fake news, étant donné que presque tout le monde a les moyens d'accéder à l'information, de la partager et même de la produire», analyse-t-il.

De plus, «la diffusion de nouvelles étaient une mission exclusivement portée par les journalistes et les médias alors que de nos jours, tout le monde peut être journaliste, apporter, partager et produire des informations», complète Abdeljebbar Boucetta.

Marocains et réseaux sociaux, un usage erroné

De son côté, le sociologue Fouad Belmir rappelle aussi qu’avant, l’information, aussi abondante aujourd’hui, «était rare, tel un trésor dans les coffres de l’élite». «Il y a une soif intarissable d’aller chercher, d’avoir et de partager l’information. Avec cette abondance et le contexte mondial, nous sommes devenus une société de l’information et du savoir», ajoute-t-il. Le sociologue rappelle aussi que dans certains cas, «l’absence d’information avérée met la société dans un état où les gens cherchent des explications partout».

Dans le monde, comme au Maroc, l’accès facile à l’information s’est accompagné d’un boom pour les technologies de l’information et de la communication et des réseaux sociaux. Toutefois, pour le cas du Maroc, «tout le monde n'est pas apte à utiliser ces technologies pour faire cette mission» d’informer l’autre, précise Abdeljebbar Boucetta. «Au lieu d'utiliser Internet de la bonne manière et les réseaux sociaux pour une fin utile, nous diffusons simplement des nouvelles et des informations, parfois négatives, souvent erronées ou fausses», regrette-t-il.

«Certains partagent des choses sur Internet juste pour obtenir des Like, des partages et des vues. Tout le monde court après ça, partageant, produisant et reproduisant des informations pour obtenir de la notoriété ou soigner une image.»

Abdeljebbar Boucetta

Pour le sociologue, «même si les autorités interviennent pour appliquer les règles et les lois, les Marocains ne sont toujours pas conscients de l'impact de leurs comportements sur les réseaux sociaux». «Nous oublions qu’on vit dans un Etat, qui a des institutions officielles. Lorsqu’il s’agit d’informer les citoyennes et les citoyens marocains sur des questions qui les tracassent, il y a des canaux institutionnels dont la mission est de renseigner les gens», complète Fouad Belmir.

Eduquer et développer l'esprit critique

Le sociologue met aussi l’accent sur la nécessité pour les citoyens de distinguer les sources dignes de foi des autres. «Les réseaux sociaux ne doivent pas être une source d’information», insiste-t-il, mettant en avant «la peur, la phobie et une situation qui rend les gens plus malades et pessimistes», à cause des fake news. «Cela peut conduire au chaos et à la pagaille», avertit-il.

«Malheureusement, dans notre école et notre société, nous n’avons pas appris aux enfants dès le plus jeune âge d’utiliser son esprit critique et de ne pas tout assimiler, et donc aller vérifier l’information et être sûr de ce que nous avons diffusé. L’éducation est une solution stratégique, bien que nous ayons besoin de solution immédiate.»

Fouad Belmir

Pour son collègue Abdeljebbar Boucetta, «l’éducation sur l'utilisation d'Internet, comment faire la différence entre les vraies nouvelles et les fausses, et savoir que nous sommes légalement responsables de tout ce que nous partageons en ligne», sont de mise. «La propagation de fausses nouvelles a plusieurs conséquences négatives, dont la perte de la confiance, surtout lorsqu’on commence à douter de tout», ajoute-t-il.

Pour lui, ces «fausses nouvelles qui provoquent la panique doivent être considérées comme une violence symbolique». «Chaque fois que vous ouvrez Facebook, vous trouvez de fausses nouvelles, parfois violentes et effrayantes, souvent stressantes, qui affectent les Marocains et leur société», conclut-il.

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