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Grand Angle

Pèlerinage juif au Maroc #31 : Daniel Hashomer Ashkenazi, le Sidi Daniel de Tougana

Dans cette série, Yabiladi revient sur les grands lieux de pèlerinage juif au Maroc, visités annuellement par des milliers de fidèles et de curieux. Dans ce trente-et-unième épisode, l’histoire des miracles de Daniel Hashomer Ashkenazi, inhumé dans le village de Tougana, entre Marrakech et Ouarzazate.

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La tombe de Rabbi Daniel Hashomer, dans le village de Tougana. / Ph. Rabbimap
La tombe de Rabbi Daniel Hashomer, dans le village de Tougana. / Ph. Rabbimap

A 55 kilomètres de Marrakech, sur la route d’Ouarzazate, il avait choisi le village de «Arba Tougana» (ou Tougana) dans l'Anti Atlas pour élire domicile. Rabbi Daniel Hashomer Ashkenazi alias Sidi Daniel est un saint autant juif que musulman.

La population locale, abstraction faite de sa religion, avait visité sa tombe dans le cadre d'activités spirituelles depuis plusieurs années. Selon les légendes, il était initialement un émissaire venu de la Palestine. A l’instar de plusieurs saints qui se rendaient dans les villages amazighs pour récolter des fonds pour leurs écoles, il s’était alors installé dans ce petit village et aurait même refusé de le quitter plus tard et revenir dans son pays.

Il décède alors, laissant dernière lui un récit fabuleux de plusieurs miracles ayant mis sa tombe au cœur d’un pèlerinage qui dure toute l’année mais qui s’intensifie particulièrement à l’approche du premier Elul, 12 mois du calendrier juif, intervenant entre août et septembre.

Le rabbin Daniel Hashomer «est surtout connu pour ses remèdes miraculeux de maladies mentales et il est également vénéré par les musulmans, qui l'appellent sidi Denil (ou Daniel)», rapporte la plateforme Moreshet-Morocco, notant que même en Israël, «les juifs marocains continuent de célébrer son Hullula le premier d'Elul».

Le mausolée de Rabbi Daniel Hashomer, dans le village de Tougana. / Ph. RabbimapLe mausolée de Rabbi Daniel Hashomer, dans le village de Tougana. / Ph. Rabbimap

Hélas, l’histoire n’a effectivement pas gardé beaucoup d’informations sur la biographie de ce saint ni de son vécu. Heureusement, l’emplacement du mausolée, «malgré son isolement et les difficultés d'accès» n’a pas empêché que la Hiloula de Rabbi Daniel Hashomer «obtienne un grand succès».

Dans son livre «Saint Veneration Among the Jews in Morocco» (Editions Wayne State University Press, 1998), l’historien et ethnographe Issachar Ben-Ami revient surtout sur les légendes liées à Rabbi Daniel Hashomer. Certaines se focalisent sur la peur et les craintes des musulmans vis-à-vis de ce saint, qui les auraient conduits à le vénérer. «Un Arabe a commencé à construire une maison près de la tombe du rabbin Daniel Hashomer Ashkenazi, mais elle a été démolie et l’Arabe est décédé», raconte l’une d’elles.

Aux origines de sa vénération par des musulmans

Une autre rappelle que «tout acte hostile contre un saint, toute expression méprisante ou irrespectueuse au sujet de ce saint ou à propos de sa tombe, a provoqué de sévères représailles». «Une femme musulmane stérile qui s'est baignée près de la tombe de R. Daniel Hashomer Ashkenazi a été frappée de paralysie», avertit-on.

La tombe de Rabbi Daniel Hashomer, dans le village de Tougana. / Ph. RabbimapLa tombe de Rabbi Daniel Hashomer, dans le village de Tougana. / Ph. Rabbimap

De plus, «la période menstruelle d'une femme, ayant commencé lors d'une visite au rabbin Daniel Hashomer, avait provoqué un orage accompagné de grêle et de pluie», ajoute une troisième.

«Les musulmans ont eu peur de lui. Aucun musulman qui a coupé un morceau des arbres ou fait quelque chose de mauvais n’a vécu longtemps. Les musulmans disent penser que ''ce shomer (saint) est sévère''.»

Légendes sur Rabbi Daniel Hashomer

Mais Rabbi Daniel Hashomer est également présenté comme un saint guérisseur. «J'ai été malade pendant trois mois avec quelque chose comme le typhus. Je ne pouvais ni parler ni marcher», raconte-t-on dans un récit relayé par le livre de l’historien et ethnographe Issachar Ben-Ami. «J'y étais à peine arrivé quand je me suis rétabli. J'ai ouvert les yeux et j'ai demandé à mon père de la nourriture», poursuit la même personne, revenant sur sa propre expérience en visitant ce saint.

Des récits, relayés dans le même ouvrage, laissent entendre qu’une partie du mausolée aurait été construite par un juif ayant servi dans l’armée française et qui avait fait la promesse, avant la guerre, de revenir dans le village de Tougana pour y construire une maison près de la tombe.

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